Le marketing effectiveness director de Pernod Ricard était l'un des dix invités de la conférence «Les directeurs marketing champions de l'IA», organisée dans le cadre du Stratégies Festival.

Depuis 2020, Pernod Ricard s’est lancé dans un plan de transformation digitale. Comment le groupe a-t-il évolué avec les technologies et notamment l’IA ?

Depuis quatre ans, nous travaillons sur la data et les outils d'intelligence artificielle, et notamment le machine learning, pour arriver à manipuler un nombre incroyable de données. C'était avant tout un objectif business pour le groupe Pernod Ricard, qui est doté d’un portefeuille de 240 marques, avec à peu près 10 à 15 marques activées par marché. Donc, l'idée consiste à utiliser les datas pour activer notre portefeuille de manière plus pertinente. On a priorisé trois cas d'usage majeur : un sur la force de vente, avec D Star, afin d’aller dans les bons points de vente avec les bonnes marques ; une sur la promotion, avec Vista Rev-Up pour calculer le ROI de nos actions et proposer aux distributeurs les meilleures promotions pour le consommateur.

Et le troisième cas d’usage ?

Celui qu’on m’a confié, sur la partie marketing, avec le simulateur Matrix, pour calculer le ROI de nos points de contact, par exemple la contribution d'une campagne Facebook vs une campagne TV vs de l'affichage. Ce qu’on appelle le marketing mix modeling (MMM), que proposent notamment les panélistes depuis les années 90, et que vous achetez pour vos trois plus grosses marques une fois par an parce que ça coûte cher. Une des difficultés résidait dans l’absence de comparaison unique, chaque plateforme a son mode de calcul du ROI. Avec nos outils que nous avons internalisés, il est possible de mesurer sur tous nos canaux de distribution sur un maximum de marchés – et chaque pays a ses habitudes de consommation et ses contraintes légales – et avec une fréquence plus forte.

Comment avez-vous procédé ?

Par un « proof of concept » [méthode d’évaluation de la faisabilité d’un projet] pour s’assurer que cela pouvait marcher. Nous avons commencé à l’été 2020 sur deux marchés différents, l’Allemagne et le Japon. Avec le contexte Covid, nous sommes allés très vite. Le critère de fiabilité se révélant très bon par rapport à la norme, nous avons pu vite déployer notre outil Matrix. Cette phase d’industrialisation a nécessité de la modélisation, un travail sur la data pour la nomenclaturer, et une collecte des insights et de l’expertise pour codifier les bonnes pratiques. Nous l’avons déployé en deux ans sur nos treize principaux marchés, représentant 80% de notre activité. Nous sommes maintenant dans une troisième phase de marketing de la performance, avec un centre d’excellence disposant de quatre années d’historique, deux mises à jour par an, 15 marques par marché, donc des dizaines de milliers de ROI permettant d’avoir un point de vue sur ce qui fonctionne ou pas.

Et Matrix est-il systématiquement adopté par les équipes des différents pays ?

Nous demandons aux différents marchés d’utiliser systématiquement Matrix pour construire leur plan marketing, et de suivre au moins 50% à 70% des préconisations. A contrario, nous invitons les marchés à faire du « test & learn » soit sur des points de contact qui n'ont pas bien fonctionné dans le passé, sur lesquels nous testons une exécution ou un asset créatif différent ; soit sur des points de contact qui sont nouveaux pour nos marques, comme les plateformes SVOD qui s'ouvrent à la publicité.