Si les femmes ont intégré les conseils d'administration des grandes entreprises françaises durant la dernière décennie, les postes de direction leur résistent encore. Au même moment où Christel Heydemann tente de prendre la direction d'Orange.
Au 18 janvier, on ne trouve qu'une seule directrice générale d'un groupe du CAC 40 : Catherine MacGregor, chez Engie depuis le 1er janvier 2021. Le 1er juillet, Estelle Brachlianoff occupera les mêmes fonctions chez Veolia, après sa nomination début janvier 2022. Deux femmes bientôt à la tête d'une entreprise du CAC 40, cela paraît peu mais jamais deux femmes n'ont occupé en même temps la direction opérationnelle d'une entreprise de l'indice phare parisien, excepté pendant l'intérim exercé entre mars et septembre 2021 par Véronique Penchienati-Bosetta chez Danone. L'Américaine Patricia Russo avait été la pionnière, à l'issue de la fusion Alcatel-Lucent en 2006, mais il avait fallu attendre 10 ans de plus pour qu'une deuxième femme suive, Isabelle Kocher, déjà chez Engie. Ilham Kadri est PDG de Solvay depuis mars 2019, soit quelques mois après la rétrogradation de l'entreprise belge hors du CAC 40. La nomination de Christel Heydemann à la tête d'Orange serait «un bon signal de progrès qui répond à une attente de la société», estime la vice-présidente et porte-parole de l'organisation patronale Medef, Dominique Carlac'h, également dirigeante d'une PME.
L'indice phare parisien attend encore sa première présidente-directrice générale. Il pourrait ne jamais y en avoir, car les groupes dissocient de plus en plus les deux fonctions. C'est le choix qu'ont fait Véolia et Orange en janvier. Christel Heydemann a reçu le soutien du ministre de l'Economie Bruno Le Maire. «À compétences égales, le ministre souhaite que ce soit une femme», avait-on assuré mi-janvier à Bercy après l'audition des trois candidats. L'Etat est le premier actionnaire d'Orange, avec 20% du capital.
Le plafond de verre du Comex
Les femmes sont de plus en plus présentes dans les organes dirigeants des 120 plus importantes sociétés cotées. Elles occupaient 46% des sièges des conseil d'administration et de surveillance en septembre 2021 selon la plateforme de données dédiées à la gouvernance d'entreprise Ethics and Boards, contre 26,2% en 2013. C'est le taux le plus haut en Europe. En France, la loi Copé-Zimmermann impose depuis 2011 un quota de 40% femmes dans ces conseils. Toutefois, seuls neuf étaient présidés par des femmes en juillet sur l'indice élargi parisien de 120 entreprises en septembre 2021, dont Legrand (Angeles Garcia-Poveda, conseil d'administration) et Michelin (Barbara Dalibard, conseil de surveillance) pour le CAC 40. Elles n'étaient que trois en 2017. Et dans les conseils exécutifs (Comex) et de direction, pas concernés par la loi, les femmes occupent moins d'un siège sur quatre (23,8%) en janvier 2022, contre 12% en 2013, selon Ethics and Boards. La plateforme ne comptait à cette date que 14 femmes à la direction d'un groupe du SBF 120. Avec le vote de la «loi visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle» en décembre, les instances dirigeantes des entreprises de plus de 1.000 salariés doivent inclure au moins 30% de femmes d'ici 2027. Ce taux montera à 40% d'ici à 2030.