Le jeu des chaises musicales, voilà le sport préféré de Sylvie Lagourgue. A chaque départ à la retraite, pas question de se contenter de recruter un remplaçant. Elle remet à plat l’organisation de son département. Quitte à donner le tournis à ses collaborateurs.
Le cauchemar de cette manager de 58 ans qui, à la direction de la communication et du marketing de la GMF, encadre soixante personnes ? L’immobilisme. Un peu à contre-courant dans une grande maison de 6 000 salariés comme l'ex-Garantie mutuelle des fonctionnaires, où l’on fait souvent toute sa carrière. Le mouvement perpétuel est dans l’ADN de cette insulaire, originaire de la Réunion, qui a grandi avec le va et vient des marées.
Dans son grand bureau, à un saut de puce du parc Monceau, à Paris, seul un yucca rappelle la forêt vierge de son île. Son exil doré, elle l’a choisi à 20 ans pour faire Sciences Po Paris. Après dix ans à l'institut de gestion et d'économie rurale, elle se pose à la GMF il y a vingt-cinq ans où elle a dû parfois ferrailler pour s’imposer.
«J’ai eu des échanges houleux avec un ex-dirigeant qui n’arrivait pas à comprendre qu’une femme puisse faire autre chose que de servir le café. Impensable pour lui que je pilote le marketing ! On a fini par trouver un modus vivendi.»
Fan de rugby, Sylvie Lagourgue est plutôt à l’aise dans la mêlée. « Elle n’hésite pas à batailler quand l’un d’entre nous est mis en difficulté par un autre département », confirme Valérie Lamblin, l’une de ses collaboratrices.
Le style de management de cette femme au caractère trempé: participatif mais exigeant. «Je suis assez autoritaire, je donne la direction et le sens de l’action», reconnaît-elle. Une fois qu’elle accorde sa confiance, elle n’hésite pas à déléguer, mais pas sans bornes. «Mes collaborateurs savent jusqu’où ils peuvent aller sans m’en parler.»
De toute façon, madame la directrice se débrouille pour être au courant de tout. Un mode de fonctionnement indispensable pour faire travailler en synergies équipes commerciales et marketing.
«Sylvie peut être parfois cassante si elle est agacée par un manque de professionnalisme, mais elle ne se le permettra qu’en tête à tête», note Jean-Pierre David, directeur régional de l’assureur. Sa hantise ? Avoir un métro de retard sur les tendances. «On a décidé de changer notre précédente campagne de pub au printemps 2009, raconte-t-elle. Avec le recul, je me rends compte qu’on a attendu six mois de trop.»
Et puis si le livre préféré de Sylvie Lagourgue est la Foire aux vanités, de Thackeray, une critique mordante de la bonne société anglaise ce n’est pas vraiment un hasard. Elle déteste les courbettes, les faux semblants, la flagornerie. Pas question pour autant d'être transparente avec ses subordonnés. Cette manager laisse rarement paraître ses sentiments. Sa barrière de corail à elle.
Encadré
Son parcours en bref
1970-1973. Sciences Po Paris.
1976-1986. Responsable des études économiques de l'institut de gestion et d'économie rurale.
1986-1992. Responsable des études marketing à la GMF, puis chargée de mission.
Depuis 1993. Directeur du marketing et de la communication