Dimitri Guerassimov, directeur de la création de VML France, revient sur les grandes actualités en plein festival des Cannes Lions 2024.

Quelles tendances marqueront cette édition 2024 des Cannes Lions ?

L’intelligence artificielle va être évidemment l’un des sujets phare à Cannes cette année. Et d’une manière plus intéressante que jamais. On va être plus focalisé sur ce que l’IA peut aider à accomplir plutôt que sur son côté « hot topic » à la mode. On commence à voir des projets où l’IA est un outil au service d’une idée, comme le Solar Impulse « AI Impulse » de Publicis. Le groupe qui a par ailleurs déjà très habilement jeté de l’huile sur le feu avec son AI BS Detector (bullshit detector). Il va y avoir aussi le grand retour de Coca-Cola sur le devant de la scène créative, avec des campagnes qui viennent de partout dans le monde. Notamment une campagne de VML, « Thank You for Coke-creating », qui est déjà shortlistée en Titanium, et ça ne va pas s’arrêter là. Enfin, il y un autre sujet majeur, c'est celui de l’efficacité des campagnes. Le festival semble accorder de plus en plus d'importance aux résultats business dans la notation finale lors du judging. À voir si cela favorisera des campagnes pour des grandes marques et les gros pays…

Est-ce que l’IA sera au premier plan des créations récompensées ?

Ce serait dommage que les campagnes autour ou avec l’IA monopolisent le palmarès. J’espère surtout voir briller les marques et voir le retour de l‘humour pour contrebalancer les campagnes RSE et les grandes causes. Et c’est déjà bien parti avec des campagnes comme celle de Michael Cerave pour la crème Cerave, créée par Ogilvy, qui avait déjà marqué les esprits durant le Super Bowl.

Est-ce que les agences françaises ont des chances de briller cette année selon vous ?

Autant il va être dur de battre l’incroyable moisson de l’année dernière sur la quantité, autant la France a une chance de marquer les esprits avec peut-être plus de Grands Prix, et une campagne « Women’s Football » sur le point de devenir iconique. On a vu au jury du Grand Prix Stratégies 2024 que la création française se porte bien, mais on va découvrir si ce sera suffisant cette année pour battre les autres pays… il ne faut pas oublier que Cannes est un concours, et un concours qui se durcit d’année en année. Mais évidemment : GO Team France !

Que vous inspire ce contexte électoral inédit et explosif ?

Justement, montrer que la France brille avec des projets d’égalité, d’inclusivité et de sustainability à Cannes serait un bon contrepied à ce qu’il se passe aujourd’hui dans le pays.

Est-ce que pour autant les marques doivent se mêler de politique ?

D’une part, ça dépend de ce que l’on appelle « politique ». S’il s’agit de tenir un discours ou de mener des actions citoyennes, responsables, avec le désir d’impacter positivement la société voire même d’interpeller les pouvoirs publics, pourquoi pas. D’autre part, cela dépend surtout de l’ADN des marques en question. Il y a des marques comme Leclerc, qui se sont construites dans le temps avec un discours militant, voire politique, et il y a des marques qui estiment qu’elles n’ont pas vocation à aller sur ce terrain. À tort ou à raison, la plupart des marques craignent de perdre le contrôle de leur narratif de marque une fois qu’il est propulsé sur la place publique, ou de passer pour opportunistes en s’accaparant un sujet sur lequel elles ne se sentent pas légitimes.

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