Depuis son lancement en juillet, Threads, le nouveau réseau social de Meta, aspire à intégrer le fédivers. Le terme gagne en popularité, pourtant les marques tardent à embrasser cette tendance en raison de défis techniques et politiques.
Un terme technique…
« Nous prévoyons d’intégrer Threads au fédivers », indique Meta à propos de son dernier réseau social. Voilà qui a de quoi dérouter. Nous, on s’était arrêtés au « métavers », mais apparemment, le nouveau terme à la mode, c’est « fédivers ». Si dans les deux cas, on retrouve la notion « d’interconnexion », les deux concepts n’ont rien à voir. Dans le contexte du métavers, la connectivité s’exerce entre différents univers virtuels où les utilisateurs peuvent interagir, alors que le terme fédivers, fusion des mots « fédération » et « univers », concerne la décentralisation des réseaux sociaux. Le fédivers utilise le protocole ActivityPub, qui connecte différentes instances (microblogs, partage de vidéos, photos, etc.) et favorise l’interopérabilité entre elles. En clair, c’est un peu comme un « réseau social des réseaux sociaux ». Ainsi, sur Threads, les utilisateurs possèdent des pseudonymes en interne, mais sur d’autres réseaux décentralisés, ils sont identifiés comme @[email protected]. Arthur Kannas, président cofondateur de Heaven, donne l’exemple des e-mails : « Ce n’est pas parce que j’envoie un mail via Gmail que mon interlocuteur ne peut pas le recevoir sur Outlook. »
… et politique
Ce concept incarne l’idéal originel d’Internet : ouvert, open source, partagé, interopérable. À l’arrivée des réseaux sociaux, de nombreux observateurs ont envisagé que des plateformes puissent reposer sur des protocoles de communication ouverts au lieu d’être simplement des plateformes fermées. Mais cela ne s’est pas concrétisé de cette manière. « Ce qui est intéressant, ce sont les questions théoriques que cela pose : est-ce que le web devrait être ouvert ou pas ? Pour l’instant, les géants technologiques, avec leurs plateformes propriétaires, contrôlent l’espace social, soulevant des préoccupations en matière de confidentialité des données », indique Arthur Kannas. En cette ère de réglementations, notamment du DSA (Digital Services Act), l’Union européenne vise une interconnexion universelle des services, négligeant parfois les défis techniques. Meta, par le biais du fédivers, anticipe un avenir d’interopérabilité, permettant à ses plateformes de dialoguer avec d’autres, alignant ainsi ses pratiques avec les exigences légales.
Et demain ?
« Le sujet est très technique et ne fait pas (encore) partie des stratégies de communication des annonceurs », assure Arthur Kannas. Actuellement, peu de gens utilisent les adresses en @[email protected]. Les marques hésitent à s’engager car l’adoption est limitée, rendant la problématique non urgente. « Pour autant, si cette idée a tendance à revenir ces dernières années, c’est notamment parce qu’on se rend compte que les plateformes sociales ne sont pas éternelles et qu’elles peuvent aussi changer brutalement. Pour ceux qui ont investi du temps, créé du contenu, construit des audiences, la fermeture soudaine d’une plateforme signifie la perte de toutes ces données, y compris les messages privés, les albums photos, etc. Si ces plateformes étaient ouvertes et interopérables, les utilisateurs pourraient préserver leurs investissements en temps et en engagement. »