Le nucléaire est un sujet polémique. En investissant 7 millions d'euros d'achat d'espace en France dans un film d'animation à la gloire de son positionnement dans les énergies sans CO2 (lire Stratégies n°1615), Areva s'exposait forcément aux critiques, même si la qualité de cette superproduction à la Disney signée Euro RSCG C&O est indéniable. Pour préparer le terrain sur le Web, l'agence Élan, chargée de la réputation en ligne d'Areva, a d'ailleurs pris soin de la présenter à des blogueurs spécialistes en communication, qui n'ont pas manqué d'applaudir le spot et son making of.
Pas de réunion en revanche avec les écologistes, dont peu, finalement, se sont emparés du sujet sur la Toile. Jusqu'à cette plainte de Corinne Lepage et d'Arnaud Gossement, déposée mercredi 12 janvier auprès du Jury de déontologie publicitaire (JDP). Taxé «d'allégation mensongère», le film qui associe dans un même plan final trois centrales (nucléaire, éolienne et solaire) fait croire, selon eux, que le nucléaire est une énergie renouvelable. «Corinne Lepage est une avocate qui fait du business et qui a besoin d'exister politiquement, commente Jacques-Emmanuel Saulnier, directeur de la communication d'Areva. Nous n'avons jamais dit que le nucléaire est une énergie renouvelable. Ce plan final présente tout simplement notre offre.»
Discours trop simpliste ?
Quoi qu'il en soit, Areva va maintenant devoir justifier ses choix créatifs au regard de la recommandation développement durable de la profession qui précise, entre autres, que «le message publicitaire ne saurait suggérer une absence totale d'impact négatif». L'annonceur a pour lui l'avis favorable de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) obtenu avant diffusion. Mais cet avis peut être contredit par le JDP. Ce fut le cas à deux reprises en 2010.
Ce n'est pas le premier faux pas d'Areva. L'énergéticien avait dû en 2009 abandonner sa signature «L'énergie au sens propre», après une plainte des Verts auprès de l'ARPP. Aurait-il pu, cette fois, éviter les critiques? «Quoi que nous fassions, elles ont lieu. Et tant mieux. Elles font parler de la campagne et suscitent le débat», ajoute Jacques-Emmanuel Saulnier.
Reste que la stratégie des moyens adoptée fait, elle aussi, débat. Un sujet aussi complexe est-il adapté au discours simpliste et caricatural d'un spot télévisé? Est-il pertinent, à l'heure des médias sociaux, de s'offrir les faveurs de l'opinion à grands coups d'achat d'espace quand l'actualité peut à tout moment contredire des messages enjolivés? Areva, on le sait, peine à organiser le débat sur le Web. Le nucléaire aurait tout à gagner à se faire accepter en toute connaissance de cause. À mille lieues de Disneyland.