[Tribune] Qu'on les trouve réussies ou non, les deux mascottes de Paris 2024 pourraient être l'occasion de connecter les Jeux avec un public jeune, en plus de jouer un vrai rôle dans l’expérience fan.
Le 14 novembre dernier, nous découvrîmes Les Phryges, les deux mascottes des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Conformément à la promesse affichée par le Cojo d’organiser des Jeux «révolutionnaires», les Phryges olympique et paralympique sont le fruit d’une ambition salutaire et rafraîchissante : se démarquer, casser les codes, en choisissant un idéal plus qu’un animal.
Il faut dire qu’en matière de révolution, les Phryges en connaissent un rayon, puisqu’elles représentent le bonnet phrygien, symbole de la Révolution française et coiffe de Marianne. Ne pas politiser le sport, vous avez dit ?
Bien qu'inspirées de l’Histoire, elles ont quelque chose de sympathique, de moderne, et de pétillant. Cette opinion est partagée par le grand public : selon une étude Toluna Harris Interactive, menée le jour et le lendemain de leur apparition, 75% des adultes et 83% des 6-17 interrogés les appréciaient.
Une nouvelle étape de la préparation des Jeux
Mais il est un sport où nous excellons : moquer nos mascottes. Les bonnets Phrygiens sur pattes ressembleraient donc à des clitoris. La belle affaire. Passé l’appréciation de chacun et chacune à l’égard de leur apparence, que peuvent-elles avoir de révolutionnaire au-delà du couvre-chef, ces Phryges ?
Le sujet n’est pas tant de savoir si nous les trouvons aujourd’hui réussies ou non, mais comment elles vont changer le «game» des mascottes dans l’histoire des Jeux et du sport. Elles ouvrent une nouvelle étape de la préparation de Paris 2024 : celle de l’engagement du public. En endossant leur rôle de VRP à poils, elles vont humaniser l’évènement, créer un lien émotionnel entre les Jeux et les gens et bien sûr, développer les revenus liés au licensing (la révolution fait vendre). Ce sont là, comme pour toutes les mascottes, leurs principales missions.
C’est ici que se situe l’opportunité : oui pour une révolution des mascottes ! Qu’elles jouent un vrai rôle dans l’expérience fan et aient une vraie utilité dans notre la célébration de l’évènement. Puissent-elles nous faire vivre des Jeux comme jamais auparavant. Elles ont notamment un défi de taille : connecter les Jeux avec un public jeune, grâce à un récit sportif olympique contemporain, qui tienne compte de ses attentes, de ses codes.
Une pérennité qui dépendra du succès sportif de ces Jeux
Il faudra alors répondre à plusieurs questions. Quelles expériences innovantes, uniques et mémorables ? Comment pourrons-nous interagir avec elles ? Comment vont-elles nous mettre tous au sport ? Seront-elles des coaches virtuelles ? Quelles histoires nous raconter, quels contenus originaux inspirants ? Comment vont-elles exprimer et incarner la liberté ?
Riches de leur référence historique, les Phryges pourraient-elles intéresser les plus jeunes à l’Histoire, ou du moins à l’histoire du sport ? N’oublions pas, bien sûr, que leur pérennité dépendra également du succès sportif de ces Jeux et de la performance des athlètes français. C’est la magie du sport : Footix [mascotte du Mondial de foot 98] n’aurait pas eu la même destinée si les Bleus n’étaient pas montés sur le toit du monde. Si les résultats ne sont pas au rendez-vous, que restera-t-il de toutes les peluches produites ?
Alors que le sport professionnel mène une réflexion sur les transformations à opérer pour embrasser les enjeux sociétaux et environnementaux, on peut se poser la question de l’intérêt de produire des mascottes en très grande quantité. Et si la vraie révolution eut été de ne pas faire de mascotte ?