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En termes de créativité, la décennie voit s’affronter ces deux agences, tandis que le porno chic fait des ravages dans le luxe

« Après la disruption des années 90, on assiste à un retour sur la marque dans les années 2000, analyse Marc Drillech, ancien président de Public Dialog et actuel directeur général du groupe Ionis Education. L’agence emblématique de cette période est BETC. Elle est capable de mettre en scène des promesses de marque de façon spectaculaire et profonde. C’était déjà le cas avec les bébés d’Evian sur la jeunesse, mais aussi avec Air France et sa signature “Faire du ciel le plus bel endroit de la Terre”. » Cette campagne tournée par Michel Gondry sur une musique planante des Chemical Brothers date de 1999 mais elle est représentative du début des années 2000 où l’on aspire à la sérénité. L’agence signe aussi des films mémorables pour Canal+ dont « La marche de l’empereur » (2006), une histoire de quiproquo à la cantine d’entreprise qui illustre la passion pour le cinéma.

En termes de créativité, Rémi Babinet, le directeur de création de BETC, est en concurrence avec Erik Vervroegen, son homologue de TBWA Paris. Celui-ci officie pour Aides, Bic, Nissan, Playstation… et engrange les prix. Sous sa férule, TBWA Paris est désigné quatre fois de suite agence de l’année au festival de Cannes de la publicité. Il faut compter aussi avec Leg de Gabriel Gaultier et ses campagnes primées pour Eurostar et Ouï FM, l’étonnante série Brandt sur des femmes en pleine crise de nerfs façon cinéma réaliste (CLM BBDO), l’humour grinçant de DDB pour Volkswagen et ces célibataires prêts à tout pour s’offrir un Touran.

« Vraies gens »

La pub s’ouvre à la réalité sociale : après les divorcés, elle met en scène un couple homosexuel pour la lessive Vizir en 2004, non sans clichés. C’est le triomphe des « vraies gens », les campagnes embauchent des salariés et des consommateurs lambda pour faire œuvre de vérité, à EDF, SNCF, La Poste et Dove qui brise les stéréotypes sur la beauté. Même le Kaiser Karl Lagerfeld accepte de revêtir un prosaïque gilet jaune dans une des campagnes les plus mémorables de la décennie pour la Sécurité Routière : « C’est jaune, c’est moche, ça ne va avec rien, mais ça peut vous sauver la vie » (Lowe Strateus, 2008, Grand prix de l’affichage).

Le tournant des années 2000 est marqué par l’apogée du « porno chic », tendance initiée par Tom Ford, Carine Roitfeld et Mario Testino pour Gucci qui joue la transgression sur le dos des femmes. Tom Ford poursuivra dans cette veine pour Yves Saint Laurent et d’Ungaro à Dior en passant par Dolce & Gabbana, le monde du luxe abuse d’images de domination, au grand dam des associations féministes. Même la grande consommation s’y met, à l’instar de la crème Babette et son affiche « Je la lie, je la fouette et parfois elle passe à la casserole » (2000, D’Arcy). On est bien avant #MeToo et la libération de la parole des femmes mais même alors, l’argument du second degré ne passe pas. Dès 2007, la veine se tarit. Entretemps, en 2005, un étudiant de Harvard nommé Mark Zuckerberg crée Facebook et le monde de la communication ne sera plus jamais comme avant.

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