Transformation
Les agences de communication événementielle se transforment à grande vitesse et se diversifient. Si bien qu’elles viennent empiéter sur le terrain des agences de com, de pub, digitales… De fait, elles se retrouvent parfois en compétition sur les appels d'offres.

« Le défilé de mode, c’est bien gentil, mais ce dont j’ai besoin, c’est de la diffusion vidéo, c’est de le montrer au monde entier. Entre les réseaux sociaux, la télévision, les photos, les live, il peut être vu par un milliard de personnes. Tous ces smartphones tendus au bout des bras des spectateurs ne me dérangent pas du tout. C’est une forme d’applaudissement silencieux. » Ces mots du grand couturier allemand Karl Lagerfeld, dans l’émission Quotidien du 3 avril dernier, résument assez bien ce qu’est devenu un événement aujourd’hui : une expérience cross-canal. Ainsi, un événement ne se résume plus à un moment donné, à un seul lieu physique et à une somme bien précise de participants... Le digital et les réseaux sociaux ont chamboulé l’ordre établi, les marques l’ont bien compris et les agences événementielles ont bien été forcées de s’adapter. « Nous prenons le parti de considérer qu’un événement va durer dans le temps (avant, pendant, après). On raconte une histoire, on crée du contenu, une appli, une plateforme, du teasing... », confirme Antoine de Tavernost, directeur général de l’agence Live! by GL Events.

Décloisonnement total

Dès lors, l’événement est devenu « un moyen de créer des expériences de marque inoubliables, des opérations plus conséquentes, avec des budgets plus importants également », selon Christophe Cousin, président de l’agence Win-Win. Et tous les coups sont permis. En diversifiant leurs offres à grands renforts d’innovation, de médias, de tech ou de stratégie, les agences événementielles viennent empiéter sur le terrain des agences de communication, de publicité, des cabinets de conseil mais aussi des agences digitales, technologiques, des pure players, etc. « Plus qu’un périmètre d’agence devenu flou, on assiste depuis quelques années à un décloisonnement total de la communication des marques et des institutions, observe Bertrand Biard, président de Lévénement, association professionnelles des agences de communication événementielle françaises. Les annonceurs raisonnent dorénavant par problématiques de communication et recherchent des dispositifs efficaces sur la durée. » Aussi, lors des appels d’offres, les marques explorent différents horizons. Ce qu’elles cherchent : une hybridation dont les agences événementielles ont précisément fait leur spécialité. « L'événementiel s’est hybridé avec tous les autres savoir-faire de la communication, notamment le digital, mais également les RP, l’influence marketing, le contenu, le conseil, la création ou encore l’achat d’espaces... L'objectif : “événementialiser” l’instant T, qui constitue tout de même notre savoir faire de base », explique François Bitouzet, directeur général de Publicis Live (ex-Publicis Events).

Expérience et émotion

« Nous sommes aussi créatifs que les agences de pub, lâche Antoine de Tavernost. Aujourd’hui, les notions d’expérience et d’émotion sont centrales pour pouvoir viraliser du contenu. Du reste, ces termes viennent précisément de nos métiers, avant d'être repris par tous les secteurs de la communication. » Cette transformation des agences suppose une évolution des offres et des compétences. Les agences événementielles ont désormais intégré à leur organisation des pôles consacrés à la création, au planning stratégique, aux contenus... Et les ressources internes sont nécessairement devenues plurimédia : community management, journaliste reporter d’images, monteurs, etc. « Nous allons sur les territoires de l’image, du média, et du digital car nous avons besoin que nos événements prennent une ampleur dans le temps et dans l’espace, et d’être capable de médiatiser ces actions », explique Christophe Cousin.

Pour s’adapter rapidement à l'escalade de certains des moyens techniques, François Bitouzet conseille de se rapprocher du monde des start-up : « Parce qu'elles inventent de nouvelles interfaces, des applications, des fonctionnalités (matching, datavisualisation, messaging...), des procédés technologiques (hologrammes, 3D, réalité virtuelle et augmentée...), il est devenu nécessaire pour le secteur de rencontrer régulièrement les jeunes pousses pour faire évoluer ses offres ». Tout comme il est primordial de tisser des liens forts avec le monde des arts et du spectacle pour explorer de nouveaux territoires. Même son de cloche du côté d’Antoine de Tavernost : « Nous avons tout intérêt à nous tourner vers les nouveaux producteurs de contenus. Des médias comme Konbini, Brut, mais aussi tous les influenceurs du web, qui inventent de nouveaux formats et de nouvelles grammaires ».

Les agences événementielles touchent à tout... Mais du coup, cette dénomination a-t-elle encore un sens? «Ce terme, nous continuons de le porter car c’est notre ADN, note Bertrand Biard. Toutefois, aujourd’hui, je parlerais plutôt "d'événementialisation de la communication"».

ENCADRE : Coup de soleil sur l’événementiel

Fin avril, l’institut d’études sectorielles Xerfi a publié son rapport sur le marché de la communication événementielle : « Digital, nouveaux concurrents, différenciation : quels enjeux et perspectives à l’horizon 2019 ? ». Il apparaît qu’une embellie du contexte conjoncturel en 2017 a constitué une véritable bouffée d’oxygène pour les agences de communication événementielle. Leur activité a ainsi progressé de 8 %. Et leur chiffre d’affaires continuera de croître à un rythme soutenu en 2018 (+6 %) et en 2019 (+7 %) selon les prévisions de Xerfi. Les dépenses des annonceurs dans l’événementiel dépasseront, elles, la barre des 2,8 milliards d’euros l’an prochain.

Si la concurrence des pure players du web va s’intensifier, avec pour conséquence de tirer les prix vers le bas, les agences profiteront des nouveaux outils numériques pour enrichir encore leur offre. Les nouvelles technologies permettent de réduire les coûts, d’optimiser la phase organisationnelle, de faciliter la mesure de la satisfaction client ou encore de renforcer la dimension expérientielle via des bornes interactives, des casques de réalité virtuelle ou des hologrammes.

 

 

ENCADRE : Un outil pour mesurer le ROI des événements 

Comment mesurer l'impact d’un événement pour une marque ? C’est le défi que s’est lancé l'association Lévénement avec Nielsen. Leur solution : l’Event Impact Score. Cet outil permettra de mesurer les bénéfices d’une marque liés à un événement grâce à l'analyse de trois leviers. Le premier porte sur l’impact pour les personnes exposées à l'événement : notoriété et satisfaction de l’événement, association de la marque à celui-ci et intention d’achat. Le deuxième se concentre sur la résonance digitale et le succès d’une marque sur les réseaux par rapport à la totalité de la popularité de l’événement. Le troisième calcule la valorisation financière de la marque dans la presse ou sur les réseaux sociaux. Cet outil va permettre aux entreprises de mesurer réellement le retour sur investissement. Grâce à l'analyse de ces trois dimensions, elles pourront savoir dans quels domaines elles doivent s’améliorer. Enfin, en mesurant la valeur des événements, elles pourront plus facilement budgéter les investissements événementiels et «ne plus raisonner en coût, mais en bénéfices» selon les mots de Bertrand Biard, président de Lévénement.





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