Le groupe de Mark Zuckerberg est de nouveau appelé à revoir ses règles sur la nudité, en particulier celle qui interdit aux femmes de montrer leurs seins nus, et nuit à la capacité des femmes et personnes transgenres ou non-binaires à s’exprimer.
La question revient toujours, comme un boomerang. « Nous demandons à Meta de se pencher sur cette question. Nous disons qu’il devrait y avoir plus d’égalité », a déclaré jeudi Helle Thorning-Schmidt, ancienne Première ministre du Danemark et membre du conseil de surveillance de Meta, lors d’une conférence en ligne sur Instagram. « Il est intéressant de remarquer que les seuls mamelons non sexualisés sont ceux des hommes ou ceux qui ont subi une opération », a-t-elle ajouté.
La « cour suprême » du géant des réseaux sociaux a récemment jugé que Meta n’aurait pas dû retirer des photos publiées par un couple, montrant leurs poitrines, avec les mamelons couverts. La légende évoquait la santé des personnes transgenres et expliquait que l’une des deux personnes allait prochainement être opérée dans le cadre d’une chirurgie de réassignation sexuelle (ablation des seins). Le couple levait des fonds pour les aider à financer l’intervention. « Le retrait de ces images n’est pas conforme avec les valeurs de Meta ou ses responsabilités en termes de droits humains », a déclaré le conseil de surveillance mardi.
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« Le règlement de l’entreprise sur la nudité des adultes empêche plus fortement les femmes et les personnes transgenres et non binaires de s’exprimer sur ses plateformes », a ajouté le conseil. Ce dernier est composé de 20 membres internationaux, journalistes, avocats, défenseurs des droits humains et anciens dirigeants politiques. Il a été créé en 2020 sur proposition du patron Mark Zuckerberg et est chargé d’évaluer la politique de modération des contenus du groupe californien.
Les règles de Meta interdisent les images contenant des mamelons de femmes, sauf dans certains contextes de santé, comme l’allaitement ou les chirurgies de réassignation sexuelle. « Ce règlement est fondé sur une vision binaire des genres », note le conseil. « Cela implique que les modérateurs déterminent de façon rapide et subjective le sexe et le genre, ce qui n’est pas réaliste à grande échelle ». Il recommande donc à la direction de Meta de définir des critères « clairs, objectifs et respectueux des droits humains pour que les personnes soient traitées sans discrimination de sexe ou de genre, conformément aux standards internationaux en matière de droits humains ».
Instagram est régulièrement accusé de pudibonderie et de manque d’objectivité par ses utilisateurs. « Libérez ces beautés », a écrit jeudi la mannequin Helena Christensen en commentaire d’une vidéo parodique de l’humoriste Celeste Barber, qui secoue ses seins nus pixélisés. Lors de la conférence du conseil de surveillance sur Instagram jeudi, des utilisateurs ont demandé pourquoi Meta ne « libérerait » pas tout simplement « tous les mamelons ».
Règles confuses
Mais les membres de l’entité ne se prononcent pas sur cette question. « Cette affaire montre que les règles actuelles de Meta restreignant les images de mamelons prêtent à confusion et sont fondées sur une vision binaire du genre, et une distinction entre les corps masculins et féminins », a indiqué Julie Owono, membre du conseil et directrice de l’ONG Internet sans frontière. Meta a de son côté rappelé que les images contestées avaient déjà été rétablies, et que l’entreprise avait déjà reconnu qu’elles n’auraient pas dû être retirées. « Nous savons que nous pouvons faire plus pour soutenir la communauté LGBTQ + », a précisé un porte-parole du groupe.
Meta a prévu de répondre aux recommandations du conseil publiquement d’ici la mi-mars. En août 2021, Instagram avait présenté ses excuses après le bref retrait de publications partageant l’affiche du film de l’Espagnol Pedro Almodovar, « Madres Paralelas », qui montre un mamelon duquel pend une goutte de lait. Elles avaient été rétablies au nom du contexte artistique.
Et en octobre 2020 l’application avait revu une de ses règles sur les photos de seins, qui interdisait de les « compresser », sous peine que le cliché soit considéré comme pornographique, et donc retiré. Une mannequin de grande taille avait accusé Instagram de discrimination et la plateforme avait fini par autoriser les contenus dans lesquels une personne enlace ou tient simplement sa poitrine.