Quel internaute, à la recherche d'un trajet en train, n'a pas tapé SNCF sur Google pour tomber incrédule sur SNCF.com, un site institutionnel traitant de tout sauf de réservation de billets, ce service étant exclusif à Voyages-SNCF.com? Une manifestation de la complexité de l'organisation de l'entreprise que l'usager devait supporter sans rien y comprendre. Depuis début juillet, cette «bizarrerie» a disparu. S'émancipant du carcan corporate, le nouveau site SNCF.com prend (enfin!) en compte les besoins des clients et fournit, désormais, dès la page d'accueil des informations de voyages (horaires, réservation, info trafic...). Avec retard sur certains de ses concurrents...
Aux commandes de cette refonte, l'agence digitale Nurun France présidée par Antoine Pabst qui a remporté, en mars 2011, l'appel d'offres face à DDB Paris et Isobar après l'élimination de Digitas et Fullsix. «Le brief disait de faire le Google du rail, raconte David Marti, directeur associé chez Nurun en charge du newbiz. Notre approche de la "digital utility", c'est de satisfaire les besoins des utilisateurs, d'où notre recommandation de faire de SNCF.com, un hub qui centralise toutes les informations voyageurs, entreprises et publics institutionnels, tout en fluidifiant la relation de la marque avec les clients.» En cohérence avec SNCF.com, Nurun a également mené la refonte graphique de Voyages-SNCF.com, premier site e-commerce français (3 milliards d'euros de chiffre d'affaires).
Privilégier l'exigence du client
Simplicité et simplification ont guidé le travail de l'agence et de SNCF tant au niveau de l'architecture de l'information (menu intuitif) que sur le plan graphique (interface épurée et fluide pour ordinateur, tablette, mobile) et éditorial (choix du vocabulaire, hiérarchisation des sujets...). Le site renvoie à trois univers: Voyageurs (sur lequel on arrive par défaut), Entreprises et collectivités, et Groupe. Les pages sont conçues en deux espaces: à gauche, la partie fonctionnelle imaginée comme une télécommande, à droite la zone d'expression de la marque modulable. «D'abord, on rend service aux utilisateurs afin qu'ils soient, ensuite, en capacité d'écouter d'autres messages de la marque», justifie David Marti. Dans chaque univers, «la télécommande» met à disposition les fonctionnalités correspondant aux besoins exprimés par les usagers: billets, info trafic, tarification, dialogue dans Voyageurs; partenaires du fret et offres BtoB, notamment à l'international dans Entreprises; offres d'emploi et métiers dans Groupe.
«SNCF.com est l'expression de la décision stratégique prise courant 2010-2011 de construire une nouvelle plate-forme de marque autour de l'unique bannière SNCF et de privilégier l'exigence du client», explique Patrick Ropert, directeur de la communication du groupe depuis avril 2010. On imagine les frustrations à gérer à l'interne... «Dans les années 1990-2000, le groupe a fait émerger des marques, poursuit-il. Aujourd'hui, ce morcellement affaiblit notre visibilité, et dans un environnement concurrentiel et de crise, l'enjeu est de capitaliser sur la marque unique SNCF porteuse de valeurs de réassurance (sécurité, fiabilité, fierté...) et de modernité.» L'aspect patrimonial est valorisé sur le site, avec un volet histoire et une galerie de portraits des présidents.
Cette nouvelle posture entraîne la disparition d'Intercités, TGV, TER, Transilien en tant que marques. Sur le Web, «ces produits de SNCF» vont être progressivement réintégrés au sein de SNCF.com et Voyages-SNCF.com. Patrick Ropert a également entrepris un travail sur le récit de la marque, en étant notamment partenaire d'un documentaire (Canal +) et d'un ouvrage sur l'histoire du train à paraître. «Le mythe du voyage est accaparé par les marques de luxe, note-t-il. A SNCF de se le réapproprier.» Le chantier du design est également en cours (aménagement des gares, livrée des trains...) à l'instar de la sémantique. Une charte établie avec l'Institut de la qualité de l'expression irriguera les formations des 240 000 salariés, «tous ambassadeurs de la marque SNCF», souligne Patrick Ropert.