Contexte d’opinion compliqué et marqué par de fortes oppositions. Sujet de société passionnant, mais arbitrage difficile entre responsabilité collective et liberté individuelle. Produit pas encore tout à fait disponible. Nécessité de parler à tous et à des cibles spécifiques. Besoin de trouver des relais prescripteurs crédibles. Stratégies Multi Canal. KPI précis et vérifiables immédiatement. Pré-requis : Efficacité /Créativité. Pas de contrainte budgétaire. Brief urgent. Réponse attendue dans 15 jours.
Cela fait plusieurs mois que les beaux briefs se sont fait rares, des semaines que dans les agences/cabinets l’inquiétude liée à la crise, l’incertitude liée au calendrier de la fin de l’épidémie plombe l’ambiance, pèse sur les recrutements, les investissements, les rémunérations. Et voici que face aux citoyens, mais aussi face à l’ensemble du secteur de la communication, se dresse le rendez-vous du vaccin. Comment convaincre et déclencher le passage à l’acte ? Comment trouver le ton juste ? Comment lever les réticences ? Comment mobiliser la société ? Chacun peut avoir son opinion sur le sujet, mais personne ne peut contester que communiquer sur la vaccination Covid est sans doute un des plus grands défis auquel notre métier a été confronté ces dernières années.
D’abord à cause de l’enjeu. Ce n’est pas la première fois bien sûr qu’il s’agit de faire campagne sur des grandes causes. Le combat pour la sécurité routière en a été emblématique. Mais après ces mois sombres, après cette chape de plomb qui s’est installée sur notre quotidien, c’est la perspective du vaccin qui apparait aujourd’hui comme la seule promesse permettant de sauver des vies, de désengorger les hôpitaux, de revenir à la vie normale, de faire redémarrer l’économie. Pour ceux qui reprochent encore à nos métiers d’être accessoires, futiles, réussir la campagne anti-Covid c’est affirmer que notre métier peut, lui aussi, être essentiel.
Ensuite à cause du contexte. Si la méfiance à l’égard des vaccins n’est pas nouvelle, elle est particulièrement forte en France. Et avant même sa disponibilité, le vaccin Covid concentre la défiance. 40% des Français seulement iraient se faire vacciner, 46 % ne le feraient pas. Près d’un Français sur deux, cela dépasse on le voit la « sphère complotiste ». Certes, les chiffres peuvent évoluer quand le vaccin sera là. Deux craintes se détachent: « l’absence de recul sur la maladie et sur le vaccin » et la « crainte des effets secondaires ». Les campagnes vont devoir répondre pied à pied, faire la preuve de l’efficacité du vaccin, lever les à priori, raconter les coulisses de l’incroyable mobilisation mondiale de la communauté scientifique, tout en assumant en transparence que l’on ne sait pas tout du virus. Communiquer sur le vaccin, c’est installer un autre récit que celui de « Hold-up », celui de l’espoir et du progrès.
Les canaux classiques ne suffiront pas
La question des cibles complique aussi l’exercice. Il s’agit bien sur de parler à tout le monde, donc à ceux qui ont déjà une opinion bien ancrée notamment dans les électorats les plus « anti-système ». Mais les études montrent aussi que deux catégories spécifiques, les jeunes actifs (25-34 ans) et les femmes sont aujourd’hui les plus à distance de l’intention vaccinale. Réussir à parler du vaccin, c’est montrer que la communication peut avoir de l’impact pour faire bouger rapidement les représentations et les comportements.
Enfin dans une crise qui a vu la défiance à l’égard de la parole publique atteindre son paroxysme, les canaux classiques ne suffiront pas, ceux qui ont géré la crise ne seront pas les plus audibles. Trouver de nouvelles voix, de nouveaux visages sera indispensable. Faire des médecins des ambassadeurs actifs sera aussi une clé du succès. Communiquer sur le vaccin, c’est démontrer l’expertise et la créativité de notre métier dans la globalité de ses savoir-faire.
Le défi est immense. Pas seulement pour ceux qui seront choisis pour piloter la communication gouvernementale. Mais pour tous ceux qui comptent parmi leurs clients des acteurs de santé qui voudront impliquer les professionnels et des patients, des entreprises vis-à-vis de leurs salariés, des collectivités locales vis-à-vis de leurs administrés. Pour réussir à mobiliser la société, c’est tout le secteur qui peut faire de la stratégie vaccinale, le grand combat de la communication en 2021.
Au-delà d’avoir contribué à une mission d’intérêt général, l’enjeu est colossal : Et si les campagnes permettaient de réussir la campagne de vaccination? Si la communication réussissait à sa place à faire reculer le virus ? Si elle réussissait à ramener de la rationalité, à renouer la confiance ? Elle aurait alors, face aux critiques et aux remises en cause, fait la preuve de son rôle, de sa valeur et de son efficacité. Pour rebondir en sortie de crise, avoir contribué à l’éradiquer, ne serait-ce pas la meilleure preuve de son utilité ?