C’est à croire qu’on aime ça : lutter contre le réchauffement climatique à reculons, les yeux bandés et les mains dans les poches. Le décret sur la neutralité carbone en est le parfait exemple : un symbole de détricotage législatif minutieux. Les scientifiques rabâchent depuis plusieurs années que les concepts de « neutralité carbone » et de « compensation » pour un individu, une entreprise ou un produit n’a aucun sens. Qu’il ne prend pas en compte les externalités délocalisées, les impacts irréversibles, que ce n’est qu’un concept théorique qui ne s’évalue qu’à l’échelle globale. C’était le sens de la loi discutée en 2021, qui prévoyait d’interdire les revendications abusives de « neutralité carbone » dans les communications. Mais à l’été 2021, premier retour en arrière : le texte final tempérait le propos en autorisant ces allégations contre des « preuves » des compensations. Déçus de changer de paradigme, bon nombres d’experts ont tout de même attendu le décret de la loi, et le détail des « preuves » avant de crier au loup. Mais la semaine dernière, le couperet est tombé : on se moque de nous. Liste imprécise, fumeuse... Une partie des preuves n’est même pas obligatoire ! Désormais, on pourrait selon la loi trouver « des barils de pétrole neutres », note l’association Carbone4. Réjouissons nous, en théorie, on peut tous se repeindre en vert ego et se revendiquer « neutre ». Le neutre : en sciences, l’autre nom du nul.