D’un site monté dans une chambre d’étudiant à un géant du numérique qui comptabilise plus de trois milliards d’utilisateurs, Facebook fête ses 20 ans. Pascal Malotti, directeur conseil de Valtech, fait le bilan.
Que peut-on retenir de Facebook après 20 années d’existence ?
Mark Zuckerberg a créé ce réseau en interne à Harvard. Il a développé une manière de communiquer qui, à un moment, a semblé moderne mais surtout beaucoup plus massive. Je pense que Facebook a essayé de reprendre les usages de l’être sociable qu’est l’être humain. Celui-ci est profondément sociable, il a besoin de contact et de partager ce qu’il fait… De pouvoir le partager sur une plateforme, c’est comme une scène sur laquelle on se produirait en permanence devant des centaines et des centaines de personnes. Aujourd’hui, on peut faire ce qu’on faisait avant mais devant un public beaucoup plus large.
Après, il faut différencier le réseau social et l’entreprise, qui, à chaque fois qu’il y a potentiellement une rupture d’usage, un changement de paradigme sur les réseaux sociaux, a su se reprendre rapidement par des rachats ou par l’intégration de fonctionnalités plagiées, parce que c’est la plus belle boîte en plagiat au monde. Même sur sa version initiale, il y a eu des plagiats, à commencer par le mur, qui, tel qu’il a été créé, vient de Twitter. La vision initiale de Facebook a énormément vieilli. Aujourd’hui, c’est clair, il reste l’état d’esprit du réseau social mais Facebook, en termes d’usages, c’est complètement dépassé.
Quelles sont les principales évolutions sur le ciblage des annonceurs ?
Facebook reste une machine à cibler formidable, il n’y a pas de débats ! En termes de segmentation, c’est un monde merveilleux, avec une plateforme complètement unifiée entre WhatsApp, Instagram et Facebook. On a toutes les catégories d’âge, les catégories socio-professionnelles et trois milliards d’utilisateurs actifs... Alors évidemment, en Europe, il y a un peu plus de limites qu’aux États-Unis, nous n’avons pas accès à certaines données de revenus ou même politiques. De plus, nous avons le RGPD et un certain nombre de réglementations qui sont en train de prendre corps.
Sur Facebook, les données sont directement accessibles par les annonceurs, contrairement à Google, où tout le savoir-faire sur le ciblage a été caché ou est moins prégnant avec Adwords, puisqu’on rentre par un mot-clé. Sur Facebook, on utilise des technologies qui font qu’on automatise souvent le ciblage. On peut avoir différents outils dans une entreprise qui permettent de créer cette segmentation de manière automatisée sur la base de l’historique de ses campagnes.
Est-ce que l’émergence d'autres plateformes, comme TikTok, a déjà un impact sur Facebook ?
C’est tout le paradoxe, parce que si on regarde les chiffres des revenus publicitaires par plateforme, c’est quand même Facebook qui reste la principale plateforme dans l’écosystème. Instagram ne représente que 30% dans le mixte des revenus de Meta, donc la majeure partie vient encore de Facebook. On dit beaucoup que Facebook, c’est l’EHPAD, que c'est un réseau social en voie d’extinction… Néanmoins, c’est toujours là où les annonceurs investissent le plus. Bien sûr, aujourd’hui, il y a la menace de TikTok, mais il y a des questions de fond derrière parce que c’est quoi l’après TikTok ? Une nouvelle génération va arriver, mais on ne connaît pas les formats ni les usages sur lesquels elle va s’ancrer.