C’est notre pays qui compte le plus d’entreprises événementielles certifiées à la norme ISO 20121. Mais les acteurs du marché veulent aujourd’hui aller encore plus loin.
Cocorico ! Au 31 décembre 2021, sur les 253 entreprises événementielles certifiées à la norme ISO 20121 dans le monde, 114 étaient françaises, soit 45 % du total. La France arrive loin devant l’Italie (32), la Grande-Bretagne (31) et l’Espagne (18). Créée à l’occasion des Jeux olympiques de Londres en 2012, cette norme est une référence en matière d’organisation d’événements responsables. D’où vient cette passion française ? Il faut remonter à 2004, lorsque Dan-Antoine Blanc-Shapira, fondateur de l’agence Sensation !, initie avec Benoît Desveaux, dirigeant du Public Système devenu Hopscotch, la démarche d’« écoévénement ».
« Nous avons été l’une des premières filières professionnelles à nous engager. Nous avons même été qualifiés de précurseurs par l’Ademe pour avoir eu cette prise de conscience », rappelle Dan-Antoine Blanc-Shapira. Dans les années qui ont suivi, les acteurs de l’événementiel ont ainsi eu accès gratuitement à des outils en ligne pour comprendre les normes et les labels ou réaliser un autodiagnostic. « On a longtemps ramé dans le sable mais aujourd’hui, toute la filière événementielle a pris conscience des enjeux du développement durable », se félicite le dirigeant.
Une vraie dynamique
Si ces pionniers ont eu un tel impact, c’est aussi parce que les organisations professionnelles comme Unimev ou Lévénement ont suivi, en créant par exemple des groupes de travail sur ces questions. D’autres acteurs ont pesé, à l’image de Béatrice Eastham, fondatrice en 2009 du cabinet-conseil Green Evenements. Elle a passé des années à évangéliser le marché et à former des centaines de personnes jusqu’au tournant de 2019. « Pour la première fois, il y a eu de la demande, c’est-à-dire, concrètement, des appels entrants », raconte-t-elle. Les années covid n’ont fait qu’interrompre, un temps, cette dynamique nouvelle.
Cet engouement pour la RSE est particulièrement visible chez certains acteurs comme les standistes ou les traiteurs. Les quarante adhérents du syndicat des Traiteurs de France sont ainsi tous à la norme ISO-20121. On le voit aussi chez certaines entreprises comme Châteauform’, qui exploite 70 lieux de séminaires ou d’événements et vient de publier son rapport RSE pour la seconde année consécutive. Elle y détaille les efforts fournis en matière d’achats de produits locaux ou de lutte contre le gaspillage alimentaire. « Cette démarche procède d’une volonté de l’entreprise mais, à un moment donné, il a fallu la formaliser pour montrer à nos clients que ce n’était pas seulement de belles idées », explique Claire Schwartz, responsable de l’engagement de Châteauform’.
Des enjeux et des contraintes
La profession est confrontée aujourd’hui à de nouveaux enjeux. Pour Dan-Antoine Blanc-Shapira, ils sont au nombre de trois. « Il faut arriver à formaliser la démarche de façon indiscutable, construire un outil de référence en matière de mesure d’impact carbone et pérenniser une filière de récupération pour l’alimentaire et les matériaux », estime-t-il. La difficulté réside dans les contraintes qui pèsent sur la filière, là aussi au nombre de trois, selon lui : des délais très courts, des contraintes budgétaires particulièrement fortes et le fait que les acteurs de l’événementiel sont rarement confrontés deux fois à la même configuration. Pour Stéphanie André, directrice associée de Double 2, une agence qui fait partie du groupement retenu pour organiser la cérémonie d’ouverture des JO de Paris, la question est plus large que celle de l’environnement. « Il y a l’aspect durabilité, la réduction des impacts sur toute la chaîne de la conception à la production, mais aussi la question de l’accessibilité des lieux pour les personnes en situation de handicap moteur ou psychique, et l’ouverture dans nos pratiques à des acteurs plus éloignés de nos métiers comme ceux de l’économie sociale et solidaire », analyse-t-elle.
Sur ces questions, les choses avancent, notamment grâce à la révision de la fameuse norme ISO 20121. La France est en première ligne. C’est elle qui doit proposer un nouveau texte, avec l’objectif qu’il soit adopté pour les prochains JO. « Cette mise à jour va représenter une évolution, avec la prise en compte d’éléments comme la notion d’événement hybride et virtuel, la raison d’être et l’entreprise à mission », indique Pauline Teyssedre, directrice de la stratégie du groupe Galis qui préside, comme représentante de l’Unimev, la commission de normalisation. « Surtout, on va faire en sorte de renforcer la norme pour que la Coupe du monde au Qatar certifiée ISO 20121, ça n’arrive plus ! », ajoute-t-elle. Il va notamment falloir, dit-elle, « faire monter en compétence une notion encore timide, celle de la mesure de l’impact des événements ».
Outils et labels
Dans ce contexte, de nouveaux outils apparaissent. Green Evenements a créé une spin-off, Climeet, qui propose un calculateur d’empreinte carbone avec la possibilité d’établir des scénarios différents et de mieux intervenir sur ses émissions. Le Festival de Cannes, Heineken ou GL Events font partie des premiers utilisateurs. « Le bilan carbone est un outil intéressant à deux conditions, si l’on peut faire un pré-bilan pour identifier les items sur lesquels on peut jouer et si l’événement est récurrent dans le temps de manière à pouvoir le comparer dans le temps », estime toutefois Stéphanie André chez Double 2.
Dans le domaine de la labellisation, Green Evénements a mis en place avec le cabinet de certification SGS le label Lead, pour « Label événement à ambition durable ». Il a été adopté par Châteauform’ dans sa salle parisienne du Metropolitan. Tous les événements que la société y organisera seront labellisés Lead. « C’est quelque chose de très concret, basé sur trois critères : zéro déchet, zéro net carbone et un impact social positif. Pour la première fois, on a quelque chose qui permet de se fixer des objectifs en termes de résultats, pas juste de moyens qu’on se donne », se réjouit Claire Schwartz.