Le 29 octobre 2021, le compte à rebours était lancé. Dans 1 000 jours s'ouvriraient les Jeux olympiques de Paris 2024, un peu moins de sept ans après leur attribution par le Comité international olympique. L’événement est d’autant plus attendu que cela fait 100 ans que Paris attend d’accueillir de nouveau les JO, et ce, pour la troisième fois de son histoire (comme Athènes en 2004 puis Londres en 2012).
Les entreprises partenaires (1) de l’événement sont dans les starting-blocks, tout comme leurs agences. Pourtant, alors que le passage de la flamme à la ville-hôte à l’issue de la fin des Jeux précédents marque traditionnellement le coup d’envoi des opérations de communication des partenaires du Comité organisateur des Jeux olympiques (Cojo), pour Paris 2024, le démarrage semble se faire en mode « moderato ». La raison de ce décalage ? Le covid. La pandémie mondiale a non seulement fait planer l’annulation des Jeux de Tokyo, avant de provoquer leur report d’un an, mais elle a aussi considérablement réduit les budgets marketing et mis un coup d’arrêt à de nombreuses opérations de communication.
Retard à l'allumage
« Avec le covid, tout a pris du retard », admet Nicolas de Fautereau, directeur associé de l’agence Willie Beamen. « Les grands partenaires ont investi beaucoup moins d’argent ces deux dernières années dans les opérations d’activation. Du coup, les agences de marketing sportif ont été fortement impactées par cette baisse des budgets », explique-t-il. Signe de ce retard à l’allumage, certains sponsors premium, comme Orange ou EDF, n’ont pas encore lancé leur appel d’offres pour choisir leurs agences de communication. « Les marques ont mis en oeuvre assez peu de campagnes d’activation concrètes », souligne aussi Pierre de la Ville-Baugé, directeur associé de l’agence spécialisée Sportmarket. « C’est dû au covid, à la compression des budgets marketing puis au décalage des Jeux de Tokyo. Mais c’est aussi lié au fait que les Jeux n’ont lieu que dans trois ans et que les dirigeants d’entreprise sont plutôt dans le temps court », analyse-t-il.
« Par nature, les JO sont un événement qui pousse les marques à s’engager sur le temps long, complète Matthieu Caste, responsable du département sportif de Fuse (groupe Omnicom). Comme les athlètes, les marques et les agences doivent préparer leur olympiade longtemps à l’avance. » Chez Landor & Fitch à Londres, David Powell, expert en sponsoring sportif, souligne que « les partenaires mondiaux, eux, ne s’engagent de toute façon pas avant la fin des Jeux d’hiver 2022 [qui se tiennent à Pékin, du 4 au 20 février prochains] auxquels ils sont associés. Les sponsors de Paris 2024, eux, n’ont pas cette échéance, ils ont donc intérêt à occuper le terrain en amont. »
Les « Jeux de la résilience »
Malgré cette situation exceptionnelle, le Cojo de Paris 2024 se déclare serein quant à l’atteinte de ses objectifs budgétaires en ce qui concerne les partenariats. Deux tiers des recettes partenariales devraient être sécurisées d’ici à la fin de l’année, conformément aux prévisions. « Les JO de Paris seront les Jeux du recovery après cette parenthèse covid. Ils marqueront le retour massif du public dans les stades après Tokyo et Beijing », veut croire Frédéric Quénet, senior VP de la BU Olympics de l’agence Sportfive. « Ce seront non seulement les Jeux de la résilience face au covid, mais aussi face aux enjeux de développement durable », complète-t-il en soulignant que ce seront les premiers JO livrés avec l’agenda 2020+5 du Comité international olympique.
Comme à chaque édition, le caractère universel des JO est l’occasion pour les partenaires premium de s’associer aux valeurs fédératrices du sport (implication, ténacité, capacité à surmonter ses échecs, esprit d’équipe…). C’est d’ailleurs dans ce sens qu’Allianz entend s’imposer comme l’assureur de référence du monde sportif et BPCE comme « la banque de l’économie du sport ». Mais le positionnement spécifique de Paris 2024, avec des ambitions visant à s’engager concrètement en faveur de l’environnement, de la réduction de l’impact sur le climat, mais aussi avec la volonté de laisser un « héritage » concret d’équipements olympiques au service des citoyens, constituent autant de territoires de communication variés.
