Du nord au sud, d’est en ouest, ces acteurs du marché de la communication apportent une vision différente du métier, renouvelant parfois le style et les pratiques.
Olivier Dauvers, libre observateur du commerce et de la consommation
C’est sa deuxième saison au micro de RTL, dans l’émission du matin Ça peut vous arriver, avec Julien Courbet aux manettes. Olivier Dauvers doit sans doute sa nouvelle exposition à l’inflation galopante qui grignote le pouvoir d’achat depuis dix-huit mois maintenant. Un vrai casse-tête. Il parle de « terreau fertile ». À la tête d’une maison d’édition spécialisée, il raconte ce que font les enseignes sur le terrain. Cette semaine, ce sera Montpellier, après Reims, Rennes ou encore Nice. « Ce que l’on voit à Paris, dans les Monoprix et les Franprix, ne ressemble pas à ce qui se passe dans un Lidl ou un E.Leclerc en province, précise-t-il, avec sa faconde bien reconnaissable. Je travaille le Guide Michelin des magasins, avec ce qui se fait de bien, et donc à imiter, et ce qui se fait de mal, pour pousser les enseignes à se demander comment faire pour changer. Passé un certain niveau d’audience, vous avez une forme de liberté. Et plus de poids, car vous parlez directement à leurs clients. » La grande distribution est un sujet qui fait florès.
Sacha Lacheré, cofondateur de Buddies, adepte du marketing pédestre, à Lille
De grands cris de joie en arrière-fond, Sacha Lacheré passe son après-midi à l’Edhec, la business school lilloise. Il peaufine la soirée étudiante dont Buddies est partenaire. Buddies ? « Le premier réseau anti-instantanéité, explique Sacha Lacheré, l’un de ses quatre fondateurs, avec un rendez-vous donné pour découvrir les photos prises pendant la semaine. » Un « revival » de l’esprit argentique, mais sans pellicule, et le réseau social en plus. Pour concevoir et maintenant imposer son application, cet ingénieur diplômé depuis trois ans a opté pour une version à l’ancienne… à pied. Son terrain de jeu préféré : la Grand Place de Lille. « On a pris le temps d’aller à la rencontre de notre cible, les 15-25 ans, avec des allers-retours. Parfois, certains pouvaient penser qu’on allait leur demander de l’argent. » Test and learn grandeur nature, dans la rue. Pas de flyer, pas d’encart publicitaire pour le déploiement de Buddies (« copains » ou « potes » en anglais américain). L’automne est la saison des premières soirées étudiantes. Le principe retenu : chaque étudiant doit installer l’application et avoir associé trois amis pour entrer sur le lieu de la fête. À l’Edhec, sur 800 étudiants concernés, 500 ont fait la démarche – et la journée n’était pas terminée. Un succès. En 2024, Buddies va s’attaquer à tout l’Hexagone, université par université, business school après business school… La communication directe paie. Une levée de fonds d’un montant minimum de 500 000 euros est dans les tuyaux. Mais pas de fonds français, au grand dam du quatuor d’entrepreneurs.
Malvina Hamon, responsable communication RSE et fondation chez Maisons du Monde, à Vertou
Fine rayure, légère tâche… Peu habituels dans des campagnes de communication, ces mots sont au rendez-vous du spot de quarante secondes entièrement réalisé en pays nantais et diffusé sur les réseaux sociaux et le site de Maisons du Monde depuis le 18 octobre dernier. On peut y entendre aussi : « Petit défaut ». « J’ai dû me battre pour voir conservé ce terme, confie Malvina Hamon, responsable communication RSE et ancienne journaliste, parce que cette terminologie n’est pas du tout désirable. Mais l’intégrer est important dans la transparence due aux clients. Il faut dédramatiser. » À bientôt 30 ans – elle a été créée en 1996 –, l’enseigne française se lance dans l’économie circulaire. Et ce message vient souligner la démarche de « seconde chance ». Pour l’heure, aucun passage à la télévision n’est prévu. Les budgets sont serrés : la marque française a vu ses ventes de meubles reculer de 7 % en 2022.
Julien Roset, directeur associé chez Just Happiness, président de l’UCC Grand Sud, à Grabels
« Je me mets en freelance. » Cette ritournelle a le don d’agacer Julien Roset, publicitaire depuis vingt ans, et qui en est à son deuxième mandat à la tête de l’Union des conseils en communication (UCC) du Grand Sud. Aussi l’une de ses actions pour 2023 cible-t-elle les futurs potentiels collaborateurs. « Donner aux jeunes une vision économique juste du métier est essentiel, commente-t-il. Les annonceurs ne doivent plus solliciter des étudiants pour un travail sans rétribution à la clé. Quelle image cela donne de notre métier ! Qu’est-ce que cela leur aurait coûté ? Un don au Bureau des élèves, ou à tout autre organisation de l’école, doit être incontournable. Qualitatifs ou quantitatifs, des points sont à améliorer si on veut récupérer des collaborateurs. » Résultat : 17 écoles (dont l’Efap de Montpellier et d’Aix-en-Provence et Mediaschool [groupe dont fait partie Stratégies] pour ses établissements de Montpellier, Marseille et Nice) viennent de signer un partenariat avec l’UCC Grand Sud. Et cela n’est qu’un début pour cet intrépide publicitaire, au débit hyper rapide. Autre dossier chaud de l’année : la médiation nationale pour aboutir aux « lignes de conduite pour des consultations publiques plus responsables et attractives ». « Quand indemnise-t-on ? Sur quels critères ? Jusque-là, les textes parlaient de “travail significatif”, mais qu’est-ce que cela veut dire ? Ils laissent libre cours à l’interprétation, déplore-t-il. C’est une pratique variable selon les régions. L’État est un gros acheteur. La médiation a fait reprendre un accord cadre passé pour tous les ministères. » Du régional à impact national, puisque mené avec la Filière communication.
