Avec des images cocasses mettant en avant l’importance de la maîtrise des mots pour pouvoir utiliser l’intelligence artificielle générative, Bescherelle et Brainsonic remportent le Grand Prix Stratégies du brand content.
Alors que courant 2022, les campagnes utilisant l’intelligence artificielle commencent à fleurir, l'équipe de Brainsonic décide elle aussi de se pencher sur la question. « Mais l’idée, ce n’était pas de sortir une énorme campagne en cochant simplement la case IA, précise Camille Sabatier, directrice conseil chez Brainsonic. C’était de montrer qu’aujourd’hui, certes on a de nouveaux outils qui nous permettent d’améliorer les process de travail, mais si on ne parvient pas à maîtriser ces outils, on perd un temps fou et on arrive à des résultats complètement lunaires. »
C’est ainsi que naît l’idée des bad prompts : des descriptions textuelles comprenant une faute d’orthographe données à un programme d'intelligence artificielle générative, produisant de fait des visuels ne correspondant pas à l’esprit de la demande. Un petit porc de pêche authentique, une jolie maison dans une forêt de pains, un mètre nageur au bord d’une piscine, une compétition de seau en hauteur, un enfant jouant avec un cerf volant… Cinq images en français et sept en anglais sont ainsi créées grâce aux outils Dall-E et Midjourney.
Un annonceur naturel
Mais attention, pas question pour l’agence de faire comme tout le monde. « Ce qu’on voyait partout, c’était de la surenchère au niveau de la qualité visuelle vers toujours plus d’extraordinaire, et on s’est dit tout de suite qu’on voulait prendre le contre-pied de cette tendance, et que faire de la sous-enchère visuelle avec l’IA, ce serait plus amusant, raconte Sébastien Combemale, directeur de création chez Brainsonic. Le petit porc de pêche est presque gênant, la maison avec les baguettes est aussi un peu embarrassante : c’était bien d’avoir ces images qui créent tout de suite une accroche étonnante. Les visuels en anglais quant à eux ressemblaient plus à une publicité classique, mais le concept restait là. »
Armée de ces visuels drôles, qui touchent presque à l’onirique, l’équipe propose une campagne à Bescherelle. « C’était l’annonceur le plus naturel, le plus évident. Bescherelle est la référence sur les problèmes d’orthographe », poursuit le directeur de création. Du côté des éditions Hatier, propriétaires de la marque, l’enthousiasme est immédiat. « Cette campagne permettait de mettre en lumière la difficulté de se faire comprendre quand on ne maîtrise pas le vocabulaire et l’orthographe, et en cela, nous trouvions que c’était un message très fort et en cohérence avec ce que nous portons au quotidien dans nos livres, sur nos réseaux sociaux, sur notre site », explique Rachel Duc, directrice de département éducation grand public de l’éditeur.
Une campagne virale
Avec sa signature « Grâce à l’intelligence artificielle, on peut créer des images avec des mots. Encore faut-il avoir les bons », la campagne est d’abord diffusée en France sur les réseaux sociaux à partir de décembre 2022, avant de sortir un mois plus tard à l'étranger avec son pendant en anglais. Elle fait aussi l’objet en mars 2023 d’affichages dans le quartier de l’Opéra à Paris. Et l’opération devient rapidement virale.
Bilan : plus de 25 millions de vues en earned media, 130 posts LinkedIn en France et à l’international, plus de 20 000 réactions, toutes positives, une vingtaine d’articles, des passages en télévision. « La campagne a voyagé toute seule, se réjouit Camille Sabatier. Des influenceurs l’ont même décortiquée sur TikTok, saluant un coup de génie de Bescherelle pour dépoussiérer ce petit livre rouge. » Une satisfaction partagée par Rachel Duc : « La preuve que la campagne a très bien fonctionné, c’est que tout le monde s’en est saisi et s’est amusé à l’enrichir, à créer son propre prompt avec erreur. »
Rachel Duc, directrice de département éducation grand public des éditions Hatier
« Bescherelle est une marque iconique, très inspirante, donc nous avons l’habitude d’être souvent sollicités pour des campagnes et nous en acceptons très peu. Mais là, on n’a pas du tout hésité, parce que cette manière d’utiliser l’intelligence artificielle montre vraiment, et c’est l’essence de Bescherelle, que la maîtrise des mots est indispensable et pas du tout surannée. On a été très contents de travailler avec Brainsonic, on est ravis de toute cette histoire qui nous a un petit peu dépassés. »