Loin des sentiers battus et goudronnés du numérique, Fabien Versange, 40 ans, a fait naître SiteW, outil de création de sites web, au cœur de l’Auvergne. Portrait d’un entrepreneur cantalien et ambitieux, puisque les deux ne sont pas incompatibles.
Une entreprise digitale aux ambitions internationales dans le Cantal ? Oui, c’est possible. A cette question, Fabien Versange, co-fondateur de SiteW avec son ami Cédric Hamel, répond en riant que « c’est toujours du côté de l’équipe parisienne que les visioconférences beuguent », la connexion Internet y étant bien plus saturée qu’à Vic-sur-Cère, près d’Aurillac. L’entreprise qui propose un logiciel de création de sites internet simple et intuitif est née il y a treize ans. Elle s’est étendue à la capitale tout en conservant ses racines : « Deux tiers de l’équipe est dans le Cantal, et même certains citadins sont venus s’installer ici », se félicite l’entrepreneur. « Il y a une méconnaissance du territoire. Pourtant, la qualité de vie est bien meilleure qu’ailleurs. C’est l’endroit idéal pour fonder une famille, avoir une maison, un jardin… »
Fabien passe l’éponge sur les difficultés de recrutement dans une région qui n’a pas la réputation d’une Silicon Valley, pas même d’une ville moyenne. Peu importe, il refuse catégoriquement de déplacer le siège de sa structure de 15 employés. Au départ, ce choix s’est fait par défaut… et par affect : « Pour le prix de mon appartement à Toulouse, nous avions une maison dans le Cantal avec un bureau dédié, explique-t-il. Puis, Cédric et moi aimons le vélo, le ski. Nous pensions même à créer un site de cartographie de randonnées ».
200 pays
Les commerces autour de leur école d’ingénieur toulousaine n’avaient pas de vitrine sur Internet, impossible de connaître les horaires d’ouverture. En 2007, leurs compétences étaient rares, et leur envie d’entreprendre débordante. Le projet de rendre le web accessible à tous s’est donc imposé : « La technologie était juste assez mûre pour permettre de créer une page web facilement. Malgré tout, il a fallu tout construire nous-mêmes. Les huit premiers mois, nous avons gagné cinq euros chacun », s’amuse-t-il. Mais cette route du numérique à travers champs fini par plaire. Ils connaissent une croissance exponentielle jusqu’en 2012, la demande est forte. Et ce, en Auvergne comme à l’autre bout du monde : « Que je sois dans le Cantal ou à Paris, peu importe. Je peux être ici et avoir des clients au Mexique, en Nouvelle-Zélande, au Canada ».
Aujourd’hui, SiteW est présent dans 200 pays avec plus d’un million et demi de sites créés, et une identité qui n’a pas changé : proximité, accessibilité, humain. Pas question pour autant de manquer d’ambition. Fabien assume qu’il compte « passer la troisième » dans les mois à venir sur le plan économique, mais aussi écologique. L’entrepreneur n’en parle qu’à demi-mot, évitant l’étiquette de greenwashing et concentrant son énergie à agir : « Pour nous, c’est facile de faire attention, donc c’est indispensable qu’on le fasse. » Le but : n’être qu’une « goutte d’eau qui montre aux autres que c’est possible » d’avoir une démarche plus respectueuse, et de créer une entreprise dynamique à qui la montagne de l’Auvergne vous gagne davantage que la ville.