Quatre bateaux aux couleurs de quatre associations œuvrant pour l’inclusion sont au départ de la Transat Jacques Vabre. C’est le signal que le sport professionnel de haut niveau a un rôle à jouer pour défendre une société plus inclusive.
Imaginez un monde où les finales des plus grandes compétitions sportives afficheraient sur grand écran, tout autour du terrain, dans les spots publicitaires de grande écoute, le nom d'associations et organisations qui se battent chaque jour pour combattre l'exclusion sous toutes ses formes ? Imaginez que le nom de ces associations soit floqué sur le maillot de Kylian Mbappé, Antoine Dupont ou sur le kimono de Teddy Riner ? Impossible ? Pourtant, un sport qui attire des millions de téléspectateurs et de visiteurs a entamé cette petite révolution depuis quelques temps : celui de la course au large.
Aux côtés des habituelles marques, apparaissent des bateaux aux couleurs de l'intérêt commun, hissées haut sur les voiles et peintes sur les coques de ces Formule 1 des mers. Il en est ainsi de la Transat Jacques Vabre 2023, qui devait initialement s’élancer du Havre le 29 octobre à destination de la Martinique, mais qui a pris un peu de retard en raison de la météo.
Nos quatre associations — Lazare, Entourage, Duo for a Job, Label Emmaüs — sont au départ de cette course mythique, en partageant une même vision : celle d’une société du lien, qui donne une place à chacun quel que soit son niveau de vulnérabilité ou de précarité. Les skippers, compétiteurs de haut niveau, ont convaincu leurs sponsors de faire don de leur visibilité afin de valoriser le combat d’une association. C’est le signal que le sport professionnel peut et doit contribuer à défendre le bien commun.
Un moment crucial pour la solidarité
L’actualité récente a montré la détresse des associations face à l’augmentation sans précédent de la précarité ces dernières années. Le nombre d'enfants à la rue est en hausse de 20% par rapport à l'année précédente selon l'Unicef. Les Restos du cœur enregistrent une hausse très importante des demandes d’aide alimentaire en 2023. Un chômeur sur trois en France a moins de 30 ans. Les jeunes, et plus particulièrement les jeunes d’origine étrangère, savent qu’ils passeront par le chômage et la précarité avant de pouvoir s’intégrer dans la vie professionnelle.
Pour eux, cette entrée dans le monde du travail a des répercussions qui vont au-delà de la question des niveaux de vie : difficultés pour trouver un logement, s’établir en couple, pour construire un projet de vie. Selon une étude de l'Insee, 9 millions de personnes étaient en situation de privation matérielle et sociale en 2022, un niveau jamais atteint jusqu'à présent. Ce triste record pourrait être battu en 2023.
Vers une visibilité médiatique engagée
Face à cette urgence, la collecte de fonds est évidemment cruciale, mais la visibilité l’est tout autant. La communication est un levier important pour réunir les fonds nécessaires à l’action des associations, mais elle offre aussi la possibilité d’alerter, faire évoluer le cadre réglementaire, changer les imaginaires, s’attaquer aux causes de la misère et pas seulement remédier à l’urgence.
La responsabilité de tous les acteurs impliqués dans la fabrication et la diffusion de l’information est immense, qu’ils soient un média, un diffuseur, une agence de communication, une école de journalisme, un influenceur ou une célébrité. Ils ont tous le pouvoir de mettre plus en lumière la défense du bien commun et d'œuvrer pour un autre récit collectif, pour créer un autre imaginaire et changer les regards sur la précarité. Raconter les histoires de vie qui donnent de l’espoir plutôt que le fait divers qui alimente les tensions sociales. Raconter les projets solidaires qui fonctionnent plutôt que l’urgence qui angoisse. Raconter toutes les histoires humaines extraordinaires de personnes ordinaires. Ceux pour qui une main tendue a tout changé. Notre société a tout à gagner à plus d’entraide et de solidarité.
Le sport offre une opportunité unique de sensibiliser des millions de personnes, ainsi que les décideurs politiques et économiques aux grands enjeux sociaux et environnementaux de notre époque. Alors que se profilent les Jeux olympiques de Paris 2024, il faut aller plus loin encore et inciter les sportifs à rendre visible une cause aux côtés de leurs sponsors. Le Comité olympique se veut exemplaire en matière de RSE : il peut inciter les partenaires à agir aux côtés des sportifs. Les voiles de nos bateaux en sont la preuve vibrante.