Chaque année, c’est la grand-messe de Google : le Google Marketing Live dévoile toutes ses nouveautés publicitaires, en direct de son fief californien de Mountain View, devant un parterre de clients et de journalistes. Stratégies a assisté au show du géant de la Silicon Valley.

Lait d’amande, lait d’avoine, lait de soja, lait de quinoa… Il paraît que l’on mesure la qualité d’une tech company à la variété des laits qu’elle propose à ses employés. Ce 21 mai, au petit-déjeuner du campus Google, à Bay View, la gamme est des plus pléthoriques. Dans le nouveau QG des géants de l’internet, inauguré en 2022, une foule au style que l’on qualifierait, dans la presse féminine, de « casual chic » [chic décontracté], prend place dans un auditorium aux faux airs de temple japonais high-tech. Au milieu d’annonceurs, de retailers, de « partenaires » de Google, une grosse quinzaine de journalistes internationaux invités - dont Stratégies -, tous issus de la presse économique et professionnelle : le Handelsblatt (Allemagne), Performance Marketing World (Grande-Bretagne), Media Marketing (Belgique), El Economista (Espagne), iProUp (Argentine), Exame (Brésil)…  

Une trentaine d'innovations

En cette matinée californienne démarre une grand-messe annuelle : le Google Marketing Live (GML). Une petite semaine avant, le 14 mai, se tenait à quelques encâblures de là, à l’amphithéâtre Shoreline de Mountain View, la conférence Google I/O, destinée cette fois aux développeurs. Il est 9 heures, le show, - à l’américaine, forcément -, peut démarrer.

« Le premier GML a eu lieu en 2013, et son thème portait sur le “shift” vers le mobile, rappelle Philipp Schindler, SVP Marketing de Google. Il y a deux ans, la question que nous posaient nos partenaires était “Qu’est-ce que l’IA”, “Est-ce que l’intelligence artificielle est une réalité”, et aujourd’hui, “Comment puis-je l’implémenter le plus vite possible ?”» 

Limpide entrée en matière pour une matinée de présentation des innovations et produits publicitaires de Google (plus d’une trentaine), ponctuée par un « motto » [leitmotiv], « Putting Google AI to work for your businesses » [Mettez l’IA de Google au travail pour votre business]. Les punchlines se succèdent quasiment sans temps mort. « Nous avons coutume de dire que le CMO [chief marketing officer] est aujourd’hui le change management officer [manager du changement] », martèle Vidhya Srinivasan, VP/GM Advertising. « Aujourd’hui, deux consommateurs sur trois estiment que prendre une décision d’achat est plus difficile que jamais », poursuit-elle.

À cet effet, et pour maximiser le business des marques et retailers présents dans la salle, « L’IA générative va ouvrir d’énormes opportunités », se félicite la vice-présidente de Google en charge de la publicité. Plus de 40 % des requêtes d’achat sur Google mentionnent une marque ou un détaillant. Tout l’enjeu est de faciliter les recherches commerciales. Dans les mois à venir, l’expérience dans Search devrait ainsi s’enrichir afin de fournir plus de résultats aux questions et demandes des utilisateurs, avec de nouveaux profils de marques permettant la mise en avant de vidéos, d’avis consommateurs, de promotions et d’informations liées aux politiques de livraison en haut de page. Google teste par ailleurs une nouvelle expérience publicitaire dans Search, alimentée par l’IA générative. La curiosité des internautes est infinie, et particulièrement lorsqu’il s’agit d’acheter… « 15 % des recherches sont inédites chaque jour », explique Philipp Schindler. En se basant sur les recherches des utilisateurs (images et textes), Google AI les accompagne durant leur parcours d’achat complexe et leur fournit des recommandations sans quitter Search.

Lors de sa conférence Google I/O du 14 mai, Google annonçait déjà le déploiement de AI Overviews (précédemment connus sous le nom de Search Generative Experience, SGE) dans Google Search pour les utilisateurs aux États-Unis. Les AI Overviews devraient apparaître dans les résultats de recherche lorsqu’ils s’avéreront particulièrement utiles, au-delà de ce que Google Search propose actuellement. Google explique avoir constaté que les internautes qui utilisent les AI Overviews utilisent davantage Google Search et sont plus satisfaits de leurs résultats. Et lorsque les utilisateurs cliquent sur les liens des AI Overviews, ces clics sont de meilleure qualité, les utilisateurs étant plus susceptibles de passer plus de temps sur le site…

Adjuvant créatif

Décidément, que ne peut pas l’IA ? « L’IA n’est pas un marketeur, lâche Vidhya Srinivasan, l’IA n’a pas de goût, l’IA n’a pas de spontanéité. Elle ne peut substituer à l’expertise, à la faculté de trouver des insights… » Pour autant, Google s’en sert plus que jamais comme d’un adjuvant créatif. L’outil Performance Max, basé sur les technologies d’IA, qui propose de promouvoir ses produits ou services sur le réseau Google via des campagnes facilement gérables et mesurables – avec, selon Google, un taux de conversion augmenté de 27 % avec un coût par action similaire -, permettra bientôt aux annonceurs de partager leurs directives de police de caractères et de couleur ainsi que fournir des points de référence d’image utiles pour générer de nouvelles variations d’éléments publicitaires. Sont également introduites de nouvelles fonctionnalités de retouche d’images afin que les annonceurs puissent ajouter de nouveaux objets, recadrer pour adapter les images à n’importe quel format, taille et orientation.

