Productivité, détection des fraudes, conseils personnalisés... L'intelligence artificielle s'est rapidement imposée dans le quotidien des plus grandes entreprises en France, d'Engie à BNP Paribas.
Depuis le lancement de ChatGPT par la société américaine OpenAI, les innovation se multiplient. France Travail, TotalEnergies, BNP Paribas, Axa, LVMH, L'Oréal ou encore Nestlé : mi-mars, des dizaines de responsables, invités par Microsoft, se sont succédé à la tribune de « l'IA Tour » pour partager leur utilisation de l'IA au quotidien. Cet évènement organisé à Paris au Carrousel du Louvre affichait complet, signe de l'engouement pour cette technologie qui pourrait bien révolutionner le quotidien de millions d'employés.
Lundi 8 avril, le Raise Summit réunit à son tour à Paris plusieurs décideurs, dont Arthur Mensch, co-fondateur de MistralAI, l'entreprise européenne considérée comme la plus avancée dans l'IA générative : un programme capable de formuler des phrases cohérentes et souvent justes à partir de simples questions ou demandes formulées par un utilisateur.
Intégré par Microsoft dans ses logiciels de bureautique via un service payant baptisé Copilot, ChatGPT résume des mails ou pages web, facilite les recherches et la rédaction de présentations, permet de préparer des réunions prévues en fonction des participants. Le groupe mise sur ce Copilot pour démocratiser l'IA dans les entreprises.
« Déployer des outils de productivité » pour les employés, par exemple une « interface pour rechercher de l'information plus rapidement dans toutes les bases de données de l'entreprise », est souvent une des premières mises en pratique de l'IA pour les employés, explique à l'AFP Nicolas de Bellefonds, directeur monde de BCG X, l'activité IA du cabinet de conseil BCG. Viennent ensuite les applications ciblées, comme les centres d'appel, le développement informatique ou le marketing.
Développée depuis plus longtemps que l'IA générative, l'IA par apprentissage (machine learning) permet notamment d'analyser des images. Elle contribue ainsi par exemple à la traque de fuites de méthane - un gaz à effet de serre puissant issu des énergies fossiles - ou au diagnostic de certains cancers. Chez Engie, l'IA par apprentissage permet de prédire le rendement d'éoliennes. Dans des centaines de rapports d'accidents du travail, « nous utilisons l'IA pour détecter des tendances que nous n'avons pas reconnues avant », a détaillé lors de l'IA Tour de Microsoft Biljana Kaitovic, directrice générale adjointe chargée des systèmes d'information et du digital.
Validation humaine
TotalEnergies a annoncé fin février l'achat de licences Copilot pour ses collaborateurs. Et chez le géant des moteurs Cummins, une IA dessine les plans de plusieurs versions d'un composant en fonction des caractéristiques recherchées (poids, solidité...). Les assureurs ont également recours à l'IA pour déceler la fraude. Et des banques comme BNP Paribas s'appuient sur une analyse automatisée de dossiers clients dans le cadre des obligations règlementaires comme la lutte contre le blanchiment. L'IA détecte mieux qu'un humain des montages financiers complexes et illégaux, a détaillé à l'AFP Hugues Even, responsable data du groupe.
Quelque 20 000 employés du géant du luxe LVMH utilisent aujourd'hui une IA interne basée sur ChatGPT, baptisée « MaIA », qui permet de synthétiser des documents ou encore de générer des mails. Mais la validation par des humains reste nécessaire. Il faudra un oeil expert « probablement pour très longtemps, pour contrôler ce qui est produit, retoucher et le valider », note Nicolas de Bellefonds. Ce qui entraine « une vraie problématique RH » : comment faire émerger ces experts si l'IA se charge des tâches ayant, auparavant, permis de former les nouveaux arrivés ?
Le problème des hallucinations de l'IA
Autres problèmes à régler, l'IA peut « halluciner », c'est-à-dire inventer des références, ou ses réponses peuvent carrément être hors sujet. Car l'IA ne réfléchit pas comme un humain; elle ajoute en général derrière chaque mot le plus probable suivant, en fonction d'un corpus de textes que ses créateurs lui ont fait lire. Et l'énorme besoin en énergie pour entrainer et faire fonctionner une IA générative est souvent critiquée.
Mais ces technologies sont « déjà matures et fonctionnent sur certains sujets bien définis », ajoute Nicolas de Bellefonds. « Sur un certain nombre de tâches, on a des gains de vitesse très significatifs », qui peuvent atteindre 70% dans les relations client, et aussi « des gains de qualité », selon BCG. « Ce qui est sûr, c'est que ça va profondément changer nos manières de travailler », note-t-il, lui-même utilisateur au quotidien d'une IA générative.