Comment communiquent les annonceurs lorsqu'ils utilisent des arguments liés à la santé et à l'environnement? L'agence Protéines, spécialisée en communication santé, a mené l'enquête sur ce sujet porteur (voir encadré), analysant les publicités parues en 2008 et 2009 hors secteur pharmaceutique et télévision, soit 1 871 annonces parues en presse, affichage et Internet (1 534 sur l'environnement et 337 sur la santé). Première constatation: ces thèmes qui constituent le sujet principal des annonces servent avant tout à vendre un produit ou un service. Notamment pour ce qui est de l'environnement. «A contrario, l'utilisation de la publicité pour promouvoir l'engagement de l'entreprise reste faible et en baisse», commente Serge Michels, directeur général de l'agence. Quant à la promotion des engagements via un partenariat (ONG, action solidaire, etc.), elle est minoritaire. «Moins de la moitié des annonces portent par ailleurs sur des faits concrets et vérifiables», poursuit Serge Michels. Ce qui pourrait expliquer l'utilisation marginale du publirédactionnel, pourtant propice à la pédagogie, pour évoquer ces thèmes, au profit d'un mode d'accroche très publicitaire.
Autre enseignement: les campagnes recensées sont peu utilisées pour promouvoir des gestes en faveur de la santé ou de l'environnement. L'intérêt pour la survie de la planète n'est manifestement pas au cœur des préoccupations. «Cette vision commerciale et peu étayée risque à terme de tuer un sujet perçu comme opportuniste et peu crédible», commente Serge Michels. D'autant que plusieurs études le montrent: l'argument environnemental n'est pas un critère d'achat déterminant ou suffisant aux yeux du consommateur, de plus en plus sceptique. La dernière enquête Ethicity sur la consommation responsable souligne en effet une forte méfiance des Français vis-à-vis des entreprises engagées en matière de développement durable. Et une indigestion face à la multiplication des prises de parole sur le sujet, 53% des sondés pensant qu'il y a trop de messages publicitaires sur la consommation durable.
Une saturation qui ne serait qu'une question de forme: 74% d'entre eux demandent en effet plus d'information et de preuves sur l'impact environnemental des produits achetés. «Dans certaines annonces, on observe une volonté de faire entrer aux forceps la thématique de l'environnement. Le “greenwashing” n'est pas loin», lance Serge Michels. Et de citer la publicité d'une tondeuse pour gazon moins bruyante, donc meilleure pour l'environnement. «Le bénéfice produit est suffisamment fort pour se passer de cet argument. D'autant qu'il existe certainement plus de gens sensibles au bruit qu'à l'environnement! On sent trop souvent l'utilisation opportuniste d'un mot à la mode», ajoute le responsable de Protéines. Enfin dans ces annonces où l'image domine sur les mots, deux codes couleurs largement utilisés, le vert pour l'environnement et le bleu pour la santé, contribuent, selon l'agence, à lasser le consommateur. La saturation n'est pas loin.
Des sujets liés
Pour l'agence, cette étude montre combien il est temps de réagir: «Il est nécessaire, sur ces thèmes, de passer d'une communication qui fait vendre un produit à une communication qui fait aimer», conclut Serge Michels. Et d'évoquer l'expérience de son client McDonald's parlant des engagements de l'entreprise quand il s'agit d'environnement dans des campagnes bien distinctes de celles dévolues aux hamburgers. L'agence pense par ailleurs que les thèmes de la santé et de l'environnement sont des sujets liés qui gagneraient à être abordés de concert. En 2010, selon l'étude Ethicity, le premier critère qui ferait acheter un produit respectueux de l'environnement est «qu'il est meilleur pour la santé». «Un produit bon pour la santé peut l'être pour l'environnement et vice versa», explique Serge Michels, dont l'agence, pour vanter la qualité des bananes des Antilles, a préféré parlé de production durable plutôt que d'avantages nutritionnels. Une autre façon de vendre un produit…
Encadré
420 millions d'euros d'investissement
Santé et environnement: les entreprises communiquent fortement sur ces deux sujets, qui représentent en 2009 plus de 420 millions d'euros d'investissements (source: Kantar Media), dont plus de 336 millions pour l'environnement. La communication santé a connu une croissance de 15% en 2009, qui n'a toutefois pas compensé les pertes de 2008 liées à la crise (–40% versus 2007). À l'inverse, l'utilisation d'arguments environnementaux, en croissance de 32% entre 2007 et 2008, a légèrement baissé en 2009 (–3% versus 2008). Le secteur de l'automobile représente à lui seul 32% des investissements. Pas étonnant que Protéines s'intéresse au sujet: l'agence vient de décrocher comme nouveau client Nissan, pour lequel elle a conçu un site sur la mobilité électrique.