création

Le meilleur de la création latino-américaine était réuni au Brésil du 17 au 19 mai lors du Wave Festival. À quelques semaines du festival de Cannes, l'occasion pour Stratégies de croiser des publicitaires en haut de l'affiche.

 

En cette mi-mai brésilienne, le Copacabana Palace prend des airs azuréens. Et pour cause: cet hôtel, le plus célèbre d'Amérique du Sud, a été conçu comme une exacte réplique de la Croisette française, le cadre de la plage mythique de Rio de Janeiro en plus… Mais ici, ce n'est pas le 7e art qui occupe l'esprit des festivaliers mais la publicité. Et, au Brésil, cette dernière est quasiment promue au rang d'art – après le football bien évidemment.

Réunis durant trois jours à l'occasion du Wave Festival organisé par le groupe de médias brésilien Meio & Mensagem, les plus grands talents créatifs du pays s'y croisent. L'occasion également pour tout un continent, du Mexique à l'Argentine, d'échanger. Avec en toile de fond la grand-messe mondiale de la publicité… à Cannes. Car, au Brésil comme ailleurs, remporter un Lion au Festival international de la publicité reste le Graal à atteindre. Argentins et Brésiliens seront d'ailleurs très nombreux dans les jurys cannois cette année encore. Portraits de quatre créatifs qui illustrent, chacun dans sa catégorie, le meilleur de la création latino actuelle.

 

Guga Ketzer, 34 ans, vice-président et directeur de la création de Loducca MPM (Brésil)

 

C'est le petit surdoué de la publicité brésilienne. En 2001, après seulement quatre ans de carrière, Guga Ketzer décroche déjà un Lion d'or en print au concours des Young Creatives à Cannes. À 34 ans, il est désormais à la tête de l'une des quinze meilleures agences du Brésil, Loducca MPM, qui emploie 108 personnes. Son parti pris créatif: «Les médias interactifs ne sont pas seulement dans le numérique.» Résultat, à travers ses campagnes, Guga s'amuse à redonner un coup de jeune au papier en lui offrant une seconde vie. Ses succès: l'annonce en papier comestible pour MTV en 2008, la «publicité qui parle» pour l'opérateur télécoms Nextel en 2009 ou l'annonce presse enduite de paraffine pour la sortie de la Peugeot 207 Quiksilver en avril, visant la communauté des surfeurs. «Pour Nextel, il suffisait d'appuyer sur un bouton placé sur l'annonce presse pour être mis en relation avec un vendeur de la marque, explique Guga Ketzer. Aujourd'hui, marques et publicitaires sont focalisés sur l'Ipad ou l'Iphone. En associant “vieux” médias et nouvelles technologies, on peut pourtant proposer beaucoup d'interactions au consommateur.»

 

Son agence française préférée : Fred & Farid.

 

Anselmo Ramos, 39 ans, vice-président responsable de la création d'Ogilvy Brésil

 

Malgré son visage poupin, Anselmo Ramos a déjà une longue carrière de publicitaire derrière lui. À 24 ans, il quitte le Brésil pour entamer un périple international: Young & Rubicam à Lisbonne, Madrid et Miami puis Lowe à New York. De retour au pays douze ans plus tard, il devient l'un des talents locaux les plus recherchés. Anselmo Ramos maîtrise évidemment l'art des créatifs brésiliens (produire d'excellents visuels print) mais, sans complaisance, il regrette que ses compatriotes n'excellent pas autant en matière de films. «Nous sommes tellement loin derrière les Américains ou les Anglais…», soupire-t-il. Son dernier fait d'armes? Sa récente campagne pour l'un des principaux clients de l'agence, Burger King. Baptisée «Whooper Face», cette opération apporte la preuve que les sandwichs sont cuisinés à la commande du client et non pas des heures à l'avance. L'idée créative: un appareil photo caché dans la caisse enregistreuse du magasin. Photographié à son insu, le client reçoit, avec sa commande, des emballages à son effigie. Effet de surprise garanti. Anselmo Ramos appelle cela de «l'extrapublicité». Autrement dit, une communication qui sort des voies classiques pour servir une idée. «C'est ce que les clients sont désormais en droit d'attendre d'une marque», estime-t-il.

