Stratégies a pu échanger avec Jean-David Benassouli, VP senior et directeur Cloud Sales chez Salesforce, lors de l’événement « Agentforce World Tour Paris », qui s’est tenu le 7 novembre. Retour sur la stratégie de Salesforce en matière d’intelligence artificielle.
Vous avez organisé un grand événement au Palais des Congrès pour le lancement de Salesforce Agentforce en France. Qu’avez-vous observé de l’état d’esprit de vos clients et participants ?
Nous ressentons beaucoup d’intérêts et de questionnements. D’ailleurs nous avons été très surpris du nombre de personnes qui sont venues, nous avons dû augmenter les jauges ! L’intelligence artificielle est un sujet depuis plusieurs années, et surtout depuis 2016, en ce qui concerne Salesforce, avec le lancement d’Einstein. Nous avons investi 1 milliard de dollars en IA sur les 18 derniers mois [pour un CA de 36 milliards annuel]. Mais la technologie a beaucoup progressé depuis deux ans, et les entreprises ont aussi pas mal investi depuis 2022. Le constat, c’est que beaucoup font face à des problèmes pour passer à l’échelle. Elles sont limitées dans les cas d’usage. À ce jour, énormément d’entreprises ont fait des essais, mais restent bloquées à cette étape, et se demandent comment avancer, ou ne sont pas convaincues.
Qu’est ce qui bloque justement ?
Principalement l’accès aux données. Vous pouvez avoir de bons LLM bien entraînés, si pour un cas précis, il n’a pas accès en direct aux données, vous ne pourrez pas personnaliser sa réponse convenablement, en termes de relation client. C’est pour cela que le lancement d’Agentforce est une première, car il repose sur tout le travail que nous avons fait en amont sur Data Cloud, une offre que nous préparons depuis plusieurs mois. Le but est de pouvoir avoir accès en temps réel à toutes les données. C’est ce qui fait que notre moteur de raisonnement client est considéré comme 33 % meilleurs que les autres. Nous avons passé des partenariats avec tous les providers de Cloud, ce qui fait que pour chaque réponse nous pouvons interroger différentes bases, par le principe du « zero copy ». Nous ne copions pas la donnée, mais nous la lisons, pour aider le LLM à formuler ses réponses. Cela permet, quand vous appelez pour obtenir des informations sur un produit, de lire les stocks, d’analyser une photo, et aussi l’historique de la discussion que vous avez eu avec le client. Et toutes ces données font appel à des bases différentes. C’est en cela que les agents d’IA passent un nouveau cap. Ils peuvent formuler leurs réponses à partir des données structurées et des données non structurées, en les interrogeant en temps réel.
Avec quel LLM travaillez-vous ?
L’outil permet de configurer le modèle de langage que vous souhaitez. Si avec Salesforce Ventures, nous avons investi dans certaines solutions, notre but est de pouvoir travailler avec toutes. Ainsi, en fonction des services et des tâches, vous pouvez prendre un modèle spécifique, celui de votre choix [OpenAI, Gemini, Anthropic…]. Tous les LLM du marché peuvent y être configurés. Agentforce permet de bâtir l’agent conversationnel que vous souhaitez, pour la tâche que vous souhaitez. Nous avons vraiment travaillé à rendre les configurations très simples. Nous avons intégré un prompt builder. C’est-à-dire que vous rentrez un prompt simple, et il va le retravailler pour qu’il soit adapté et précis pour la tâche demandée. Vous ne travaillez que sur les grandes lignes. Vous pouvez personnaliser vos procédures, les créer en fonction des tâches qui vous sont spécifiques, sans avoir de formation précise sur le prompt. Pour les équipes, la mise en place est ainsi plus rapide. Car c’était aussi une demande du marché, de réduire la difficulté à implémenter ses outils, et d’accélérer le déploiement au sein des équipes. Encore une fois, l’enjeu des clients aujourd’hui, c’est de passer à l’échelle. Nous avons donc créé une plateforme de configuration de tous les agents au sein des organisations.
C’est une offre pour les clients de Salesforce ou c’est aussi un moyen pour vous de faire de l’acquisition ?
Sur l’événement, nous avons beaucoup de clients, mais aussi des prospects. Salesforce est vraiment un écosystème, donc certains ne sont clients que d’une partie de nos solutions. Vous prenez Data Cloud, nous n’avons pas vocation à devenir un ERP, mais nous pouvons héberger, si vous le souhaitez, vos données. Après, en fonction de sa taille, le client a son propre hébergement. Il reste assez libre. En revanche, pour nous, ce service est essentiel car il permet de réconcilier en un seul profil clients, ceux qui utilisent différents aspects de nos solutions.
Cette simplification de configuration n’est-elle pas pensée aussi pour attirer les TPE PME, qui tardent à passer à l’IA ?
Aussi. Nous voulons aider à accélérer à l’IA. Aujourd’hui, beaucoup d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) ne sont pas clientes de Salesforce et beaucoup même n’ont pas forcément d’outils adaptés dans le domaine du CRM ou de la relation client. Nous réalisons environ 40 % de notre chiffre d’affaires français en région. Mais ce marché reste encore très peu travaillé. Et nous allons réaliser des investissements massifs dans ce domaine prochainement.
Ne craignez-vous pas, comme beaucoup, que ces outils servent à réduire les tailles des équipes ?
Ce n’est pas du tout ce que nous observons dans les demandes des clients. Toutes les discussions que nous avons se situent autour de la levée des difficultés du métier, pour accélérer la formation des équipes ou encore réduire le turnover. On le dit souvent, mais c’est vraiment les discussions que nous avons, le but est d’allouer une partie du temps des équipes à des tâches plus stratégiques.