[Tribune] Comment atteindre l'objectif de 100 licornes françaises d'ici à 2030, comme l'a fixé Emmanuel Macron, si les femmes ne sont pas mieux représentées dans le monde de la tech ? Il est temps de changer ça.
Par Cassie Leroux (directrice produit de Mailinblack), Laura Maret (directrice marketing et commercial), Catherine Vaudaine (directrice des ressources humaines), Séverine Detcherry (directrice administrative et financière), Laura Corredera (directrice support client) et Justine Gretten (responsable communication)
Cette année, la Journée internationale des femmes questionne la parité dans le secteur du numérique. Malgré son image flamboyante en matière d’innovation, la secteur de la tech n’est que peu inclusive puisque la proportion des femmes dans les métiers du numérique dépasse à peine 27%. Pire, elles ne sont que 17% dans des activités techniques autres que des fonctions marketing, RH, administrative... D’après Gender Scan, cette répartition n’a pas évolué depuis 2012.
Le président de la République a fait de la transformation numérique une priorité et a fixé un objectif de 100 licornes françaises d’ici à 2030. Une autre question se pose : comment parvenir à l’objectif de 100 licornes souhaité par Emmanuel Macron sans y associer nos talents féminins alors que le secteur fait face à une pénurie de main-d'œuvre ? Plus qu’un enjeu sociétal, la parité est aujourd’hui aussi un enjeu économique.
Un cercle vicieux qu’il faut rompre
Au XIXe siècle, Ada Lovelace, mathématicienne britannique, avait écrit le premier programme informatique de l’histoire. En 1978, les femmes représentaient 50% des étudiants en informatique. Moins d’un demi siècle plus tard, il devient bien difficile pour les jeunes femmes de trouver des modèles auxquels s’identifier pour, à leur tour, choisir la voie du numérique.
Ces inégalités entre les hommes et les femmes se glissent jusque dans la technologie même. Un algorithme, outil qui alimente de nombreuses technologies que nous utilisons au quotidien, est en premier lieu développé par des humains, et plus précisément, des hommes. Ces derniers étant surreprésentés chez les développeurs, ces algorithmes sont donc imprégnés de leurs biais.
En conséquence, «un algorithme de reconnaissance d'images auquel on a soumis un jeu de données dans lequel il y avait 33% plus de femmes représentées en cuisine a non seulement restitué ces rôles stéréotypés, mais les a même amplifiés pour produire 68% d'images de femmes en cuisine», explique Mathilde Saliou, auteure de Technoféminisme. Comment le numérique aggrave les inégalités.
La parité, simple argument marketing ?
Le sujet de la parité en entreprise est devenu un argument marketing sur lequel les entreprises n’hésitent pas à communiquer. Pourtant, comme pour les sujets d’économie circulaire ou d’impact carbone, combien d’entre elles traduisent leurs engagements en actions concrètes ?
Dans les entreprises du Next40, seuls 18% des postes de direction sont occupés par des femmes, soit 2 points de moins que dans celles du CAC40, d’après le baromètre Sista et Boston Consulting Group de mars 2022. On ne retrouve aucune femme parmi les CEO du Next40 et seulement sept parmi ceux du French Tech 120.
Si plusieurs lois ont déjà permis des progrès considérables (loi Copé-Zimmermann adoptée en 2011, loi Rixain en 2021), 50% des mères déclarent encore que la maternité a freiné leur carrière, et que leur salaire est inférieur de 22% en moyenne à ceux des hommes, d’après l’édition 2022 de l’étude Femmes et hommes, l’égalité en question de l’Insee. Les disparités entre les femmes et les hommes sont encore trop importantes, en France comme en Europe.
Sensibiliser et former pour changer le statu quo
En 2021, le rapport Global Gender Gap Report sur les inégalités entre les hommes et les femmes estimait que, malgré les progrès réalisés ces dernières années, les inégalités professionnelles ne seront pas comblées avant un siècle (au moins). Pour changer les choses, il faut prendre conscience des biais menant aux discriminations et sensibiliser collaborateurs et dirigeants d’entreprises aux enjeux de parité.
Les femmes devront être sensibilisées, dès leur plus jeune âge, aux nouvelles technologies afin d’acquérir des compétences capitales à leur réussite dans ces métiers d’avenir. Les barrières culturelles et professionnelles qui les empêchent d’accéder aux mêmes parcours et aux mêmes postes que les hommes devront être levées.
D’autant que les entreprises dirigées par des femmes sont en moyenne 32% plus rentables que celles dirigées par des hommes, a montré une étude de Women Equity Partners de 2020. Nommer une femme à la tête d’une entreprise est certes un pas vers la parité, mais c’est aussi une opportunité économique pour les organisations.