Escalade et hip-hop
« Les JO de Paris 2024 seront des Jeux d’un genre nouveau. Il y a un vrai engagement environnemental et la dimension d’héritage social est très forte », s’enthousiasme Nicolas de Fautereau, chez Willie Beamen. « De plus, si la cérémonie d’ouverture peut se faire sur la Seine comme cela est prévu, ce sera une vraie nouveauté que celle-ci se déroule en ville hors d’un stade. Tout Paris sera alors le village olympique. » Par ailleurs, « l’arrivée de nouveaux sports comme l’escalade ou le hip-hop marquent aussi une rupture très importante ; ils vont permettre de rajeunir l’audience des Jeux olympiques », estime de son côté Frédéric Quénet, de Sportfive.
Pour autant, il n’y a pas que les partenaires officiels qui peuvent communiquer autour des JO. « Il existe de nombreuses façons de s’associer à Paris 2024 même si l’on n’est pas partenaire, fait remarquer Pierre de la Ville-Baugé, de Sportmarket. Les marques peuvent accompagner les fédérations sportives, les équipes olympiques ou des athlètes, mais aussi des collectivités territoriales. » L’agence conseille ainsi Orléans et Saint-Germain-en-Laye, qui veulent valoriser leur politique de sport de haut niveau ou de sport pour tous. Point P, de son côté, soutient des athlètes olympiques et paralympiques.
Un levier pour les entreprises en interne
Les JO peuvent aussi être l’occasion pour une entreprise de mobiliser ses salariés ou son réseau commercial. « Un partenariat olympique constitue aussi un levier incroyable pour casser les silos de fonctionnement au sein de l’entreprise et faire bouger les lignes en interne », affirme Frédéric Quénet. « C'est une plateforme incroyable pour partager les valeurs de l’entreprise », poursuit le dirigeant chez Sportfive. Ainsi, l’agence a conçu pour le compte de BPCE une plateforme numérique, Imagine 2024, qui permet de mobiliser les salariés autour du Team BPCE, qui regroupe 140 athlètes, dont 80 en pacte de performance, un dispositif fiscal permettant de soutenir des sportifs sous forme de mécénat.
Si les interrogations sur les futurs Jeux de Paris sont encore nombreuses (Le Cojo tiendra-t-il son budget ? Les Jeux seront-ils vraiment inclusifs ?), c’est tout à fait normal, à en croire David Powell, chez Landor & Fitch : « Tous les Jeux olympiques connaissent des cycles de rejet ou d’adhésion. À l’approche des Jeux, comme maintenant pour Paris 2024, il y a une phase négative de questionnement sur les choix du Cojo, le budget... Mais, à l’approche immédiate des Jeux, la population entre dans une phase de fierté nationale qui gomme toutes les polémiques ou toutes les dissensions. » Le Cojo peut être rassuré.
France Télévisions déjà dans la course
« Paris 2024 est déjà au cœur de toutes les attentions des partenaires officiels qui souhaitent mettre en lumière leur marque avec des contenus publicitaires ambitieux, créatifs et inédits », se réjouit Frédéric Jonquet, responsable sport de FranceTV Publicité. Cet été, France Télévisions, diffuseur officiel en clair des Jeux olympiques, a réuni plus de 50 millions de téléspectateurs devant les Jeux de Tokyo. « Les JO, qui représentent la quintessence du sport, sont une opportunité unique pour valoriser l’image d’une marque », argue Frédéric Jonquet.
Pour développer son offre commerciale dédiée aux JO, la régie s’est appuyée sur le principe de co-construction avec les partenaires. « Personnalisation, exposition surpuissante, complémentarité TV, digital et social, et innovations sont les quatre piliers de nos offres publicitaires sur les JO », développe le responsable. Pour accompagner les annonceurs, une « task force » regroupant les expertises commerciales, marketing, opérations spéciales et communication de la régie a également été créée.
Sur les antennes de France Télévisions, la communication autour de Paris 2024 a déjà démarré avec la diffusion de programmes dédiés comme « Destination 2024 » sur France 2, France 3 et France 5, parrainé par EDF. Le groupe audiovisuel public a aussi fait le choix de « l’événementialisation » du J-1000 avec, tout au long de la journée du 29 octobre, un dispositif publicitaire exclusif permettant à Banque Populaire de diffuser son film dédié aux JO.