Si le marché des «ad exchanges» (plates-formes automatisées de vente d'espace publicitaire en ligne) est une réalité outre-Atlantique, il reste en phase de déploiement dans les pays européens. Aujourd'hui, les ad exchanges ne représentent que 4% du display. Dans Le Trading Media, livre blanc sur les places de marchés des espaces invendus, l'IAB France (Interactive Advertising Bureau) estime que leur poids sera de 15% dans cinq ans.
Un ratio encore trop timide, selon Luc Tran Thang, président du SRI (Syndicat des régies Internet), pour qui l'on peut prévoir à court terme des parts de 30% à 50%.
Au-delà des projections quantifiées, tous les observateurs s'accordent à considérer les ad exchanges comme le levier majeur de bouleversement des investissements médias digitaux. «Avec les ad exchanges, on passe d'un achat d'espace dans un média donné à un achat d'audience dans un environnement qualifié. C'est une petite révolution pour nos marchés», résume Luc Tran Thang.
L'ad exchange vient en effet bouleverser le modèle économique des investissements médias. Comment ça marche? Par l'optimisation sur une même place de marché de l'achat et de la vente d'inventaire publicitaire dans un environnement ouvert et en temps réel («Real Time Bidding» ou RTB).
Une fois inscrit sur la plate-forme, l'acheteur va fixer un prix d'achat maximum. De leur côté, sur la même plate-forme, des éditeurs – qui peuvent monétiser leur inventaire complet ou uniquement leurs invendus – vont fixer un prix plancher en deçà duquel ils ne vendront pas leurs espaces. Quant aux régies, elles peuvent à la fois vendre pour le compte de sites partenaires (en fixant un prix minimum) et acheter pour le compte de clients (en fixant un prix maximum). Et les enchères peuvent démarrer, en temps réel. L'emplacement n'est plus acheté pour lui-même… C'est l'équation espace/contacts qui voit sa valorisation fluctuer selon l'offre et la demande.
«Un vesteur de transparence»
La technologie ad exchange permet de conjuguer des cibles socio-économiques avec des données de segmentation clients ou prospects. On peut d'ores et déjà imaginer l'impact d'une explosion de ce marché: poids accru de la data comportementale d'un côté et des algorithmes de l'autre, effritement des frontières entre agences médias et régies publicitaires, transferts accéléré des compétences entre les unes et les autres.
Toutes les grandes régies et agences médias investissent dans ce nouveau «business model» publicitaire. «Les ad exchanges sont un vecteur de transparence dans la relation entre les régies et les annonceurs. L'idée est de proposer aux annonceurs de piloter par eux-mêmes la rentabilité de leurs campagnes publicitaires sur Internet», avance Erick-Marie Bion, directeur de Microsoft Advertising France. En septembre 2011, la régie a lancé sur le marché français son offre Exchange, déjà déployée aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas. Avec l'ambition de basculer l'ensemble de son catalogue. La solution met à disposition des inventaires premium des marques phares msn.fr et Windows Live, qui rassemblent chaque mois quelque 26,5 millions de visiteurs uniques.
A la fin de la même année, Hi Media lançait son ad exchange en partenariat avec App Nexus. Objectif: fournir un inventaire significatif disponible en RTB, en y associant les inventaires premium de ses sites de marques. La stratégie de différentiation de Hi Media consistant en effet à mettre à disposition et en compétition 100% de ses inventaires, y compris les formats ayant le plus d'impact, en France comme en Europe. «Nous avons mis en place une équipe paneuropéenne, qui nous permet de proposer des plans médias sur différents pays», explique Patrice Sguerzi, directeur marketing de Hi Media Advertising.
Les grands médias également s'intéressent de très près aux ad exchanges. Le 9 mars 2012, Amaury Médias, Figaro Medias, Lagardère Publicité et TF1 Publicité annonçaient le lancement prochain d'Ad Media Premium, une place de marché de commercialisation aux enchères et en temps réel d'audiences digitales 100% médias.