Installés au cœur de Saint-Germain-des-Prés, à Paris, les Ateliers Devarrieux développent depuis février 2010 une proposition originale: en lieu et place d'une agence traditionnelle, il s'agit d'agencer des talents – rédacteurs, graphistes, designers, photographes, etc. – sur une mission. Chaque équipe ainsi constituée, de cinq à dix personnes le plus souvent, forme un «atelier». Le dernier en date vient de s'achever et de livrer la prochaine campagne Eram, qui sera visible à la rentrée. Bocage, Cardif (BNP Paribas), la Comédie-Française, la région Île-de-France, Jeff de Bruges, Linas, Veolia et Welcoop sont les autres références affichées par les Ateliers Devarrieux. Dix-huit mois après leur ouverture, retour d'expérience avec leur fondateur, Benoit Devarrieux, l'un des grands directeurs artistiques de sa génération qui, la soixantaine venue, est au meilleur de sa forme.
MODÈLE. Les Ateliers Devarrieux reposent sur un modèle économique encore peu développé dans la publicité. Les coûts fixes sont limités au minimum, en termes de loyers et de masse salariale, même si, souligne Benoit Devarrieux, «le système est coûteux car les talents, ça se paye et les Ateliers fonctionnent avec un assez gros appareil de production et de coordination. L'économie du système est totalement orientée vers l'objectif et le résultat à atteindre. Toutes les ressources sont affectées à cela». Cette organisation légère a été rendue possible par les nouvelles technologies, mais aussi par la création du statut d'autoentrepreneur et le retour en grâce du free-lance. «Il y a quinze ans, c'était un pis-aller. Aujourd'hui, c'est une alternative crédible à un destin médiocre en agence. On revoit dans la publicité des jeunes gens talentueux et ambitieux qui avaient disparu pour aller dans la finance.»
PRODUCTION. «Les Ateliers se veulent un appareil de production au service d'un appareil théorique. J'ai besoin d'incarner ce que je crois dans ce que je produis.» Le terme «atelier» a été soigneusement choisi, en référence à la peinture ou à la mode. Benoit Devarrieux explique qu'il tient beaucoup à être proche de la production et de la fabrication. «Être irréprochable sur la qualité du travail est la meilleure garantie.» S'il est «le nom sur la porte», Benoit Devarrieux s'appuie sur une personne-clé dans son dispositif: Max Fanta Fofana, directrice des Ateliers, qui est l'équivalent d'une directrice de production comme dans le milieu du cinéma et dans celui de la mode, dont elle est issue.
ÉDITORIAL. Benoit Devarrieux est un bon connaisseur du milieu de la mode par ses clients et son parcours (ce diplômé de l'École Estienne fut, quelques mois dans les années 1970, directeur artistique de Marie Claire). Il s'en était un peu éloigné ces dernières années et prend aujourd'hui un grand plaisir à y revenir. Les Ateliers ont, confie-t-il, d'«importants développements éditoriaux en cours». «Nous réalisons des sujets magazines pour un groupe de luxe américain, des séries de mode de 15 à 20 pages, textes et images, pour le Sud-Est asiatique, et peut-être à terme pour l'Amérique. Dans ces régions, ils sont demandeurs de "l'œil de Paris".» L'éditorial, c'est aussi le livre vert de la santé réalisé pour Welcoop, une «coopérative libérale de santé», qu'il montre avec fierté. Les Ateliers Devarrieux travaillent aussi en amont pour des groupes de presse: «réflexion sur le produit, avec une dimension planning stratégique et visuel.»
POINT FIXE. Le marché français aujourd'hui est partagé entre quelques très grosses agences et une myriade de petites. Benoit Devarrieux parle d'«une vaporisation qui ne produit rien de remarquable, créant même un effet de brouillard dans lequel on peine à se repérer. D'où la nécessité de points fixes. Dans un monde brouillé, la direction artistique est quelque chose de très important. Dans direction artistique, c'est le mot direction qui compte. Or on voit bien aujourd'hui que beaucoup de marques manquent de direction, de stratégique artistique.» «Directeur artistique de la stratégie», voilà un titre qui ne déplairait pas à Benoit Devarrieux.