Innovation
Si les incubateurs africains souffrent particulièrement de la crise sanitaire, leur potentiel reste important. Rahel Chukwu, responsable des opérations et de l'engagement francophone d'AfriLabs, le premier réseau panafricain de centres technologiques et d'innovation, nous parle du phénomène de résilience.

Créé en 2011, AfriLabs est un réseau de hubs technologiques en plein essor, des espaces d'innovation qui sont autant de points de rencontre pour les entrepreneurs et innovateurs africains. En tout, AfriLabs regroupe 225 centres d'innovation répartis dans 47 pays africains, dont la vocation principale est de soutenir et de former des écosystèmes capables de créer des emplois.



Quels sont le rôle et les missions d’AfriLabs?

Notre rôle est de soutenir les hubs d’innovation et leur communauté, afin de former des entrepreneurs à fort potentiel. Plus largement, il s’agit de développer des réponses innovantes aux problèmes africains. AfriLabs est convaincu que le soutien au développement de cet écosystème permet à l'Afrique de participer au marché mondial de l’innovation, stimulant ainsi la croissance économique et sociale. Nous atteignons ces objectifs grâce aux renforcements des capacités et au soutien à la recherche de financements de ces entrepreneurs, à leur mise en réseau, à la défense des politiques favorables à l’écosystème technologique, et à la fourniture de données pertinentes.



Le thème principal de la sixième édition du rassemblement annuel d’AfriLabs était la résilience. Quels sont les enseignements principaux à retenir de cet événement?

Ce thème a été choisi en écho de la crise sanitaire que le monde traverse. Les incubateurs africains ont particulièrement souffert, mais leur capacité de rebond est grande. Dans notre dernier rapport d’étude nommé «Construire une Afrique innovante et résiliente» en partenariat avec le cabinet de conseil en communication Djembe Consultants, nous avons évalué l'impact de la Covid-19 sur les jeunes entrepreneurs du continent. Les conclusions du rapport dévoilent que la majorité des innovateurs africains (90%) sont confiants dans le fait de pouvoir continuer à développer leurs activités à la suite de la crise. Et 74% déclarent qu'ils étudient actuellement la possibilité d'entrer sur les marchés internationaux. En revanche, même si 51% indiquent qu’ils sont conscients du soutien de l'État, ils estiment que ce soutien est insuffisant pour répondre à leurs besoins actuels en matière de développement des activités. Ainsi, 42% des start-up considèrent les hubs d'innovation comme de potentielles plateformes pour l'accès au financement, pour le réseautage, le renforcement des capacités et la R&D.



Comment est structuré l'écosystème technologique africain?

Il s’agit de l’un des plus jeunes écosystèmes d’innovation au monde. Pour autant, il a su montrer son potentiel, avec diverses niches dans différentes régions et pays du continent, en particulier sur des solutions à fort impact. Et d’ailleurs, lorsque les start-up bénéficient d’un soutien approprié et de politiques progressives, elles connaissent un développement rapide. Les pays particulièrement dynamiques sont le Nigéria, l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Égypte. D’autres sont en pleine expansion.



Quels sont les secteurs principaux d’innovation en Afrique?

L’agritech figure parmi les secteurs les plus dynamiques, avec des start-up telles que Twiga Foods, au Kenya, spécialisée dans la mise en relation de petits producteurs avec des revendeurs informels, ou Esoko, société ghanéenne, spécialiste de l’information en temps réel des petits exploitants sur les prix de leurs produits et sur la météo, dans un but d'optimisation des périodes d’arrosage ou de récolte. La fintech est aussi un secteur porteur, à l’instar de la première licorne nigériane, Interswitch, qui commercialise des services de paiement intégrées, ou de M-pesa, au Kenya, qui permet de transférer de l’argent via son téléphone portable depuis 2007.



Quels sont les grands défis auxquels font face les entrepreneurs?

Le principal frein est le soutien insuffisant des gouvernements ainsi que l’accès aux financements. Pendant la pandémie, les gouvernements ont apporté leur soutien aux entreprises, mais il reste beaucoup à faire. Notamment la mise en place de nouveaux processus de financement, afin de stimuler la productivité et de permettre aux PME d’apporter de la valeur ajoutée à chaque étape de la chaîne de valeur, et de créer des emplois. Aussi, la mise à disposition de données utilisables en termes de business manque cruellement. Les gouvernements et autres institutions gardent jalousement les données qui pourraient pourtant aider au développement de solutions à fort impact… Des politiques favorables à l'innovation vont catalyser l'innovation sur tout le continent.

Trois incubateurs en Afrique

Centre d'innovation et de co-création axé sur l'impact social, l'acquisition de compétences, la création d'emplois et l'engagement des jeunes, au Tchad, Wenak Labs est un laboratoire de fabrication numérique qui vise à créer une plate-forme d'expression. Objectif: rassembler les passionnés de la création numérique afin de stimuler l'esprit de créativité et le partage des connaissances.

Entreprise algérienne fondée en 2015, Sylabs œuvre pour l'inclusion des initiatives entrepreneuriales, notamment des jeunes, dans un paysage économique algérien en pleine mutation. C'est un centre d'innovation qui se concentre sur l'impact social, l'acquisition de compétences, l'innovation, et reçoit la plupart de ses fonds de la part de l'Europe.

La Fondation E4Impact est une alliance d'universités, d'entreprises et d'institutions qui visent à développer une nouvelle génération d'entrepreneurs africains à fort impact, située au Kenya. Son principal objectif est de renforcer le développement durable des économies à croissance rapide en formant des entrepreneurs d'impact et en intensifiant la croissance de leurs entreprises.

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