La directrice marketing et digital de L’Oréal France était l'une des dix invités de la conférence «Les directeurs marketing champions de l'IA», organisée dans le cadre du Stratégies Festival.

Quel était l'objectif du programme Beauty Tech lancé par L'Oréal en 2018 et intègre-t-il l'IA dans son champ d'action ?

Le postulat consistait à passer de la beauté pour tous à la beauté pour chacun à grande échelle, optimisée par Beauty tech. Celle-ci s’avère essentielle d'une part pour émerveiller le consommateur avec des innovations révolutionnaires grâce aux recherches de nos équipes scientifiques et répondre à des besoins de beauté. D’autre part, pour offrir aux consommateurs des expériences de beauté supérieure, avec des services digitaux pour les aider dans le choix des produits. Ce n'est pas nouveau. Ainsi, L’Oréal a racheté en 2018 ModiFace, une société canadienne qui fait de l'essayage virtuel de maquillage en réalité augmentée et IA. En mai dernier, nous avons aussi, pour les boutiques Kiehl’s, présenté Derma Reader, un algorithme entraîné sur plus de 20 000 images avec la technologie Nexa qui permet d’établir un diagnostic de peau. L’IA vient aussi enrichir l'ensemble du parcours consommateurs, que ce soit en ligne, en magasin ou par différentes étapes. Et l’IA générative a de plus en plus d'impact sur la chaîne de valeur marketing. D’abord, dans la façon dont l'information est consultée et l'accès beaucoup plus rapide aux données ; ensuite, dans la façon de produire et de distribuer les contenus.

Quel est le bilan six ans après ?

Pour vous donner quelques chiffres clés sur Beauty Tech, les services digitaux de diagnostic, de conseils… étaient à plus de 100 millions d'utilisations en 2023. Au total, ce sont plus de 800 services digitaux disponibles aujourd'hui pour répondre à tous les besoins de chaque consommateur, qu'on a déployés à grande échelle sur l'ensemble de nos 31 marques et dans 72 pays, que ce soit sur les points de vente L'Oréal, les points de vente de nos distributeurs ou sur les sites marchands de distributeurs.

Le groupe a annoncé lors de VivaTech en mai dernier la création de CreIAtech, un laboratoire exploitant l'IA générative ayant déjà produit plus de 1 000 images. Quel est son rôle ?

Chez L’Oréal, on croit au potentiel de l’IA générative pour libérer la créativité des équipes marketing et CreIAtech s'inscrit dans cette logique puisqu'il permet en interne de travailler des concepts, des images pour nos marques. C'est un lieu d'expérimentation protégée en fait, avec un moteur fait en collaboration avec NVidia et WPP mais aussi d'autres modèles de partenaires. Les images sont générées par rapport aux codes visuels, de langage… des marques, à partir d’un moteur qu'on a développé en priorité avec La Roche Posay et Kerastase. Elles portent sur des essais de packaging, de flacon, de décors de visuels, de simulation de storyboard en amont de publicité… travaillés avec les équipes marketing et avec nos agences de création qui y sont associées, et avec une supervision humaine. Mais pour ce qui est par exemple des effets de produits sur la peau, sur les cheveux, etc., la décision a été prise de ne pas les simuler avec de l’IA générative.