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49% des Français pensent que le débat tourne autour de l’islam

«J'ai beaucoup apprécié l'ironie et le panache du geste de Vincent Peillon. Il n'a pas seulement refusé un débat, il a délibérément choisi de perturber l'ordre médiatique. Et c'est ceci qui m'intéresse.» Ainsi commence le billet de Raphaël Anglade, sur le blog Bêta Politique, qui reproche vertement à France Télévisions d'avoir organisé le débat entre Eric Besson et Marine Le Pen, le 14 janvier, autour de l'identité nationale.

«La télévision se pose en espace neutre, prolongement du débat public, alors qu'elle produit du spectacle», argumente-t-il. Et c'est ce spectacle qui fait encore débat une semaine après la non-participation du député européen du Parti socialiste à l'émission A vous de juger, d'Arlette Chabot, sur France 2.

«Un combat, plus qu'un débat, estime Dominique Pradalié, secrétaire générale du Syndicat national des journalistes. Cela rappelle la funeste histoire des gants de boxe que Paul Amar avait sortis devant Bernard Tapie et Jean-Marie Le Pen. Le principe même d'organiser un match de catch que l'on conçoit comme un beau spectacle, avec toutes les manipulations possibles, est détestable. C'est un tapis rouge à deux débatteurs pas si éloignés.» Pour autant, celle qui est aussi salariée de France 2 ne va pas jusqu'à demander, comme Vincent Peillon, la démission de sa directrice de l'information. «C'est très choquant et inacceptable, assène-t-elle. Cela a d'ailleurs eu pour effet inverse de conforter Arlette Chabot.»

Quant au député PS, qui a voulu marquer les esprits en faisant de la programmation de sa parole socialiste en fin d'émission un objet de scandale, il apparaît selon elle «complètement décrédibilisé». Et c'est la façon de faire qui est mise en cause : «S'il a un problème, qu'il vienne le dire. Tout est détestable dans cette histoire. Cela fait passer à la trappe un débat légitime et ce n'est pas en piégeant tout le monde qu'on le fait avancer.»

Denis Muzet, président de Médiascopie, qui ausculte la parole politique, précise que les Français ne sont pas opposés à un débat sur l'identité nationale. Mais pas maintenant et pas sous la férule du ministre de l'Immigration (lire ci-dessous).

Les sondages rendent compte de cette ambiguïté. Le 29 octobre dernier, une enquête BVA pour Canal+ témoigne que, pour 64% des Français, l'objectif du gouvernement correspond «avant tout» à une «volonté de mobiliser les électeurs de droite en vue des élections régionales».

Pour autant, le 1er novembre, dans un sondage CSA-Le Parisien, 60% des personnes interrogées pensent que «c'est une bonne chose» que l'identité nationale devienne un thème de débat dans la société française. Enfin, le 10 janvier 2010, une étude TNS Sofres synthétise : si le débat sur l'identité nationale n'est pas jugé scandaleux par 59% des Français, 46% estiment qu'il s'est écarté de ses objectifs initiaux et 49% perçoivent qu'il tourne autour de la question de l'islam.

 

Parole d'expert

Denis Muzet, sociologue, président de l'institut Médiascopie

«Dans nos enquêtes, les Français nous disent qu'un débat sur l'identité nationale est fondamental, mais pas avant les élections régionales car il y a un risque d'instrumentalisation dont nul ne sortirait gagnant. C'est pourquoi l'idée d'organiser un débat entre M. Besson et Mme Le Pen s'apparente plus aux “jeux du cirque”. Pour qui l'a vu, ce débat n'a pas fait avancer la réflexion. Par contre, du point de vue du spectacle, quelle réussite ! Marine Le Pen s'échauffait telle une catcheuse dans les coulisses. Eric Besson a réussi à la dominer grâce à sa parole, une arme blanche contondante. Lui aussi est une bête médiatique. Dans le bestiaire des hommes politiques, avec le parfum de souffre et de scandale qu'il dégage, l'ambivalent M. Besson est en train de prendre une place de choix.»

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