En cinquante ans, les marques ont bien changé. D’abord transactionnelles - tel un P&G mettant en avant des produits, des fonctionnalités, cherchant à prendre des parts de mémoire -, elles se sont mises, peu après 1980, à parler au cœur des gens, en mettant en avant des dimensions symboliques comme l’attachement, le pouvoir, la provocation, etc. On pense à Dove louant la beauté naturelle, inclusive. Beaucoup de marques étaient dans le « waouh » : il fallait du beau, du bon, de la mise en scène dans les magazines. Aujourd’hui et depuis 2010-2015, elles sont devenues presque activistes. Elles se positionnement comme des love brands. Elles veulent défendre des valeurs. C’est le cas de presque toutes en ce moment… Mais Patagonia en a été vraiment le fer de lance, avec son « N’achetez pas cette veste », contre le consumérisme. Après le temps de la transaction, de l’émotion et de l’activisme, le quatrième, à venir, serait celui des marques qui s’intègrent dans un écosystème, embarquent, dans leurs produits et leur communication, leurs employés, leurs clients, et même leurs concurrents pour partager les données sur l’éco-conception des produits par exemple. À l’image de Guerlain, qui prend en compte toutes ses parties prenantes, jusqu’aux fournisseurs de vanille ou aux éleveurs d’abeille, pour optimiser le sourcing.
Grand-messe
Ces évolutions se traduisent en communication. Au-delà de la com’ produit, qui sert les besoins opérationnels des marques souhaitant prendre des parts de marché, la partie corporate et discours high level de marque, au niveau des valeurs, va s’exacerber. La transition responsable pousse les marketeurs à identifier leurs marques les plus pertinentes dans ce cadre et à les retravailler. La meilleure communication viendra du consommateur. Voyez ce qui se passe sur TikTok, la plateforme la plus sincère. Le narratif des marques est organisé par les consommateurs - à supposer que ceux-ci ne soient pas sponsorisés.
La marque emblématique du siècle est Apple, du fait de sa capacité de disruption, d’innovation, son talent marketing et de stratégie de marque. Elle a pu changer le monde (les pratiques, les usages) tout en étant incroyable en termes de branding. Du moins jusqu’à la mort de Steve Jobs, qui a marqué la fin des innovations… Le cœur, c’était la keynote. Une révélation, un moment presque religieux. Une grand-messe autour de produits qui avaient un impact. Citons aussi Ben & Jerry’s et Mini. Le point commun entre ces marques emblématiques est qu’elles répondaient à un shift sociétal fort. Mini représentait la classe populaire, les libertaires de mai 68 (au Royaume-Uni), les nouveaux contre les anciens, les bourgeois contre les babas cool. Ben & Jerry’s, marque de fermier défendant les fermiers, c’était l’opposition à l’orthodoxie dominante des années Reagan et précédentes, à une Amérique très impérialiste. C’était David contre Goliath. Apple, quant à elle, faisait de la tech (vs IBM, Dell, Microsoft…) par la créa.