Les consommateurs attendent aujourd'hui autre chose des objets publicitaires. Pour qu'ils soient plus respectueux de l'environnement, les entreprises doivent en repenser l'utilité même.
Les stratégies marketing sont nombreuses et nécessaires pour créer l’adhésion et la fidélisation des consommateurs. L’une d’entre elles, bien connue des entreprises est l’objet publicitaire, aussi appelé goodie. S’il a rencontré un franc succès pendant des décennies par son fort impact sur les consommateurs, aujourd’hui, l’impact est autrement visible.
Avec la montée de la conscience écologique et des enjeux environnementaux, ils sont de plus en plus nombreux à voir d’un œil critique ces objets produits en masse, souvent dépourvus d’utilité, fabriqués dans de piètres conditions de travail et dans des matériaux médiocres, et dont la durée de vie est, souvent à dessein, limitée. Le goodie est-il contre productif pour l’image des marques et à bannir ? Peut-être pas, si l’on se pose les bonnes questions…
Le goodie au coeur d’un questionnement stratégique plus profond
Nous voilà donc à une croisée des chemins. D’un côté, les consommateurs sont plus sensibles à l’impact des objets sur l’environnement, à leur provenance et aux conditions de leur fabrication. De l’autre, les entreprises ont toujours besoin de se démarquer à leurs yeux.
Le goodie est rarement destiné au consommateur final, mais souvent à des professionnels intermédiaires censés préférer la marque parce qu’on leur aura remis un totebag à l’occasion d’un événement, rempli d’objets hétéroclites logotypés. Par réflexe, certains d’entre eux s’en réjouiront sur le coup. Mais la plupart commencent à se poser la question du «mais pourquoi faire ?». Si tout finit au mieux au fond d’un tiroir, au pire, à la poubelle en rentrant, quelle image en retire au final l’entreprise ?
Les critères du besoin et de la cohérence sont donc fondamentaux : a-t-on identifié le besoin de posséder ces objets ? Qu’est-ce que ce porte-clé va apporter en termes d’image de marque et de clarification sur les activités de l’entreprise ? Il est temps que l’entreprise s'interroge sur la façon dont elle veut être perçue par ses parties prenantes. Si le goodie est censé représenter l’entreprise, que dit-il d’elle ? A l’entreprise de valider que la perception sera cohérente avec la réalité et de placer le sujet du goodie dans cette réflexion.
Identifier un besoin et rester cohérent
Pour cela, la première étape doit être d'identifier un besoin et de rester en cohérence avec sa marque. Si ces pratiques vides de sens sont encore courantes, voire constituent une norme au sein de départements marketing, il est grand temps de repenser cette stratégie. Puisque le goodie ne doit plus être un gadget, il doit au contraire devenir un outil de pédagogie si l’on s’y prend suffisamment bien pour faire passer un message.
Cet objet peut aussi répondre à un besoin concret de la cible - intermédiaire ou consommateur - en lien direct avec l’identité de l’entreprise. Au risque d’être déconnectées de leurs parties prenantes, les entreprises doivent renouer le contact. Les outils permettent de se rapprocher des clients, comme on le voit avec les réseaux sociaux. Il est donc possible d’interroger directement la communauté pour cibler au mieux les attentes.
Activer les bons leviers
Deuxième étape, l'entreprise doit activer les bons leviers et lever les freins. Une marque doit se démarquer. Et si le cadeau est l’un des outils indispensables pour ce faire, quelles sont ses options ? L’une d’elle est le goodie éco-responsable. Bien accueilli, il peut servir et incarner concrètement l’engagement RSE de l’entreprise. Mais attention ici à ne pas tomber dans le greenwashing. L’utilité de l’objet va être considérée au même titre que l’on scrutera son impact : un porte-clé en plastique remplacé par un porte-clé en bambou reste un objet sans intérêt si son usage n’est pas attendu.
Pour passer au goodie plus responsable, les entreprises doivent attacher une attention particulière au cycle de vie du produit : les matières premières, la fabrication, le transport, en passant par l’utilisation jusqu’à sa fin de vie (élimination, recyclage voir même réutilisation), mais aussi son utilité réelle - un critère jusqu’alors ignoré.
S’il peut être facile, en interrogeant ses parties prenantes, de valider l’utilité d’un produit, l’obstacle principal pour passer à des goodies plus responsables sera celui du prix. Oui, un sourcing différent se répercutera sur le prix. Mais se posent alors d’autres questions, plus intrinsèquement liées aux valeurs de l’entreprise qui se veut sincère dans sa démarche : ne vaut-il pas mieux dans ce cas faire moins mais mieux ? Au lieu d’un tote bag qui déborde, un objet symbolique suffirait-il pour marquer les esprits ?
Les effets kiss cool des goodies plus responsables
Les questions environnementales s’imposent à tous et ne peuvent plus être une composante mise au second plan. Sans compter la démultiplication des collectifs de consommateurs de plus en plus aguerris à déceler les incohérences. Quel intérêt donc de ne pas faire sa part en termes de réduction d’impact, tout en risquant de tendre le bâton pour se faire battre auprès du grand public ? En trouvant des réponses à ces questions, l’entreprise gagnera en crédibilité vis-à-vis de ses parties prenantes, et même au-delà. Intégrer le département marketing à ces discussions parfois cantonnées aux départements développement durable fera progresser toute l’entreprise.
N’oublions pas le législateur. L’objet publicitaire est déjà soumis à un cadre réglementaire, mais il est encore très permissif. Des associations montent régulièrement au créneau, arguant qu’un objet publicitaire est destiné à devenir un déchet très rapidement. L’expérimentation de la Convention citoyenne pour le climat a montré que le sujet de la publicité était, à raison, sous le feu des critiques. Et la récente loi Agec, destinée à lutter contre le plastique à usage unique, a déjà contribué à changer les mentalités. Il est encore temps pour les entreprises de prendre de l’avance sur les réglementations.
Sans tomber dans le cliché du «c’était mieux avant», essayons de nous inspirer d’une époque où le sens et la valeur des objets n’étaient pas ternis par les approches mercantiles vides de sens. Jadis, la transmission de l’objet, de génération en génération, était empli de symbolique et d’utilité. Qu’est ce qu’un bel objet ? Comment y associer une marque ? En quittant la sphère étroite de la recherche d’attention ponctuelle du consommateur, la quête pour des goodies plus responsable peut peut-être amener l’entreprise vers une réflexion plus large sur son utilité.