L'ancien journaliste de France 2 revient avec un média 100% vidéo sur les réseaux sociaux, Liik, pour rassembler «la jeunesse connectée» originaire des deux rives.
Après plus de 30 ans passés à France Télévisions ou encore un passage dans le groupe Canal + et au Conseil supérieur de l’audiovisuel (prédécesseur de l’Arcom), l’ancien présentateur du JT de France 2 « a compris il y a quelques années qu’il fallait se tourner vers le digital » et « s’adapter à la consommation des jeunes publics », assure-t-il à l’AFP. Rachid Arhab, 68 ans, a longtemps porté le rêve de créer « un Arte franco-algérien » pour réconcilier ses deux pays par le biais de l’échange culturel, à l’image de ce qu’ont réalisé la France et l’Allemagne. Liik se veut l’héritier de cette ambition, en célébrant « la pop culture méditerranéenne » et ses créateurs.
Car du rap, locomotive de la production musicale tricolore, aux nouvelles têtes d’affiche du cinéma ou de l’humour, ce sont très souvent « des jeunes ayant un lien avec la Méditerranée » qui portent le secteur de la culture et du divertissement en France, selon le journaliste. « Tous ces signaux nous montrent que la domination de la culture anglo-saxonne est en train de reculer en France » au profit « d’une culture méditerranéenne qui rayonne dans le monde » grâce à « des créateurs à l’aise » avec leur double culture, ajoute-t-il, en citant DJ Snake et le carton de son titre « Disco Maghreb », qui a dépassé les 150 millions de vues sur YouTube.
Ni « média communautaire » ni « média d’information », Liik se pose comme un média « d’apaisement » autour de « ce qui nous ressemble et nous rassemble », souligne M. Arhab. Un positionnement « loin d’être inutile » dans le contexte médiatique français, où les débats identitaires occupent une très grande place sur les chaînes d’information en continu.
Xavier Niel dans la levée de fonds
Et ça marche ? Depuis son lancement en septembre, Liik revendique plus de 10 millions de vues cumulées sur les réseaux sociaux, aussi bien en France, en Algérie, au Maroc ou en Tunisie. Sur Facebook, Instagram, YouTube ou TikTok, Liik produit chaque jour des vidéos courtes, avec pour tête d’affiche Azzeddine Ahmed-Chaouch, ex-chroniqueur de l’émission Quotidien sur TMC, ou encore Rachid Arhab lui-même autour d’une pastille appelée « La Ref ». « Je ne fais pas un média pour me montrer », tient-il à préciser au sujet de cette aventure entrepreneuriale lancée pendant le confinement avec Pascal Josèphe (ex-directeur des antennes de plusieurs chaînes, disparu fin 2022) et qu’il mène aujourd’hui en association avec un autre dirigeant de média, Guillaume Pfister.
Après une première levée de fonds de 270 000 euros en mai auprès d’investisseurs comme Xavier Niel (propriétaire d’Iliad), « une seconde levée de fonds plus importante est en cours », continue Rachid Arhab, sans donner de détails sur le montant espéré. « Notre objectif est d’obtenir 200 millions de vues d’ici fin 2024 », dit-il, avec l’ambition de « tripler » l’équipe basée à Paris, aujourd’hui composée de sept personnes, sans compter le réseau de correspondants étrangers dans les pays du pourtour méditerranéen.
« Que l’économie pense qu’il y a de la place pour ce genre de média, c’est le premier signe qui m’a vraiment rassuré. Quand des investisseurs mettent de l’argent, c’est qu’ils se disent qu’il y a une viabilité, voire une rentabilité à venir », explique-t-il. Car la concurrence sur ce créneau est très forte, avec des marques établies comme Brut, Konbini, Loopsider ou encore les derniers venus Neo ou Réel média (lancé par le journaliste Bernard de la Villardière). « Chacun a sa spécificité. Nous essayons de trouver notre niche […] Ma conviction, c’est que, dans trois ans, on dira de Liik ce qu’on dit aujourd’hui de Konbini, à savoir un média qui s’est installé et a trouvé sa raison d’être », espère-t-il.