Pour que les digues se fissurent, puis cèdent, il faut qu’il y ait des vagues. De grosses vagues. Mais une déferlante ne suffit pas toujours. Il y a un an et demi, dans le sillage du mouvement MeToo, les témoignages sur les cas de sexisme et de harcèlement en agence avaient commencé à affluer. Stratégies en avait alors fait sa « une », titrée « #Balancetonporc, le changement, c’est maintenant ? ». Seize mois après, la réponse est manifestement non. Le 4 mars paraissait dans Le Monde une enquête, dénonçant, « dans le milieu de la pub, le règne du sexisme », et mettant notamment en cause l’agence Herezie et son directeur de la création Baptiste Clinet, ainsi que d’autres « grosses agences parisiennes ». Et les témoignages ont recommencé à affluer. Nombreux. Nourris. Peut-être encore plus précis qu’au moment de MeToo. Comme la deuxième phase de libération d’une parole trop longtemps contenue, dans le sillage de la Ligue du LOL ? Les mots racontent, eux aussi, cette dictature de la « coolitude » qui permet tout, de la « Bro Culture », entre-soi masculin toxique et systémique qui permet de tout s’autoriser, de la blague déplacée à la main aux fesses. Comme dans les BD de Lauzier, qui épinglait, dans les années 1980, les travers de ces publicitaires beauf, machistes, ivres d’eux-mêmes. Ceux-là même à qui l’on doit les campagnes sexistes qui ponctuent encore trop souvent les rues, les spots, les pages des magazines. Cette deuxième vague sera-t-elle assez forte, pour faire sauter les digues, et entraîner le changement ? Cette vague-là, en tout cas, on espère que c’est la bonne.