Les agences ont connu un second souffle en 2021, après des mois d'efforts pour résister au covid, selon les enseignements du dernier classement Stratégies réalisé avec le concours d’Altares. De l’avis des experts, cette reprise pourrait bien s'essouffler dès 2023, avec une perspective de recomposition du marché.
Notre classement des 300 premières agences en France en 2021
« Depuis cinq ans, il n’y a jamais eu autant d’agences affichant un chiffre d’affaires en croissance (81 % en 2021 contre 37 % en 2020 et 63 % en 2019) », analysent Frédéric Assouline et Daniel Colé, cofondateurs de Spin-Off & Co, cabinet de conseil en fusion-acquisition, d’après les données business collectées par Altares. En effet, le rebond économique de la période post-pandémique a profité aux agences, d’autant que celles-ci ont pu bénéficier d’aides prolongées (chômage partiel, étalement du paiement des charges sociales…).
Pour les deux experts, le premier semestre 2022 s’annonce excellent, « de l’ordre de +17 % », estiment-ils, et ce alors que des inquiétudes font déjà surface pour la suite de l’année et 2023. « Progressivement, on est en train d’atterrir », commente Frédéric Assouline. Ce dernier relève, par exemple, que les Jeux olympiques de 2024, au lieu d’être un catalyseur d’hypercroissance, pourraient bien n'être simplement qu’un « amortisseur du choc qui est en train de se propager ». « On risque d’entendre des discours pessimistes en début d’année prochaine », prévient-il.
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D’autant que la bonne nouvelle de croissance des agences masque une autre réalité. « Le chiffre d’affaires global de 2021 a décroché de près de 20 % par rapport aux années avant pandémie et la rentabilité a volé en éclats (-84 %) », s'alarment les deux analystes. Selon eux, le digital impose un nouveau business model et est en grande partie responsable de ces chutes de chiffres d’affaires et de résultats nets. « On quitte le monde du conseil pour aller vers de la prestation et de l’exécution, avec des projets vendus moins chers et au forfait », commente Frédéric Assouline.
Un nouveau monde dans lequel les grands groupes ont réussi leur mue digitale en mettant à disposition des annonceurs une palette complète de compétences, avec une capacité et une rapidité d’exécution, y compris à l’international. Dans un même temps, « les grands comptes ont centralisé leurs budgets de communication », observent les deux experts, et ce dans un souci de rationalisation des coûts. Mais « les grands groupes n’acceptent de travailler qu’à un certain prix », poursuit Frédéric Assouline. Ainsi, il resterait aux agences indépendantes les « petites missions », d’après lui.
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« Les grands comptes deviennent de plus en plus hors de portée des indépendantes à moins qu’elles se positionnent sur des niches porteuses », commente Daniel Colé, comme une « réalité marketing, technologique ou de RSE », des expertises recherchées facilement commercialisables. De l'avis partagé par les deux analystes, le secteur des agences indépendantes va forcément être amené à se recomposer dans les prochaines années, avec des rapprochements qui pourraient donner naissance à « des mini-groupes ou des confédérations ». Mais encore faut-il que « les dirigeants se montrent ouverts à la discussion », ajoute Daniel Colé. « La recomposition apparaît difficile mais elle est indispensable », les avertit ce spécialiste des fusions-acquisitions.