Géraldine Seuleusian, directrice de la communication de Daveo (groupe Magellan Partners), conseil en management, coaching et innovation technologique
« Rock’n’cloud » : un attelage surprenant né dans l’esprit de Géraldine Seuleusian pour dynamiser ses agences en région – Daveo est installé à Lille, Nantes, Bordeaux, Lyon et Paris. Une heure de discussion technique suivie de musique, chaque jeudi du mois de juin : la formule séduit. « Entre 50 et 100 partenaires potentiels ou clients répondent à l’invitation, détaille la directrice de la communication, quand d’ordinaire pareilles conférences réunissent 20 à 30 participants. Sans présentation commerciale, cet événement est aussi un élément de la marque employeur. » Et en 2024, ce festival va s’arrêter dans des villes où il n’y a pas encore d’agence aux couleurs de Daveo, mais des clients du groupe Magellan Partners.
Joël Balandraud, maire d’Évron et président de la Communauté de communes des Coëvrons et de Mayenne Tourisme
Une campagne de communication au printemps, une autre en novembre pour ponctuer l’année, la Mayenne met le paquet en 2023. « Comme nombre de départements, la Mayenne a un déficit d’image, confie Joël Balandraud, à la tête de l’agence départementale de développement touristique. Vous n’y allez pas, de base. » Et pour cette édition, exit les agences. « On a changé de pied. On a internalisé pour avoir une production plus ciblée, moins classique et moins chère aussi. » La dernière opération séduction à Paris en 2016 avait coûté 400 000 euros pour une présence de quinze jours dans le métro. Libellée « Un voyage inattendu », la campagne d’avril s’est appuyée sur des photos de blogueurs. Le message qui transpire des neuf clichés retenus : « On revient avec plaisir. » Et le slogan se vérifie dans les chiffres. « La Mayenne fait partie des destinations qui ont progressé cette année », se réjouit Joël Balandraud. Et il y a fort à parier que les chiffres de fréquentation progressent encore avec l’action développée à la mi-novembre en direction des Parisiens : un magasin éphémère de 180 m² dans le Marais, un pop-up store pour décliner les plaisirs du Slowlydays, concept à l’honneur depuis 2016. Près de 60 acteurs locaux seront présents. C’est l’illustration de « cette forte capacité à faire ensemble ». Et pour pas cher (moins de 120 000 euros).
Sélim Batikhy, responsable communication de La Compagnie des déboucheurs, à Saint-Héand
« L’achat est contraint, analyse Sélim Batikhy, responsable de communication de cette entreprise, qui a essaimé partout dans l’Hexagone, avec 92 agences spécialisées dans le débouchage de canalisations récalcitrantes. Comment faire pour développer le réflexe, à la manière d’un Carglass ? » L’option retenue par ce journaliste passé à la communication ? Occuper le terrain : sur TikTok, Facebook, YouTube, avec des tutos au ton décalé notamment, en 4x3 dans la ville de Saint-Étienne à l’occasion de la biennale nationale du réseau Entreprendre, et bientôt à la télévision – toujours avec ce rose flashy, une tonalité impertinente. « Le clou du spectacle », résume Sélim Batikhy. Des discussions encore en cours portent sur le sponsoring d’émissions pour avoir un taux de répétition élevé.
Jean-Christophe Darcheville, directeur d’Altavia Wetail, à Lille
« J’assume. J’assume d’aimer le commerce. » Le credo de Jean-Christophe Darcheville : la théâtralisation du point de vente. « La baisse du trafic, le changement des consommateurs imposent de repenser le time to market. Le digital permet de les toucher différemment, avec des snack contents, du contenu éphémère. » La cadence est un élément clé. « On vit une époque charnière. On est dans l’œil du cyclone, mais le commerce va continuer à exister. Les moments sont grisants. » Un échange qui est en fait une vraie déclaration d’amour pour un secteur aujourd’hui chahuté. « Mais dans le contexte inflationniste, le discours prix ne suffit pas. » Un rendez-vous marquant pour 2023 : l’opération de lancement du partenariat de Carrefour avec les Jeux olympiques, avec des arcs de triomphe, des couloirs de course marqués au sol et des Phryges omniprésents, qui sera déclinée dans tous les magasins de l’enseigne, en propre ou franchisés.