Depuis l’annonce des législatives, les influenceurs oscillent entre engagement et consensus. Tandis que certains appellent simplement à voter, d’autres, comme Léna Situations et Natoo, affichent des positions plus marquées. En arrière-plan, un groupe tente de mobiliser contre l’extrême droite.
Appels à aller voter ou démarches à suivre pour faire une procuration : si les principaux influenceurs et créateurs de contenus sont restés plutôt discrets depuis l’annonce des législatives, des comptes plus petits cherchent à créer une mobilisation.
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« Voilà pourquoi on doit aller voter le 30 juin », a partagé sur Instagram mardi Léna Situations, la star des influenceuses françaises, à ses 4,6 millions d’abonnés, en réponse à un message raciste. « Le taux d’abstention est fou ! Votre vote est pourtant si important », a publié de son côté la créatrice de contenus Natoo (4 millions d’abonnés sur Instagram).
Depuis l’annonce dimanche de la percée de l’extrême droite aux élections européennes, plusieurs créateurs aux millions d’abonnés en ligne ont posté des messages appelant leur communauté à voter ou expliquant comment faire une procuration avant le premier tour des législatives le 30 juin. Mais jusqu’à présent très peu se sont risqués à afficher clairement un soutien à un candidat ou un groupe politique.
« Ils sont dépendants de leur communauté », explique à l’AFP Stéphanie Lukasik, enseignante-chercheuse en sciences de l’information et de la communication. « Le risque, c’est de se mettre à dos une partie de ses abonnés […], perdre de la viralité de contenu » et voir son image écornée auprès de certaines marques, estime cette experte au Conseil de l’Europe sur la responsabilisation des créateurs de contenus, qui constate tout de même une « timide prise de position ».
« Sans se mouiller »
« Les prises de position politiques, ce n’est pas quelque chose que les créateurs de contenu ont l’habitude de faire », abonde auprès de l’AFP Jean Massiet, créateur d’une émission politique sur Twitch. Selon lui, « en disant "allez voter", on invite les gens à faire un geste citoyen et c’est très positif, tout le monde est d’accord avec l’idée d’aller voter. C’est une façon de se mobiliser sans se mouiller ».
Ces derniers jours, certains créateurs ont pourtant exprimé des opinions plus tranchées. « J’emmerde l’extrême droite, j’emmerde le gouvernement français », s’est ainsi emporté sur Twitch le streamer Ponce (790 000 abonnés).
L’influenceuse Sally (1,2 million d’abonnés sur Instagram) met en garde ses abonnés dans une vidéo, contre les stratégies utilisées par le RN sur les réseaux sociaux. Premier youtubeur français, Tibo InShape, régulièrement accusé de promouvoir des positions conservatrices voire d’extrême droite, a lui défendu mardi le drapeau tricolore qui, selon lui, n’a aucun lien avec les « opinions politiques ».
Mais pour Jean Massiet, les personnalités d’internet « font partie d’une catégorie de la population qui n’aime pas la politique. (Ils) la critiquent énormément et ils ont beaucoup de ressentiments envers les responsables politiques ». Pourtant, en coulisses, un groupe d’influenceurs tente de faire barrage à l’extrême droite le 30 juin et le 7 juillet. Lancé par Perrineam, une agence qui accompagne les créateurs du web qui souhaitent s’engager sur des sujets comme la justice sociale ou le climat, cette initiative a réuni depuis dimanche près de 250 influenceurs, selon Perrine Bon, sa fondatrice.
Prises de parole
« Il y a eu un effet boule de neige », raconte à l’AFP la jeune femme de 29 ans, qui affirme que des créateurs de « 10 000 à 5 millions d’abonnés » l’ont contacté. Parmi eux, l’artiste Math (179 000 abonnés sur Instagram) ou l’activiste féministe Marion Escot, fondatrice de Punchlinettes (116 000 abonnés).
« Il va y avoir des prises de parole » dans les jours à venir, assure Perrine Bon, qui estime que certains créateurs ne parlent pas immédiatement car ils craignent de « dire de bêtise » ou de manquer de légitimité. Car rester muet peut aussi coûter des abonnés.
« Commencez à noter les influenceurs qui se taisent et vous vendent de la merde et ne font rien de plus, notez, n’oubliez pas, cessez le soutien », a écrit lundi sur Twitter la streameuse OPcrotte (67 000 abonnés sur Twitch), dans un message vu près de 200 000 fois. « On voit apparaître une opinion publique, notamment de jeunes, qui veulent que les créateurs s’engagent plus, » affirme Jean Massiet, « qu’ils arrêtent d’être lisses et prennent part à des combats qui, pour le coup, sont des combats politiques ».
Aux États-Unis, le mouvement « blockout 2024 », qui vise à sanctionner les stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza, a coûté plusieurs centaines de milliers d’abonnés à Kim Kardashian, Selena Gomez ou Beyoncé, selon le site spécialisé Social Blade.