«Mes communicants vont encore dire que je parle trop vite», lâchait-il après l'émission Des paroles et des actes, sur France 2, le 13 janvier dernier. Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à la présidentielle et adepte des petites phrases, ne fait pas exception à la règle en matière de conseillers en communication. Une forme de réalisme politique sans doute.
Son conseiller depuis avril dernier, Arnauld Champremier-Trigano, est précisément un professionnel de la communication. Mais c'est aussi un militant. Ce que son apparence de bobo affable, chaussant des lunettes Prada, a tendance à faire oublier. Tout comme d'ailleurs son patronyme: il est neveu de Gilbert Trigano, cofondateur du Club Méditerranée.
Habitué de la communication et des médias donc, il lance en septembre 2003 Trouble obsessionnel culturel (ou TOC), magazine «citoyen, éthique, militant et générationnel». L'aventure ne durera que quatre ans, mais il se crée un prénom et un réseau solide. Parallèlement, il fréquente plateaux télé et studios radio, en tant que chroniqueur à Paris Première, France 4, RTL, Canal+…
Parallèlement, son agence TOC Médias assure des prestations de communication, «uniquement pour des entreprises publiques, collectivités ou syndicats», précise-t-il. Mais «contrairement à Frédéric Beigbeder, qui a conseillé Robert Hue, et Jacques Séguéla, avec Lionel Jospin en 2002, lui a quinze ans de militantisme dans les pattes, il sait ce qu'est une motion, un congrès», souligne Pierre Cattan, rédacteur en chef de TOC, aujourd'hui producteur à Cinquième Etage Production.
Militant, d'abord au syndicat Unef-ID, dont il prend la vice-présidence en 1994, mais avec une certaine indépendance: «Il présidait un groupe autonome, Demos, avec ses propres troupes, sans être assimilé au courant politique dominant», nuance Thierry Keller, de l'aventure de TOC, maintenant rédacteur en chef d'Usbek & Rica.
Artisan du candidat pour les médias sociaux
Auprès de Jean-Luc Mélenchon, Arnauld Champremier-Trigano semble faire office de modérateur dans ses rapports avec les médias. Il sait retourner des situations délicates, comme l'a montré l'épisode du Petit Journal de Yann Barthès, suspecté de bidonnage à l'encontre du candidat du Front de gauche. Arnauld Champremier-Trigano avait préparé au millimètre sa réponse sur le plateau de Canal+ le 16 janvier dernier.
Il est aussi l'artisan de sa stratégie sur les médias sociaux. Déjà en 2008 – Mélenchon et lui venaient de quitter le PS –, Arnauld Champremier-Trigano tourne les premières web-séries sur le futur candidat.
Aujourd'hui, ce média est devenu la botte secrète du candidat. Sa web-série hebdomadaire, «En marche», est un des éléments-clés de sa campagne Internet. Les références? The West Wing, Rome. «La web-série permet de mettre en scène beaucoup de personnages dans la durée et de donner une vision humaine de la campagne», souligne Arnauld Champremier-Trigano. Une aubaine pour un parti qui n'a que de petits moyens. «Notre budget de campagne est de 2 millions d'euros, dont 100 000 euros pour le Web», poursuit le jeune conseiller. Bingo: il comptait déjà 680 000 pages vues en décembre 2011.
Un chiffre dont n'est pas peu fier le communicant dont le travail serait presque, en l'en croire, une vocation. «J'aurai quarante ans le 22 avril, le jour du premier tour de la présidentielle», lâche-t-il, prenant la pose dans le QG de campagne, bien nommé L'Usine.
Dates clés
22 avril 1973. Naissance.
1990. Adhésion au PS.
1994. Diplômé de Sciences Po Toulouse
1994-1997. Vice-président de l'Unef-ID.
2003. Fondation de TOC Médias, société éditrice de TOC magazine et agence de communication.
2008. Production de la web-série «Monsieur Mélenchon», sur sa sortie du PS.
Septembre 2011. Création de la coopérative Médiascop pour la campagne de Jean-Luc Mélenchon