La plateforme de recherche d’emploi entend avec sa première campagne dépoussiérer les RH. Pour ce faire, son agence Marcel donne un coup de pied dans la communication en s’appuyant sur l’animation et l’illustration au travers de duos étonnants quoiqu’évidents.

L’année 2024 s’annonce riche pour Welcome to the Jungle. À l’aube de son dixième anniversaire, la start-up de recrutement, qui vient de réaliser une levée de fonds de 50 millions d’euros, a sorti début janvier sa toute première campagne de marque. Le projet commence en mars 2023 avec un appel d’offres en un tour réunissant autour de la table quatre agences. Trois mois plus tard, la décision tombe et l’agence Marcel remporte le brief. « Ce n’est pas la première fois que l’agence gagne une marque issue de la “start-up nation”, je pense que notre expérience nous a donné une sensibilité supplémentaire lors du pitch. L’objectif de Welcome to the Jungle avec cette première campagne est de traduire leur ADN auprès du grand public et de venir réenchanter tout le processus de recherche d’emploi », éclaire Jérémie Bottiau, directeur de création chez Marcel. Il est vrai que la campagne « Hack Market » réalisée pour leur ex-client Back Market, plateforme de seconde main, est un vrai plus dans leur CV.

À l’instar de Back Market, l’enjeu pour la plateforme de recrutement est de marquer les esprits. Avec un obstacle de taille, rendre séduisants ou du moins attrayants les sujets RH, qui plus est dans un contexte de transformation du travail. « Lors de notre création en 2015, l’objectif des fondateurs était de regarder l’état du monde du travail et les convictions autour. Il fallait déjà repenser la cohabitation entre employé-employeur et sortir de cet antagonisme pour retravailler les marques employeurs. Dix ans plus tard, la vision des fondateurs se réalise, les sujets liés au travail ont dépassé la sphère des RH et sont devenus un enjeu de société », éclaircit Alice Hagger, vice-présidente Brand & Creative chez Welcome to the Jungle.

Dès sa création, la plateforme s’est démarquée pour sa tonalité pop – une couleur jaune sur une typographie ultra léchée – et décalée. Un territoire graphique qui a été réutilisé au travers de trois prints illustrés et de deux films d’animation. « Nous avons fait le pari de l’animation car nous ciblons principalement les 18-34 ans qui vivent dans les grandes villes. Et pour porter cette évidence de la rencontre entre un employeur et un employé, nous sommes partis de la parabole des animaux de La Fontaine pour souligner métaphoriquement l’évidence au travers de duos. Une fois l’idée actée, immédiatement le binôme claquette-chaussette a été proposé, puis l’idée du sapin et du rétro et enfin le duo pizza-ananas qui vient apporter du débat. Depuis, en interne, c’est devenu un jeu. Les gens s’amusent à trouver des duos, le dernier en date était Beer-Pong », raconte Alice Hagger. « Nous avions également pensé au duo Coca-Mentos, mais pour des questions de droit, nous l’avons mis de côté. De manière générale, ce sont des duos qui vont générer le plus de conversations sur les réseaux sociaux car ils font partie de la pop culture de cette cible. Cela reste une start-up et mine de rien les moyens sont limités. Notre challenge a été de simplifier le message et de trouver les mots justes pour créer de l’intérêt », complète Jérémie Bottiau. Reproductible à l’infini, l’idée des duos permet une autoroute créative pour la marque.

Pour l’interprétation de ces personnages, trois illustrateurs internationaux – Wild So Serious, Valestrator et Kyle Platts – sont venus donner de leur coup de crayon. Selon les styles de chacun, l’agence leur a confié un duo. « Avant de trouver ces trois artistes, il y a eu un gros travail d’investigation sur Instagram. En toute honnêteté, nous n’étions pas sûrs que ça allait marcher, la marque n’est pas forcément connue à l’international et là on s’adressait à un Ukrainien, un Américain et une Thaïlandaise. Dans le doute nous avions prévu des solutions de repli. À notre grande surprise, ils ont tous immédiatement accepté », relate le directeur de création. L’agence a limité à trois allers-retours les illustrations, ramenant le temps de production à un mois. Du côté des films, deux studios d’animation internationaux, Passion London et Troublemakers, sont venus prêter main-forte. Avec à la production Robin Noël et à la réalisation Alexandre Scalvino, spécialiste de l’animation et par ailleurs superviseur de La Petite Robe noire de Guerlain.

Bien que les films soient courts, 20 secondes chacun, la création des animés aura pris deux mois et demi, « un travail d’orfèvrerie » souligne la vice-présidente Brand & Creative. Et visuellement, la parabole est crédible. Jusqu’à la fin des films, le doute plane. Il faut attendre le message « The job is yours » pour réellement comprendre de quoi on parle. Avec cette signature, la plateforme entend rappeler aux candidats qu’ils sont aux commandes de leur vie professionnelle. Même si ce rappel est anglicisé. « Au départ, Marcel nous a fait des propositions en français mais cette signature est une signature de marque, pas seulement de campagne, elle vise à accompagner notre déploiement à l’international. Et au regard du marché du travail chez notre cible, il tend à s’internationaliser », explique Alice Hagger. Aucune volonté d’être « hype » ou de faire « jeune » donc.

Le Netflix des RH

Le tout enrobé d’une virgule sonore spécialement créée pour l’occasion par la boîte de production Sixième Son. Inspirée de la bande-son de la série à succès The White Lotus, la signature sonore fascine autant qu’elle dérange. « Nous avons reçu pas mal de choix de la part de Sixième Son, nous avons hésité entre deux pistes, mais quelqu’un dans l’assemblée a dit : “cette signature, elle est étrange, un peu comme eux”, et c’était parti », raconte Jérémie Bottiau. « C’est un peu notre “Toudoum” à nous », grossit Alice Hagger, en référence à la signature sonore du géant du streaming, Netflix. Si la notoriété au niveau national est invoquée, l’accroissement du trafic du site est également recherché au travers de cette première prise de parole. En effet, la diffusion de cette campagne est calquée sur les temps forts de la recherche d’emploi. « Le plus marquant dans ce projet reste la responsabilité de créer la première campagne d’une marque. J’ai essayé de chercher la dernière fois que cela m’est arrivé car je commence à avoir de la bouteille, mais je n’ai pas trouvé », témoigne le créatif de Marcel. Au même titre que le message promis dans la campagne, les deux protagonistes se sont pour ainsi dire parfaitement trouvés.