Autre enjeu : circonvenir publicitairement la très convoitée et très volatile GenZ. Notamment via YouTube, qui regroupe 3 milliards d’utilisateurs et qui comporte « le shopping dans son ADN », assure Nicky Retke, VP de Youtube Ads, qui prêche le « shop while you watch » [achetez pendant que vous visionnez]. Nouveau format en vogue et en fort développement : les films verticaux, qui cumulent « 70 milliards de vues par jour ». Sur la liste des innovations 2024, la possibilité d’inclure des « stickers immersifs » dans les vidéos, ou encore de générer des films, via BrandConnect, à partir d’éléments issus de comptes de créateurs de contenus – avec leur accord, naturellement.

Il serait trop long et fastidieux d’égrener, façon inventaire de Prévert à la sauce Silicon Valley, toutes les innovations Google présentées lors du GML – informations par ailleurs largement disponibles sur les médias du géant de Mountain View. La présentation au tempo hollywoodien du 21 mai s’est conclue avec une megastar. Non pas l’IA générative, mais une star en chair et en os, 2,16 m au garrot et 147 kg : l’ex-basketteur de la NBA Shaquille O’Neal. En 2019, le GML s’était offert Katy Perry, en, 2022 Miley Cyrus… Le « Shaq », investisseur de la première heure dans Google, entrepreneur multicarte, notamment dans la chaîne de restaurants Big Chicken Shaq, prétendait n’avoir qu’une hâte : utiliser tous les nouveaux outils publicitaires IA de Google pour promouvoir son business…

Des espaces intérieurs ludiques

Une fois le grand show passé, le lendemain du 22 mai était l’occasion de rendez-vous plus « intimistes » entre les journalistes et les représentants de Google. Avec, en préambule, une visite de l’impressionnant Google Campus de Bay View : 100 000 mètres carrés de terrain et d’architecture durables, un hôtel de 240 chambres, un auditorium de 1 000 places, des espaces intérieurs ludiques, sept restaurants proposant – gratuitement, comme chacun sait – aux employés toutes sortes de nourritures du monde, healthy, toujours healthy [saines] avec une large place accordée au chou kale, péché mignon des foodies californiens, ainsi que l’omniprésence d’œuvres d’art, souvent inspirée de l’esprit « Burning Man », festival musical du Nevada - dont Google est actionnaire majoritaire.

Les sessions de questions-réponses permettaient d’éclairer les nouveautés présentées au GML la veille. Notamment tout ce qui relève de la collecte de données, à l’ère de la dépréciation des cookies tiers et de leur mort annoncée. « Good AI requires good data » [La bonne IA nécessite de la bonne data], égrenait Google au fil des présentations. À cet effet, l’outil Ads Data Manager ouvrira ses portes à tous. « Mon rôle a complètement changé depuis que je suis arrivée [en 2017], avoue Karen Stocks, VP Global Measurement & Audience Solutions. Les enjeux n’ont jamais été aussi élevés quant aux mesures de performances, clé dans la croissance et le ROI. Il nous incombe désormais de construire les fondations de la first-party data, en collaboration avec nos clients, avec des données consenties. Le consentement est inestimable, à un moment ou, plus que jamais, la protection de la vie privée est primordiale. Pour nous, la “privacy” constitue une opportunité de passer de la précision à la prédiction. » En ligne de mire, « les PME et TPE, aux moyens plus limités, pour lesquelles la collecte de données first-party peut être complexe. »

En résumé, comme l’assure Vidhya Srinivasan, « nous croyons à l’alliance entre la technologie et la “privacy”. » Les nouveautés Google, lancées aux États-Unis, devraient se déployer dans l’année, notamment en Europe, selon un calendrier pour l’instant encore non défini, subtilités des diverses politiques RGPD obligent. « Stay tuned » [restez connectés], comme on dit à Mountain View.

Chiffres clés

1000. Nombre de personnes qui ont participé au Google Marketing Live aux États-Unis et dans la région EMEA. Le GML avait lieu en Californie, à New York et à Dublin.

100 000. Nombre de mètres carrés de terrain du Google Campus de Bayview, inauguré en 2022.

40 %. Nombre de requêtes Google mentionnant une marque ou un détaillant.

182 500. Nombre d’employés Google dans le monde.