 

Ses agences françaises préférées: BETC Euro RSCG et Ogilvy Paris.

 

Alon Sochaczewski, 36 ans, directeur de la création de Sinc (Brésil)

 

Le marché du «digital» est encore jeune au Brésil. Comme dans tous les pays en développement, le nombre d'internautes a mis du temps à progresser. Mais «ce retard d'équipement est totalement rattrapé», annonce Alon Sochaczewski. «75 millions de Brésiliens utilisent Internet et ce, quels que soient leur sexe, leur condition sociale ou leur profession», précise d'ailleurs une récente campagne d'autopromotion de son agence interactive, Sinc. «C'est un peu notre profession de foi. D'ailleurs, les faits nous donnent raison: pour la première fois au Brésil, il s'est vendu en 2009 plus d'ordinateurs que de postes de télévision», explique-t-il. Une autopromotion d'autant plus nécessaire que le marché de la communication numérique est déjà encombré: il existe plus de 500 agences interactives au Brésil. «Ce chiffre ne veut pas dire grand chose, tempère Alon Sochaczewski. Au regard du manque de créativité dont les agences font preuve sur Internet, il y a vraiment de la place.» Auparavant en poste chez Euro RSCG 4D Brésil, le directeur créatif de Sinc trouve que les choses n'évoluent pas assez vite... «La rapidité, c'est le facteur le plus important dans la communication d'une marque à l'heure actuelle. Et beaucoup ne l'ont pas encore compris», souligne-t-il.

 

Son agence française préférée : BETC Euro RSCG.

 

Rafael D'Alvia, 38 ans, directeur de la création de Madre (Argentine)

 

Pays du 7e art par excellence, l'Argentine est reconnue pour son amour de l'image léchée. Un savoir-faire qui s'est transmis à la publicité. «Nous sommes un petit pays, donc il y a toujours eu une forte concurrence et beaucoup d'émulation entre les publicitaires locaux», analyse Rafael D'Alvia. Le directeur créatif n'est pas un perdreau de l'année. Avant de rejoindre en 2008 le réseau britannique de Mother Grapevine via l'agence Madre, il fait ses armes dans les agences Vega Olmos Ponce (Publicis Graffiti) et Agulla & Baccetti. Quelle que soit l'agence, il travaille en duo depuis plus de dix ans avec le créatif Sebastián Stagno. Chez Madre, Rafael D'Alvia ne jongle qu'avec de gros budgets comme Coca-Cola, Powerade, Nextel, Renault, Rexona ou encore les soupes argentines Mama Lucchetti. À quelques semaines de Cannes, le créatif attend beaucoup de ses compatriotes pour y briller. «En Argentine, nous n'avons pas le volume du marché brésilien, ce qui fait que pour exister, nous devons miser sur la qualité et l'originalité créative.» Toutefois, le «Latino» avoue en souriant: «Même si gagner un Lion à Cannes est très important, mon meilleur public reste ma mère…»

 

Son agence française préférée : BETC Euro RSCG.

 

(encadré)

 

Palmarès du Wave Festival 2010

Grand Prix Film. «You're right» pour Cadbury Adams par Del Campo Nazca Saatchi & Saatchi (Argentine).

Grand Prix Presse. «Textao Passat» pour Volkswagen par Almap BBDO Brésil.

Grand Prix Outdoor. «Whooper Face» pour Burger King par Ogilvy Brésil.

Prix Or Cyber. «Dia N» pour Nokia Series par Publiquest (Argentine).

Agence de l'année en Amérique du Sud. Almap BBDO (Brésil).

 

 

Voir ci-dessous quelques campagnes récentes, sorties en 2009-2010, en Argentine et au Brésil, signées Almap BBDO Brazil (Billboard magazine), DM9DDB Brazil (Fedex), Ogilvy Brazil (Band Sports et Burger King), Loducca MPM (Peugeot 207 Quiksilver) et Del Campo Nazca Saatchi & Saatchi Argentine (Cadbury).

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