«Venez vibrer! 5€ la place pour toutes les femmes». A l'image du slogan, très élégant, le visuel qui l'accompagne, un canard-sex toy rouge, sur la campagne publicitaire en ligne du club de foot du Stade rennais, lancée à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, n'a pas manqué de faire polémique. Pourtant, à en croire la première étude réalisée pour le Laboratoire de lutte contre les stéréotypes, les Français ne semblent pas très affûtés face aux clichés sexistes véhiculés dans la publicité, de la femme en train de faire la cuisine ou du shopping, sans oublier la nudité gratuite.
«Nous avons cherché une méthode pour mesurer comment les gens décèlent les stéréotypes sexistes dans les publicités», explique Frédérique Agnès, présidente de Mediaprism, qui a réalisé cette étude. Pour cela, l'institut de sondage a soumis cinq visuels publicitaires à une base de sondés sur Internet (1 036 répondants en tout, enquête réalisée en ligne du 22 au 28 janvier 2013, méthode des quotas), en leur demandant d'abord «tous les mots ou idées» qui leur venaient à l'esprit, puis «si quelque chose dans le visuel» les interpellait.
Dans un troisième temps, la question était explicite: «Diriez-vous que cette campagne véhicule ou combat des stéréotypes sexistes, ou ni l'un ni l'autre?» Résultat: seuls 12% des sondés ont répondu d'emblée qu'ils y identifiaient un stéréotype sexiste, puis 20% dans un deuxième temps. Lorsque Mediaprism leur demandait s'ils voyaient une allusion sexiste, seuls 37% l'ont repérée.
Paradoxe: si les Français identifient les publicités sexistes, leur regard n'est donc pas devenu forcément plus aiguisé. «D'après nos travaux observatoires, les publicités peuvent comporter des stéréotypes clairs, que le grand public va rejeter, ou plusieurs stéréotypes “gentils”, plus insidieux, plus difficilement perceptibles, dans une publicité artistiquement réussie. Mais on sent dans la France de 2013 que le sexisme ne fait plus vendre», souligne Frédérique Agnès.
De fait, les Français réprouvent clairement les stéréotypes sexistes. A la question «Vous arrive-t-il de constater que certains magazines, journaux/certaines campagnes de communication, véhiculent des stéréotypes sexistes», 32% répondent «souvent», et 35% «de temps en temps». Et 57% estiment être davantage sensibilisés qu'auparavant.
Des consommateurs éduqués après les excès des publicités porno-chic dans les années 1990, et les prises de position médiatisées des Chiennes de Garde et de La Meute, parfois suivis de retrait de publicités. Même «l'ARPP [Autorité de régulation de publicité] a tendance à exiger davantage des retraits de publicités excessives», souligne Frédérique Agnès. Le Laboratoire de l'égalité, qui a diffusé les résultats de son étude aux parlementaires, publiera de manière régulière de nouvelles études sur les stéréotypes sexistes.