Marketing musical
Au Midem, les artistes français qui choisissent de chanter en anglais seront sous les feux des projecteurs. Un coup de pouce pour une promotion compliquée tant en France qu'à l'étranger.

Les Rémois de The Bewitched Hands et de The Shoes, les Montpelliérains de The Chase ou encore le Niçois Medi: la liste des groupes français chantant en anglais est longue. Preuve que la musique pop n'est plus seulement anglo-saxonne et qu'il faut désormais compter avec la «French Touch». Leurs aînés comme Daft Punk, Air ou Phoenix sont passés par là, donnant naissance à un courant aujourd'hui important de la chanson française. Le phénomène est suffisamment marquant pour que le Marché international de l'édition musicale (Midem) lui consacre, les 23 et 24 janvier, un événement spécial intitulé French Vibes et soutenu par le bureau export de la filière musicale française.

Même si la langue anglaise est censée ouvrir toutes les portes à ces artistes, promouvoir ces nouveaux talents est un savant jeu d'équilibriste, tant sur le marché français qu'à l'international. «En France, les quotas de diffusion de chansons francophones à la radio sont un premier gros écueil», souligne Frédéric Monvoisin, fondateur du label Green United Music (GUM). Tenues par ces quotas, les radios nationales diffusent peu ce type d'artistes. «Virgin Radio est, toutefois, celle qui nous a ouvert le plus et le plus tôt sa programmation», nuance Marc Thonon, directeur du label Atmosphériques.

Au secours de cette vague «franglaise», viennent d'abord les réseaux sociaux (My Space) ou certains blogs américains (Stereogum), qui ont permis les premiers retours de l'étranger. «Peu à peu, les “vues” se sont multipliées et les directeurs artistiques des maisons de disque françaises ont compris qu'un nouveau créneau émergeait», raconte Pierre Le Ny, chez GUM. Les plates-formes vidéo, de You Tube à Vimeo, ont offert à ces artistes une exposition supplémentaire. Mais c'est en France, avec Dailymotion, que le travail semble le plus payer: «La plate-forme est éditorialisée. Du coup, avoir la vidéo de son artiste sur la page d'accueil de Dailymotion, c'est comme faire la couverture des Inrocks il y a quelques années», ajoute Fred Monvoisin.

Délocaliser la promotion à l'étranger

Dans cette éclosion, la «synchro» publicitaire peut jouer un rôle primordial. «Contrairement à la variété française, les paroles en anglais n'interfèrent pas avec le message publicitaire. Ces artistes ont donc une forte possibilité de développement en synchro, notamment pour des campagnes européennes», explique Stéphanie Giraud, fondatrice de Bonus Track et à l'origine des synchronisations de Yael Naim pour Apple ou de Cocoon pour Volkswagen. «Cela accélère le travail d'identification. C'est ainsi à la suite de sa synchro pour la Renault Twingo que le titre Whistle de Sporto Kantès a été diffusé sur Virgin Radio», explique Pierre Le Ny.

À l'international, les États-Unis et le Japon restent les plus réceptifs. En Amérique, la notoriété des petits Frenchies se construit via des concerts dans des festivals reconnus du type Coachella. «Pour prolonger cette visibilité, nous avons pris une attachée de presse américaine, explique Alexandra Pilz-Hayot, directrice marketing du label Savoir-Faire. À chaque sortie de “single”, nous avons envoyé un 45 tours et une lettre manuscrite à tous les disquaires rock du monde entier.» Une stratégie artisanale qui fait pourtant de The Bewitched Hands un des groupes «franglais» les plus connus outre-Atlantique.

Déjà rassasiés par leurs très bonnes productions locales, les Britanniques demeurent le marché le plus hermétique. Conséquence, les Français signent souvent une licence, voire une coproduction avec un label britannique, à qui ils délèguent la promotion locale. C'est le cas de Medi, pour qui Atmosphériques s'est associé au label indépendant anglais Dramatico. Au Midem, l'artiste niçois espère à présent taper dans l'œil d'un label américain.

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