« Étique » et « érémitique ». Ces deux mots sont les premiers que Marcel Botton écrivit, enfant, dans les petits carnets où il consigne, encore aujourd’hui, les termes de la langue française qu’il ne connaît pas. Le premier désigne l’extrême maigreur, et le second désigne la vie d’ermite – ou Marcel Botton préfèrerait-il « anachorète ? ». Sans doute pas : aucune cuistrerie chez le fondateur de Nomen. « Je passe mon temps à démentir le fait que je suis linguiste, s’amuse l’enjoué Marcel Botton. À l’agence, j’emploie des gens beaucoup plus calés ! L’un d’entre eux maîtrise cinq alphabets, l’autre, une trentaine de langues… »
D'Alexandrie à Garches
Né en 1946 au Caire, de parents eux-mêmes nés en Égypte - père britannique, directeur financier et mère française, enseignante - le petit Marcel vit un temps à Alexandrie, avant, au gré des affectations professionnelles paternelles, de débarquer à Garches à l’âge de quatre ans. « Je ne parlais alors pas un mot de français, ce qui peut paraître étrange pour un créateur de noms… Sans doute mon attrait pour les mots vient-il de là, de cette acculturation. »
Après des études de sciences économiques et une brève expérience de plumitif dans la revue Butane Propane, Marcel Botton œuvre au sein de l’agence Synapse. Il commence à y créer des noms pour ses clients, et invente, avec son « cousin et meilleur ami », Roland Moreno [aujourd’hui décédé], le fameux inventeur de la carte à puces, un logiciel baptisé « Radoteur » : cette intelligence artificielle, fondée sur les chaînes de Markov, a tendance à beaucoup se répéter… « Nous avons commencé par lui faire créer des insultes : “Rapule”, “Petteque”, “Imbecord”… » rigole Marcel Botton. L’innovation fait son petit effet. « Stratégies est venu me voir à l’époque, et a publié deux pages sur le sujet ! ». Le marché se penche sur le Radoteur, les clients affluent, et en 1981, Nomen voit le jour.
Inventaire à la Prévert
Trente-sept ans après, l’agence fête sa 2000e création de nom. Vinci, Safran, les automobiles Clio, Yaris, Lupo, Natexis, Thalès, Chérie FM, Price Minister, Skyteam, les parfums Ultraviolet et Miracle… L’inventaire à la Prévert donne le tournis. Marcel Botton a néanmoins le triomphe modeste, et se partage entre les locaux de l’agence, rue du Faubourg Saint-Honoré, et son bureau, rue Tronchet. « Avoir un bureau à part, c’est éviter d’être submergé par le quotidien. Mais je suis joignable en permanence, on peut me demander de changer des cartouches d’imprimante ! ».
Aujourd’hui, Botton se dit « le plus heureux des hommes ». « Si je compare ma vie à celle de Macron ou à celle du pape, je préfère mille fois la mienne. Macron, je le vois passer de mes fenêtres à 7 heures moins le quart du matin, dans sa bagnole. Et quand on est pape, on n'a plus d’avancement et on ne peut plus s’amuser ! ». Définition du bonheur selon Marcel Botton : tout sauf l'érémitisme...
Parcours :
20 avril 1946. Naissance au Caire.
1950. Arrivée en France.
1975. Marcel Botton, alors employé au sein de l'agence Synapse, décide de se lancer dans la création de noms de marques.
1981. Création de Nomen.
2017. Nomen fête sa 2000e création de nom.