Au commencement était Lucy. Un fossile vieux de 3,18 millions d’années qui a révolutionné la perception des origines. Autant dire qu’en choisissant un tel nom pour son outil propriétaire de social listening dédié à Twitter, lancé à la rentrée, l’agence Majorelle donne le ton. Et ne cache pas la haute idée de ce qu’elle entend apporter à l’analyse des opinions sur le réseau aux gazouillis, fort de plus 500 millions de tweets quotidiens.
« Le nom n’a pas émergé immédiatement mais s’est imposé comme une évidence au cours du développement méthodologique et technique, qui a pris deux ans. Quoi de mieux que Lucy l’australopithèque pour illustrer l’approche archéologique et même généalogique des opinions qu’autorise cet outil ? », relève d’emblée Sacha Mandel, qui codirige l’agence de communication d’influence et digitale avec Anne Hommel, fondatrice et ex-conseillère de crise de DSK et pour Charlie Hebdo notamment.
Un échantillonnage aléatoire de 1000 personnes
De là à bouleverser l’ordre établi dans le domaine du social listening ? « La principale faiblesse des outils existants, qui restent pertinents, repose sur une méthodologie faisant la part belle au bruit médiatique. En d’autres termes, cela revient souvent à se focaliser sur les messages eux-mêmes et non leurs émetteurs. Or le quantitatif pur n’est pas une aide à la décision », estime Sacha Mandel, pointant par ailleurs plus largement le dogme de l’échantillon représentatif de 1000 personnes cher à la France. « Il faut une surface d’analyse importante, raison pour laquelle Lucy s’appuie sur un échantillonnage aléatoire de 100 000 Français actifs au moins une fois par semaine, qui sera régulièrement recyclé. Le but est de passer au microscope l’opinion publique afin d’éviter plus particulièrement les biais de perception inhérents à Twitter et aux réseaux sociaux », détaille le dirigeant, précisant avoir négocié de gré à gré avec Twitter Californie pour avoir accès à ces « données anonymisées ». Et il faut reconnaître qu’outre la finesse des résultats et la multiplicité des opérations possibles, bluffantes, l’outil fait tomber bien des idées reçues. Lucy s’est ainsi penché sur les dynamiques d’hyper-visibilité de communautés militantes à l’œuvre sur Twitter.
Alors que les anti-5G représentent 2,6% de l’opinion publique, 13,6% des Français sont exposés une fois par mois à leurs messages, à raison de plus de huit messages par jour en moyenne ! Autres illustrations : 22% des anti-5G ont parlé de la choloroquine au mois de mai 2020 contre seulement 1,8% des Français, tandis que les élus et les journalistes sont très exposés avec plus de 69% lisant des messages anti-5G chaque mois. « L’objectif est de pouvoir aider les acteurs privés - pas de partis politiques ou de politiciens - avec un outil pouvant être utilisé sous licence de manière autonome ou assistée, ainsi que pour mener diverses études sur des sujets précis », conclut-il. Nul doute que face à la distorsion avérée mais souvent complexe à mesurer de Twitter, Lucy devrait connaître une nouvelle jeunesse.
Chiffres clés
2. Nombre d'années nécessaires à Majorelle pour concevoir et développer Lucy.
17 millions. En France, nombre d'utilisateurs mensuels de Twitter ; 4,5 millions d’utilisateurs par jour.
186 millions. Nombre d’utilisateurs monétisables quotidiens de Twitter au deuxième trimestre 2020 (+34% sur un an).