La crise? Andrés Rodriguez n'y pensait pas lorsqu'il a convaincu, en 2007, la mythique maison américaine Hearst de lui laisser développer la franchise du magazine masculin Esquire en Espagne. Ce n'est qu'un an plus tard que le pays a subi son double choc immobilier et financier, entraînant un taux de chômage de 19%. Mais Spain Media Magazines a survécu à ce timing. Mieux, la petite maison d'édition basée à Madrid (qui emploie une vingtaine de personnes) a même lancé deux nouveaux titres de luxe en pleine tourmente.
«Nous avons pu nous adapter grâce à notre petite structure», explique Andrés Rodriguez qui, durant quinze ans dans le giron de Prisa, avait auparavant importé en Espagne le célèbre Rolling Stone américain. Une expérience qui l'a aidé à convaincre Hearst lorsqu'il est parti en solitaire en 2007 pour monter Spain Media Magazines, avec en tête l'idée «que l'on peut faire des magazine avec une touche artisanale». Explication: «Les idées sont bien plus importantes que la machinerie lorsque l'on travaille sur des niches comme le style de vie.» L'homme compte sur un réseau important de collaborateurs réguliers qui «n'ont pas besoin d'être assis dans la rédaction pour trouver de bonnes idées».
Fin 2008, c'est la licence de Robb Report (Curt Co Media), «pour les consommateurs ultra nantis» qui débarque en kiosques en Espagne. Suit en février dernier Harper's Bazaar (Hearst), le vétéran de la mode, alors que le royaume s'enlise dans la récession. Le marché publicitaire souffre en Espagne comme ailleurs (les revenus des magazines ont chuté de 35% en 2009) mais Spain Media Magazines a limité la baisse à 9% l'an dernier. Le prix de la quatrième de couverture oscille autour de 20000 euros pour Esquire et Harper's Bazaar, et la rédaction travaille de pair avec les commerciaux car les annonceurs «sont des sources de contenus potentielles».
Mais le secteur du luxe, déjà sinistré, se fait de plus en plus exigu: Vanity Fair et V Magazine sont aussi arrivés en kiosques avec la crise. Esquire, avec 33173 exemplaires mensuels en 2008, reste derrière son concurrent plus établi GQ (35574 exemplaires).