Adieu Bolloré, bonjour Arnault. Contre une vente à 120 millions d’euros, Paris Match est officiellement passé le mardi 1er octobre des mains du milliardaire Vincent Bolloré à celles du milliardaire Bernard Arnault.

Le géant du luxe LVMH, dirigé par Bernard Arnault, et le groupe Lagardère, avalé fin 2023 par Vivendi, le groupe de Vincent Bolloré, ont finalisé la vente de l’hebdomadaire, annoncée à la surprise générale en février. « Je suis très heureux de voir cet illustre magazine qui vient de fêter ses 75 ans rejoindre la famille LVMH », s’est ainsi réjoui Bernard Arnault, qui le convoitait de longue date, remerciant « chaleureusement Vincent Bolloré et Arnaud Lagardère » (PDG du groupe du même nom). « Je tiens à remercier Bernard Arnault et sa famille, en particulier Antoine Arnault », son fils à la manœuvre sur ce dossier, a également déclaré Arnaud Lagardère. « Avec l’appui de la famille Bolloré, dont nous partageons la culture et les valeurs, nous nous projetons dans l’avenir avec force et ambition », a-t-il ajouté.

En avril, Arnaud Lagardère avait qualifié de « crève-coeur » la cession du magazine, qui participe à la stratégie de désendettement du groupe. Titre emblématique du photojournalisme mêlant grands reportages de guerre et immersion dans l’intimité des stars et des politiques, Paris Match s’écoule toujours à plus de 440 000 exemplaires chaque semaine. En intégrant LVMH, il devient une marque à part entière, indépendante du groupe de presse Les Echos-Le Parisien, également détenu par le géant du luxe.

Cette nouvelle société d’une centaine de personnes, dont plus de 70 à la rédaction, sera présidée par Jean-Jacques Guiony, directeur financier du groupe LVMH et membre du comité exécutif, qui conservera ses fonctions actuelles.

Recrutements

La rédaction reste quant à elle dirigée par Jérôme Béglé, son directeur général depuis 2023 qui devient également directeur de la publication du journal. Pierre-Emmanuel Ferrand, « jusqu’alors directeur général de Lagardère News (chargé) de la presse et du digital » est nommé directeur général de Paris Match. Son nouveau propriétaire entend « faire résonner avec une ambition renouvelée sa signature "le poids des mots, le choc des photos" ».

Cela passera notamment par une valorisation du fond de photos du titre et par des recrutements, selon une source proche du dossier, alors que de nombreux journalistes ont quitté le titre ces dernières années, sur fond d’ingérences prêtées à Vincent Bolloré.

Il s’agira aussi de « doubler à brève échéance » les 25 000 abonnements numériques du titre et de renforcer sa présence sur Instagram ou TikTok, a expliqué mardi 1er octobre au Figaro Jérôme Béglé, promettant également plus de géopolitique et de faits divers dans les sujets couverts.

« Une libération »

La rédaction de Paris Match, située au siège parisien de Lagardère News comme celle du Journal du Dimanche (JDD) ou d’Europe 1, déménagera en 2025 dans de nouveaux locaux, tandis que sa régie et d’autres fonctions supports rejoindront ceux du groupe Les Echos-Le Parisien. Bientôt finie, donc, la « cantoche avec Pascal Praud », figure de CNews et d’Europe 1, ironise un journaliste de Paris Match qui a souhaité rester anonyme.

Selon lui, « c’est plutôt une libération pour la rédaction » de quitter la sphère des médias Bolloré, associés à l’extrême droite aux yeux de la gauche. Et de citer la multiplication ces « trois-quatre derniers mois » de Unes consacrées à la religion catholique chère au milliardaire. « La mise en avant de sujets religieux n’a jamais été une tendance récente », a assuré Jérôme Béglé au Figaro.

Paroxysme des secousses traversées par le magazine, sa société des journalistes (SDJ), garante du respect des règles déontologiques, s’est sabordée en début d’année. À l’été 2022, elle s’était indignée d’une Une consacrée au cardinal ultra-conservateur Robert Sarah, puis du licenciement du rédacteur en chef politique et économie de Paris Match Bruno Jeudy, remplacé par la figure de CNews Laurence Ferrari. Cette dernière préside désormais les marques JDD et JDNews, nouvel hebdomadaire d’actualité lancé en septembre.

Moins redouté que Vincent Bolloré, Bernard Arnault fait aussi l’objet de critiques concernant son rapport à l’indépendance des rédactions. Le premier Paris Match de l’ère LVMH sortira le 10 octobre. Et la dernière de l’ère Bolloré est dédiée à l'ancien député Philippe de Villiers, devenu chroniqueur régulier du JDNews.

 

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