Accor se renforce en Afrique

Plus de 45 marques et 5 700 hôtels dans plus de 110 pays, pour un chiffre d’affaires supérieur à 5 milliards d’euros l’an passé et près de 330 000 collaborateurs au total. Les chiffres parlent d’eux-mêmes et font du groupe Accor un poids lourd mondial de l’hôtellerie, qu’on ne présente plus. Pour autant, le groupe français est loin d’être rassasié. Dans sa quête de développement, Accor cible plusieurs zones géographiques pour renforcer son maillage territorial, dont le continent africain et plus précisément l’Afrique subsaharienne. C’est dans cette optique qu’après avoir notamment ouvert un établissement au Mali l’an passé, Accor vient d’ouvrir deux nouveaux hôtels à Abidjan, capitale de la Côte d’Ivoire.

Signaux positifs

Après l’inauguration récente de l’Adagio Original Abidjan Marcory, première incursion de la marque d’apart-hôtellerie Adagio en Afrique subsaharienne, le Novotel Abidjan Marcory est en passe d’ouvrir ses portes, marquant le début d’une série d’ouvertures significatives pour Accor dans le pays, où le groupe est également déjà présent via ses marques Sofitel, Ibis Styles, Pullman et Mövenpick. En jeu : « une région qui devient rapidement un carrefour pour le tourisme d’affaires et de loisirs », comme le rappelle en préambule Jérôme Rotrou, general manager aux manettes de l’ouverture des deux établissements, qui fait le point sur l’avancée de ces projets. « L’Adagio Original Abidjan Marcory, après un démarrage standard, affiche des signaux positifs ces dernières semaines d’autant plus que la période allant de mi-juillet jusqu’à mi-septembre reste traditionnellement calme avant le pic d’activité classique en octobre et novembre », développe-t-il quant à un établissement comptant 110 studios et appartements à destination d’une clientèle individuelle à la fois business et loisirs. « Pour les clients business, on compte essentiellement sur des moyens séjours de l’ordre de 5 à 6 nuitées tandis que la clientèle loisirs est plutôt composée d’Ivoiriens résidant à l’étranger qui retournent au pays pour voir leur famille et leurs proches », pointe Jérôme Rotrou. Côté Novotel, « on table également sur une clientèle business individuelle mais pas seulement », le site comptant - entre autres - sur les séminaires pour occuper les 200 chambres de cet établissement dernière génération affichant 10 suites et 19 chambres dites exécutives.

Priorité politique

Car si le potentiel des deux hôtels est avéré tout comme celui des établissements de milieu de gamme, il reste largement dépendant des événements tels que les forums et conventions. « Excepté un début d’année 2024 très fort en raison de la Coupe d’Afrique des nations, le marché reste encore assez tributaire de rendez-vous professionnels majeurs, à l’image de l’Africa CEO Forum », souligne-t-il. Surnommé le « Davos de l’Afrique », celui-ci réunit chaque année depuis 2012 des chefs d’entreprises, des investisseurs, des décideurs politiques et des journalistes de toutes nationalités. Pour la prochaine édition, programmée les 12 et 13 mai 2025, ce ne sont pas moins de 1 800 PDG, chefs d’État, ministres et leaders du monde des affaires qui sont attendus. De quoi doper le taux d’occupation. Mais penser que de tels événements sont vitaux serait réducteur. Car le développement du tourisme à Abidjan et plus largement dans le pays fait figure de priorité politique. « Si l’on note un tel attrait pour les investissements en Côte d’Ivoire, c’est en grande partie dû au contexte géopolitique », rappelle Jérôme Rotrou. « Outre la stabilité politique et sécuritaire qui génère la confiance des investisseurs, plusieurs projets phares liés aux infrastructures jouent un rôle bénéfique », ajoute-t-il. A commencer par le futur métro d’Abidjan. Avec un tracé de 37,4 km, 18 stations, 21 ponts ferroviaires et une fréquentation estimée à 540 000 passagers par jour, le métro d’Abidjan est un projet ambitieux dont la première rame est prévue pour 2025. En parallèle, les travaux de réhabilitation et d’extension de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan ont débuté en août dernier, sans oublier le projet consistant à construire un nouvel aéroport international à San-Pédro - pouvant accueillir tous types d’avions moyens et longs courriers - ainsi qu’une aérogare de passagers et une aérogare de fret. Autant d’éléments allant dans le sens d’une fréquentation accrue du pays par le public venu de l’étranger tout en répondant à la feuille de route étatique. « L’objectif affiché par l’Etat ivoirien est que le secteur de l’hôtellerie et du tourisme contribue à terme à hauteur de 10 % du PIB », précise Jérôme Rotrou, citant le cas de « Sublime Côte d’Ivoire », stratégie nationale de développement touristique dont l’ambition vise à faire de la Côte d’Ivoire l’une des cinq destinations principales d’Afrique.

Marché fragmenté

De quoi aiguiser l’appétit du groupe Accor alors que le marché hôtelier dans le pays reste encore largement fragmenté. « En-dehors des marques du groupe Accor, Radisson est la seule marque internationale réellement établie dans le pays », éclaire le manager, rappelant que l’essentiel du tissu est aujourd’hui préempté par les acteurs panafricains - Mangalis, Azalaï, Onomo… - mais aussi et surtout par les établissements indépendants. Des établissements qui pourraient d’ailleurs servir de relais de croissance au groupe Accor, dont la capacité à intégrer des franchisés constituera un enjeu majeur dans les années à venir. Un constat valable pas uniquement en Côte d’Ivoire, d’autres pays présentant un potentiel qui n’a pas échappé à Accor. « Avec la Côte d’Ivoire, le Sénégal tire la croissance économique de la zone. Et il se passe des choses au Ghana et au Bénin », contextualise Jérôme Rotrou, en écho à l’ouverture du Sofitel Cotonou Marina Hotel & Spa le 1er septembre dernier. Qu’on se le dise : Accor n’en est qu’au début de sa croissance en Afrique subsaharienne.