Il tchatche face caméra, à première vue depuis son studio, et commente le mythe des études à l'étranger – en l'occurrence en Australie – avec dérision et un style très «djeuns». Bienvenue dans l'univers de Cyprien Iov, devenu star sur la Toile avec ses vidéos sur You Tube ou Dailymotion. C'est le dernier «coup» publicitaire de la banque CIC: elle lui a en effet commandé une série de vidéos, où il donne sa vision des stages à l'étranger pour les étudiants. Les premières sont diffusées les 25 mai, 6 et 25 juin, d'autres étant prévues pour cet automne. «Le CIC voulait cibler les étudiants et jeunes actifs de 18 à 28 ans, et trouver une manière de leur parler avec empathie. C'est compliqué en effet pour une banque de s'immiscer dans les médias sociaux», souligne Laurent Gesta, directeur général adjoint de l'agence Australie, qui conseille le CIC.
Pour accéder à ces vidéos, l'internaute doit se rendre sur la page Facebook du CIC et la «liker». Un moyen pour la marque de recruter de nouveaux fans... Mais tout en discrétion. Le CIC a pris soin d'éviter de cannibaliser le style de Cyprien, qui n'évoque jamais la marque ou l'univers bancaire. Seule référence à la banque, la mention «Les moments de Cyprien présentés par le CIC» en début de vidéo. «Il fallait veiller à ne pas faire de ces vidéos des produits publicitaires», précise Laurent Gesta. Y compris pour ne pas braquer sa communauté...
Cyprien n'est pas le premier à céder aux sirènes des marques. Norman, Mister V, Hugo... Ils tirent déjà des revenus de la seule diffusion de publicités sur leurs vidéos, via des « contrats de partage des revenus à 50/50 hors frais de régie, ce qui englobe les pre-rolls vidéos, les bannières et les liens hypertextes», précise Marc Eychenne, directeur des contenus chez Dailymotion.
Mais la nouveauté est qu'«ils monétisent désormais leur audience: y compris le partage sur leur compte propre (Twitter, Facebook) des vidéos commandées par les marques», poursuit-il. «Ils ont en commun une force de frappe de plusieurs millions de vues à chacune de leurs vidéos, avec des contenus riches, qui ont une valeur intrinsèque», estime Eric Maillard, directeur général d'Ogilvy PR. Cyprien compte «1 046 000 fans Facebook, 350 000 followers sur Twitter, 11 000 followers sur Google+, 395 000 abonnés You Tube», vante ainsi la banque CIC dans son communiqué.
Plusieurs ont ainsi tourné des vidéos sponsorisées. Norman a fait le tour du monde avec Crunch (JWT) ou a fait son cinéma avec Orange (Havas Media). Chez l'opérateur toujours, après avoir tourné en 2011 des vidéos pour les Ciné Days, il a rempilé cette année en auditionnant à sa manière pour un rôle dans Intouchables ou The Artist. «On cible ainsi des 15-25 ans, qui repartagent les vidéos sur les médias sociaux», souligne Odile Roujol, directrice de la communication d'Orange France. «J'ai toujours fait en sorte que ce soient des vrais sketchs, avec un sponsor qui offre des moyens nouveaux pour réaliser des choses que je n'aurais pu faire seul. Ma limite c'est de ne rien dénaturer et de garder mon style», précise l'intéressé qui, déjà aguerri aux RP mais tout de même un peu gêné de parler de cet aspect financier, a n'accepté de répondre à Stratégies que par... e-mail.
Autres «loleurs» en vogue: Jérôme («La Ferme Jerome») tourne depuis début mai des sketchs très optimistes sur des stars de musique pour MTV. Hugo Tout Seul, pour sa part, vante dans trois sketchs les bénéfices du permis de conduire dans une série de vidéos pour Société générale (Magic Garden Agency). Reste à ces stars en herbe du Web à exploiter cette notoriété éphémère, sur les planches, sur la Toile, à la télévision voire sur le grand écran. C'est le cas de Norman, qui s'apprête à faire ses débuts au cinéma, en jouant le premier rôle de Pas Très Normales Activités, le prochain film de Maurice Barthélémy. De quoi créer des vocations.