Consommation

Entre inflation et incertitudes, la fin d’année s’annonce moins festive que d’ordinaire pour beaucoup de consommateurs et d’annonceurs. Recherche de performance commerciale plutôt que de notoriété, recours aux promotions… Les marques de grande consommation s’adaptent.

En cette période de sobriété énergétique, un Français sur cinq envisage de ne pas faire scintiller son sapin pour cette fin d’année, selon une étude Ad to Basket (Havas) dévoilée début novembre. C’est dire combien, dans les têtes et dans les portemonnaies, l’ambiance n’est pas vraiment à la fête. Pas une bonne nouvelle pour les marques de grande consommation. D’autant qu’elles sont soumises elles aussi à la hausse des prix de l’énergie, des matières premières et des coûts logistiques, qui grèvent leurs marges et tendent leurs rapports avec les distributeurs, avec lesquels elles sont contraintes de renégocier. Et ce, encore, alors qu’elles s’apprêtent à clore une année dans laquelle la guerre en Ukraine, début février, a bousculé la promesse de reprise post-Covid. Ce contexte se traduit déjà sur les budgets publicitaires et de communication, touchés par des restrictions, selon les priorités des annonceurs. N’en jetez plus…

Si la fin d’année pourra, pour certaines, être compliquée à boucler, les marques ont adapté leurs stratégies. Qui dit contexte délicat, dit resserrement sur l’essentiel : vendre. « Depuis le début de l’année et surtout le deuxième trimestre, de nouveaux objectifs ont émergé chez les marques, passées d’une logique de mix contenus, notoriété et ventes à une logique de ROI pure », observe Christophe Bosquet, président de l’agence de marketing digital Effinity.

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« Cela concerne surtout l’équipement de la maison, la décoration, la high-tech, l’électroménager. Les univers de l’équipement sportif et de la puériculture résistent. L’un parce que le taux d’équipement n’est pas saturé, et c’est un effet du premier confinement. L’autre parce que ce sont des produits dont les consommateurs ont vraiment besoin », détaille le dirigeant. La notoriété, le branding, le travail sur la préférence de marque ou le positionnement passent au second plan, de même que la problématique de l’innovation publicitaire : l’époque est davantage à la « frilosité » qu’au « débroussaillage » et au test de nouveaux formats.

« Certaines marques sont offensives et maintiennent leurs investissements TV et digitaux. D’autres, plus nombreuses, adoptent une stratégie défensive en allant chercher des programmes à la performance », confirme Sébastien Camusot, directeur d’Ad to Basket, entité spécialisée dans le retail et l'e-commerce d’Havas. Parmi les leviers privilégiés figurent en premier lieu l’achat de mots-clés sur les plateformes comme Amazon – où 64% des consommateurs français qui cherchent un cadeau démarrent leur recherche, selon Ad to Basket – ou celles des distributeurs. « Sur ce type d’investissement, on observe une croissance de 30% par rapport à l’année dernière », estime l’expert. D’autant plus que, côté distributeurs, l’offre, en matière de retail media, est en pleine structuration, ce qui offre aux marques des espaces supplémentaires. L’annonce, début novembre, de la volonté de Carrefour et Publicis de créer une plateforme commune en est d’ailleurs une illustration.

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Au total, « des prises de parole plus efficaces », synthétise Séverine Dussud, directrice générale d’Empreinte Conseil, agence de marketing et communication. Accompagnant notamment les marques dans leurs activations en point de vente, elle a, elle aussi, récemment constaté que certaines opérations étaient annulées ou réalisées a minima, bien que d’autres annonceurs maintiennent leurs investissements et ne renoncent pas à leurs prises de parole autour de leur responsabilité de marque. C’est le cas du groupe Seb, présent à différents moments de l’année 2022 avec des dispositifs autour, par exemple, du fait maison. 

Dans ce contexte général, la logique promotionnelle prévaut. Même si de nombreuses incertitudes entourent le Black Friday, traditionnel gros rendez-vous de la fin de l’année en la matière. 70% des Français avaient l’intention d’effectuer des achats ce jour-là, avec un budget en hausse de 8% par rapport à 2021, selon une étude de l’entité de PwC spécialisée dans le conseil en stratégie Strategy&, dévoilée quelques jours avant le jour J. Mais ils étaient seulement 28%, selon Bonial, fournisseur de solutions de communication pour les enseignes, notant, dans le même temps, une très forte hausse du budget moyen (+100 euros) et prévoyant malgré tout un « potentiel succès commercial »… De son côté, constatant dans une étude rendue publique autour de mi-novembre que 39% des Français vont dépenser moins pour les fêtes de fin d’année, Yahoo conseille aux marques de « proposer des bons plans ». Empreinte Conseil a, ces derniers mois, imaginé « des opérations pouvoir d’achat habillées ». Autrement dit, jamais directement orientées prix mais construites autour d’une mécanique, d’un ressort ludique. Même si la problématique de fond ne change pas…

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Par ailleurs, des observateurs du marché, comme Christophe Bosquet, remarquent « davantage d’opérations promotionnelles étendues sur la durée ». « Pour les marques, cela crée plus de concurrence en occasionnant plus de requêtes sur certains mots-clés sur Amazon. Cela fait monter les enchères. Il leur faut surinvestir pour être visibles », développe Sébastien Camusot. D’autres, comme Séverine Dussud, ne partagent pas ce point de vue. Celle-ci relève surtout « des prises de parole avec de la pédagogie » pour expliquer, notamment, les dommages collatéraux du Black Friday, a priori peu compatible avec une logique de consommation responsable. Reste que les Français auraient tendance à réaliser leurs achats de plus en plus tôt. Pointant dans son étude que 58% des consommateurs ont l’intention de commencer leurs achats de cadeaux avant ou à partir du Black Friday, Yahoo conseille aux marketeurs « d’agir au plus tôt en ciblant les audiences qui commencent leurs achats dès novembre, puis inspirer les consommateurs jusqu’à la dernière minute ».

Et cela devrait continuer en 2023, année pour laquelle les stratégies sont en cours d’élaboration ou de finalisation. La maîtrise des nouveaux outils de retail media constitue d’ores et déjà un enjeu pour les marques. Autre problématique pour elles, alors que la seconde main poursuit sa progression : « garder du lien sur leurs produits vendus dans un second circuit », entrevoit Sébastien Camusot, en citant l’exemple de Petit Bateau, récemment lancé dans la location de vêtements.

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