Designeuse depuis 28 ans, Muriel Schildknecht a décidé de construire sa carrière à l’étranger. D’abord à Hong Kong chez Landor et maintenant à Singapour chez Lonsdale, en tant qu’executive creative director.

La céramique

« Cette activité connaît un fort engouement, notamment à Paris, mais je n’ai pas attendu cette soudaine célébrité pour tomber dedans. À Singapour aussi, c’est dans l’air du temps, il y a beaucoup d’ateliers. Cet engouement, on le voit aussi dans notre industrie, des marques sont revenues sur leurs packagings pour revenir à la fonction primaire du contenant. Travailler la céramique revient aux bases de mon métier, c’est-à-dire la créativité et avoir quelque chose de tangible. La matière que l’on travaille prend en compte votre humeur et s’adapte. J’aime cette idée de voir ce que l’on fait, la concrétisation de son projet. Et là, pour le coup, c’est un moment où il faut prendre son temps, c’est une parenthèse dans ma semaine. »

Le cinéma

« J’aime le cinéma, maintenant, je ne suis pas incollable. De par mon métier, je suis forcément très visuelle, et le cinéma me permet de m’informer et de me cultiver sur l’histoire asiatique. Quand je vivais en France, je ne voyais pas forcément les nuances entre la Malaisie, l’Indonésie… Mais avec le cinéma asiatique, je les vois enfin. Il existe un cinéma très local, pas toujours de grande qualité mais son contenu suffit à m’apporter des insights. Et je ne parle pas que des films. Dernièrement, j’ai regardé le documentaire Netflix “Dirty Money” sur l’histoire de corruption de l’ancien Premier ministre malaisien. Si on reçoit un brief pour le lancement d’un nouveau shampoing sur le marché malaisien par exemple, c’est intéressant de connaître ses besoins et son histoire. Dans ce métier, on ne designe pas pour soi, il y a un côté anthropologue. Designer revient à s'intéresser sur les besoins des populations, quand vous n’êtes plus dans votre culture, ce besoin s’exacerbe. »

Les romans graphiques

« J’ai commencé en lisant des BD classiques de type,Tintin, Les Dalton… jusqu’à découvrir les romans graphiques. J’apprends beaucoup de leur narration, comment une image figée peut raconter un contexte, une émotion. Cela relève du storytelling, comme dans le design. Je m’inspire également de leur aspect artistique. Mes amis en France me font beaucoup de recommandations. Dès que je rentre, un de mes rituels est d’aller dans des boutiques spécialisées que je connais. Je n’ai plus forcément la patience de lire un livre de 300 pages, alors qu’un roman graphique rentre dans le temps que j’ai et me laisse plus de place à l’interprétation aussi. »

L’histoire dans l’art

« Depuis toujours dans l’art, il y a des courants qui regardent ce qui a été fait dans le passé et se le réapproprient, certains parlent de copies, moi j’y vois plus de l’inspiration. C’est d’autant plus vrai dans cette partie du monde. À Singapour, des artistes comme Supermama Store travaillent la céramique en utilisant des techniques japonaises – tous les graphismes qu’ils utilisent sont typiques de la culture asiatique – et la réinventent. Dans mon métier, avant chaque projet, nous essayons de comprendre l’historique de la marque. Avant d’être disruptif, il faut avoir la connaissance, sinon vous êtes en disruption avec quoi ? Toutes les marques ont des univers qu’on ne peut pas changer mais leur expression oui. C’est un mouvement perpétuel vers l’avant avec des racines qui remontent presque à l’infini. »

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