Les États-Unis ont levé le principal obstacle à l'adoption d'un accord international sur la fiscalité des géants du numérique, a indiqué à l'AFP vendredi 26 février un responsable du Trésor américain. La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a déclaré aux ministres des Finances du groupe G20, que Washington abandonnerait une partie particulièrement litigieuse de la proposition, qui avait été mise sur la table fin 2019 par l'administration Trump, à savoir une disposition dite «refuge» (safe harbour), a-t-il expliqué.
Le «safe harbour» revenait à donner aux géants du numérique le choix entre accepter le nouveau régime fiscal sur une base volontaire ou continuer avec le système actuel. La France s'est immédiatement félicitée de ce changement de cap américain, jugeant un accord «à portée de main», et possible d'ici l'été.
Il faut désormais «conclure sans délais» les négociations, a enjoint le ministre français des Finances Bruno Le Maire dans une déclaration.
Les discussions du projet se déroulent dans le cadre de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). L'abandon par Washington de la disposition dite «refuge» est «un énorme pas en avant sur notre chemin vers un accord d'ici la fin de l'été», a également estimé le ministre des Finances allemand, Olaf Scholz, en marge d'une réunion du G20-Finances.
Janet Yellen a en outre annoncé que Washington allait «s'engager fermement sur les deux piliers du projet» de réforme de la fiscalité internationale, selon le responsable du Trésor.
Apaiser les tensions
Les négociations en cours portent d'une part, sur la répartition des droits d'imposition entre pays de production et pays de consommation (pilier 1), en gros déterminer le lieu où l'impôt doit être payé, et, d'autre part, sur un seuil minimal d'imposition pour tous les pays (pilier 2).
Le projet d'accord, qui n'a pas abouti fin 2020 en raison du blocage américain, concerne tous les secteurs. Mais il se pose avec une acuité particulière pour les multinationales du numérique qui paient des impôts particulièrement faibles sur des marchés importants pour eux mais où leur présence physique est réduite. La taxation de Google, Facebook et autres géants américains, est d'autant plus d'actualité que ces entreprises ont été les grandes gagnantes en 2020 de la pandémie de Covid-19 quand les pays se sont enfoncés dans la récession.
L'inflexion américaine est de nature à apaiser les tensions entre les États-Unis et l'Europe. L'obstruction de l'administration Trump à ce projet avait en effet provoqué de vives tensions entre Paris et Washington notamment.
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La France avait avancé ses pions avec la mise en oeuvre d'une taxe dite «Gafa» pour Google, Amazon, Facebook et Apple. Et, après avoir observé une trêve en janvier 2020, elle avait décidé de prélever sa taxe au titre de 2020 à partir du 6 janvier.
Peu avant son départ, l'administration Trump avait, elle, annoncé que l'application de droits de douane supplémentaires sur des produits français emblématiques comme le champagne, en représailles à la taxe Gafa, qui devait entrer en vigueur le 6 janvier 2021, était finalement repoussée. Dès janvier, avant même sa confirmation, Janet Yellen avait assoupli la position américaine sur ce dossier litigieux, se disant prête à reprendre les discussions.
La France a, elle, fait savoir que si les discussions échouent à l'OCDE, la France militerait pour que l'Union européenne mette en place sa propre taxe. Le temps presse en somme pour adopter le projet.